Comment et pourquoi 75 % des juifs en France ont échappé à la mort sous l'occupation nazie ? Une question qui était relativement peu abordée et évoquée en France, jusqu'à la publication en 2013 de l'ouvrage de Jacques Semelin, "Persécutions et entraides dans la France occupée (éd. Les Arènes), qui fait l'objet d'une nouvelle version, "La survie des juifs en France, 1940-1944" (éd. CNRS).
Il ne s'agit en aucun cas de minimiser le drame qu'a constitué la Shoah : "il est hors de question d'oublier les 80.000 juifs qui sont morts du fait de la collaboration du régime de Vichy et des nazis, dans cette période", insiste Jacques Semelin.
C'est Serge Klarsfeld qui dès 1983, a évoqué le chiffre des 75%. Comment expliquer ça ? On peut déjà sans doute en "prendre conscience". 75% c'est "une large majorité : "Il faudrait que nous prenions conscience en France qu'une large majorité de juifs a échappé à la Shoah."
"On peut estimer qu'environ 200.000 juifs sont toujours en France en 1944." C'est une "réalité historique" et "un exemple exceptionnel dans l'Europe nazie" que Jacques Semelin tente d'expliquer depuis de longues années. Si l'on peut parler d'exception française, c'est qu'aux Pays-Bas par exemple, 75 % des juifs ont été exterminés et qu'en Belgique, on parle de 45 à 50 %.
On compte environ 300.000 juifs français au début de la guerre. Une dimension essentielle de cette enquête est de pouvoir distinguer les "juifs français" et les "juifs étrangers". À l'époque on parle de "Français israélites" pour désigner des Français de confession israélite "intégrés depuis au moins un siècle" dans la société française. Ceux qui seront les premières victimes de la répression sont les juifs immigrés en France dans les années 30.
Est-ce le travail des organisations de sauvetage ? 10.000 juifs ont été protégés par des organisations comme La Cimade ou l'Amitié chrétienne. Est-ce l'action de ceux que l'on a appelés les Justes ? Ils sont 4.000 en France. Ces chiffres sont louables mais insuffisants pour expliquer les fameux 75%.
Aussi, le travail de Jacques Semelin a-t-il été de "regarder la manière dont les persécutés ont fait face, ou pas, ou mal, ou à peu près, ou bien, à la persécution, pour y échapper". Il s'est donc penché sur des histoires individuelles de Français israélites et d'immigrés juifs, des trajectoires pour lesquelles il faut distinguer la survie du sauvetage. "Je ne dirais pas que 75% des juifs ont été sauvés en France, je dirais plutôt qu'ils ont survécus."
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