Cette semaine encore, place essentiellement à la littérature jeunesse avec des bandes dessinées et quelques albums. Magie et coup de coeur dans la brume ou aux côtés de chimères sur la planète Vénus...
Fais de beaux rêves d'Olivier Dutto chez l'école des loisirs
Le soir, avant de te coucher, tends bien l’oreille : un lapin magicien te révèlera peut-être la formule magique pour faire de beaux rêves !
L’auteur de cette petite pépite, Olivier Dutto, est bien connu des jeunes lecteurs de 10 ans environ pour sa série Les Petits Diables publiée dans le magazine Lanfeust Mag dans les années 2000 et qui a reçu le Prix jeunesse du festival d’Angoulême en 2005. Une série à succès qui a également été déclinée à la télévision. Après l’illustration de Tu sautes Eliott, il continue de proposer des livres pour les plus jeunes et il est, cette fois-ci, seul aux manettes pour nous faire découvrir son lapin magicien qui, attention, va nous révéler sa formule magique et secrète pour faire de beaux rêves. Et pour cela, il nous faut des animaux, beaucoup d’animaux ! Des papillons, des oiseaux, des singes, des éléphants, des ours mais aussi des objets, une voiture, un avion, une guitare, une trompette, des skis et un balai… Un balai ? mais pourquoi faire ? Oh mais non !!! C’est le balai de la sorcière qui essayait de s’inviter à la fête … et qui aurait dû faire attention car c’est bien son balai qui va permettre au lapin de la faire fuir ! Revenons à notre formule : pour faire de beaux rêves, il ne manque plus que les décors : fonds marins, espace, nuages, jungle… Maintenant que l’on a tous les ingrédients, il suffit de bien les mélanger, alors secouez votre livre et vous obtiendrez de drôles de cocktails, sous la mer et dans l’espace en même temps, des animaux et des plantes qui dansent et jouent de la musique dans la jungle, ou encore une licorne qui saute sur des nuages à côté d’un éléphant et d’un singe à ski. MAIS SURTOUT le secret ultime pour vraiment passer une bonne nuit, c’est de s’endormir en souriant. Illustré avec délice par Olivier Dutto avec ses personnages un peu cartoon et ses couleurs chatoyantes, Fais de beaux rêves est ce qu’il faut de ludique pour que votre enfant en apprécie la lecture et tente ensuite de faire de beaux rêves.
Le chemin des étoiles de Landis Blair chez l'école des loisirs
Watson n’arrivait pas à dormir. Les yeux grands ouverts, il s’efforçait de ne pas penser à ce qu’il pouvait y avoir, tapi dans son placard ou grouillant sous son lit. Quand, soudain, il remarqua quelque chose de bizarre. Watson souleva prudemment sa couverture, et c’est là qu’il vit… le chemin des ÉTOILES.
Un chemin qui le voit découvrir donc les étoiles sous sa couette mais qui le voit également rencontrer de drôles de monstres. Et comme à chaque page, il n’est toujours pas fatigué, il continue d’avancer, prend le train, grimpe en haut d’une tour, jusqu’à s’endormir enfin ! L’auteur Landis Blair est notamment connu pour sa BD adulte, L’accident de chasse. Illustrateur à la plume et à l'encre, il vient de la bande dessinée indépendante de Chicago où il s’est fait remarquer avec ses dessins hachurés que l’on retrouve ici avec quelques monstres qui nous rappellent ceux de Max et les Maximonstres. Une bien belle invitation à la rêverie que cette histoire illustrée sur des doubles pages qui fourmillent de détails et permettent au lecteur de se perdre avec Watson.
Coup de coeur de la semaine
Brume de Jérôme Pélissier et Carine Hinder chez Glénat
Recueillie dans la forêt par un père aimant, Brume est une petite fille espiègle qui ne rêve que d’une seule chose : devenir sorcière ! Le jour où son papa adoptif lui dévoile l’ouvrage secret qui entoure sa naissance, un grimoire de magie, tout s’éclaire. Et si Brume était une véritable sorcière ? Et la voilà, traînant un chaudron d’occasion derrière elle, prête à ouvrir sa première échoppe de sorcière ! N’en faisant qu’à sa tête, elle recrute en chemin son assistant, un petit cochon prénommé Hubert, et se lie d’amitié avec Hugo, un petit garçon ravi de l’aider dans cette entreprise exaltante. Mais Brume ne semble pas avoir les aptitudes d’une véritable sorcière… Ses sorts ne produisent aucun effet. Quant à sa première potion, elle vient de plonger tout le village dans un épais brouillard ! Peu importe : convaincue de la puissance de ses pouvoirs, elle décide de s’engouffrer dans la forêt interdite pour combattre un dragon légendaire qu’elle tient pour seul responsable de ce brouillard nauséabond. Têtue, déterminée et un brin arrogante, elle va entraîner Hugo et Hubert dans une folle aventure qui va en surprendre plus d’un. Et si Brume avait réellement un don et une destinée hors du commun ?
Jérôme Pélissier et Carine Hinder, les auteurs de cette nouvelle série, mettent en scène une petite héroïne forte, drôle et attachante qui évolue dans un univers hors du temps comme un village breton dont s'est inspiré le duo. Le dessin très doux et soigné de Carine Hinder et le scénario rythmé de Jérôme Pélissier font de cette trilogie, la série jeunesse de cette année 2023 à ne pas manquer ! Les auteurs doivent être un peu sorciers car leur mélange d’aventure, de magie et d’humour est une vraie réussite. Leur dosage est parfait ! L’histoire est certes un brin classique mais parfaitement maîtrisée et la lecture ne souffre d’aucune lassitude ou temps mort. Les personnages sont le point fort de cette nouvelle bande dessinée. Notre héroïne tout d’abord, Brume, est parfaitement insupportable de maladresse, ses répliques font mouche à chaque fois et son insouciance et confiance en elle exemplaires ! Le cochon Hubert est lui aussi irrésistible, avec un côté mignon à la Walt Disney, mais qui surtout répare toutes les bêtises de notre jeune sorcière, par ailleurs c’est aussi lui le narrateur du récit ! Hugo, un jeune villageois, ami de notre Brume complète le trio d’explorateurs de la forêt interdite à la recherche du terrible dragon ! Cet album se termine en nous mettant l’eau à la bouche concernant le passé de notre sorcière ! Nous avons hâte de découvrir la suite.
Fortement inspirée par leur nouvelle vie en Bretagne, à Rochefort-en-Terre, comme vous le lirez en fin d’album les auteurs nous servent donc une histoire des plus réussies qui fonctionnent en plein grâce aussi au travail de Carine Hinder aux dessins et couleurs de toute beauté, un trait qui s’inscrit en plein dans la collection Tchô de Glénat chez qui est publié l’album, collection dans laquelle se trouve l’irrésistible série Bergères Guerrières dont nous avons déjà parlé ici à Marque Page et que nous n’hésitons pas encore une fois à vous conseiller. Coup de coeur donc ici aussi pour la bouille et les mimiques de Brume véritablement ensorcelantes ! Comme tous les personnages d’ailleurs, et les décors aussi bien le village que la forêt sont très soignés. Et l’on peut également souligner le joli travail sur les couleurs avec plusieurs ambiances visuelles proposées des plus réussies notamment lors de leur traversée de la forêt interdite ! Sans oublier les cadrages dynamiques qui proposent une variation de cases et de gaufriers éclectiques : petites cases, grandes cases horizontales ou verticales, et même pleines pages ! La lecture s’avère des plus agréables devant ces propositions réussies. Brume est le remède jeunesse pour sortir la tête du brouillard !
Plastok de Maud Michel et Nicolas Signarbieux chez Glénat
Le monde des insectes a survécu aux humains, qui n’ont laissé qu’une montagne de plastique derrière eux ! C’est autour de cette matière « divine », qu’est née une nouvelle Société où coccinelles, papillons, fourmis ou abeilles dirigent le monde. Sur l’île d’Hexapoda où l’on a pris soin d’ériger des temples en l’honneur de l’Homme disparu, la grande prêtresse Anasta veille sur ses sujets en sa qualité de cheffe spirituelle. Son dévoué serviteur, Bug le puceron, n'est jamais loin, et cette proximité a le don d’agacer certains fidèles. Mais alors que la vénérable maîtresse s’apprête à nommer son successeur, elle s’écroule victime d’un empoisonnement ! Tous les regards se tournent alors vers Bug. Accusé puis arrêté, il ne devra son salut qu’à une collègue de cellule qui le sauve in extremis de la peine capitale à laquelle il était promis. Commence alors une cavale sauvage pour ce puceron et son acolyte qui s’est attachée à ce nuisible… Malgré sa gentillesse, Bug fait partie de ces insectes jugés inférieurs. Dans une Société hiérarchisée, il devra croire en son destin s’il veut découvrir la vérité et prouver son innocence. Il se pourrait d’ailleurs qu’avant de succomber, Anasta lui ait transmis un savoir inestimable…
Nous avons là un univers graphique bien à part, aussi visuel que sensoriel qui nous plonge dans le monde de l’infiniment petit pour un moment de lecture bien sympathique, même si l’on peut reprocher une idée plus originale que son traitement : en effet, nous nous retrouvons avec une classique histoire de meurtre et d’un innocent poursuivi qui se retrouve aux côtés d’un allié particulier (une mante religieuse des plus intrépides, un personnage qui vole presque la vedette à Bug le puceron). Car ce monde original dirigé par des insectes où le plastique est véritablement vénéré, se retrouve vite mis au second plan mais reste quelques éléments et situations rigolotes comme ces pucerons qui servent essentiellement pour leur miellat à la base de l’alcool local ou encore ces bars à lumières pour insecte drogué aux lueurs ! Ce premier volume est une introduction plutôt divertissante, car le rythme ne faiblit jamais et son duo de fugitifs marche bien. Il faut cependant se faire au trait singulier du dessinateur qui propose un travail original mais de qualité et souhaiter une suite un peu moins attendue dans le déroulé de sa trame et mettre un peu plus en avant les idées plus novatrices de l’univers qu’ont eu les 2 auteurs.
Les chimères de Vénus, T2 d'Alain Ayroles, Etienne Jung et Thierry Leprevost chez Rue de Sèvres
1874, au cœur de l'âge de l'éther. Les empires terrestres se disputent le contrôle du système solaire. Sur Vénus, le poète Aurélien d'Hormont, évadé des bagnes de Napoléon III, s'enfonce toujours plus loin dans l'inconnu en compagnie d'étranges créatures amphibies. De son côté, l'actrice Hélène Martin redouble de courage et d'ingéniosité pour se frayer un chemin sur cette planète hostile et retrouver son amant hors-la-loi. Bravant l'Océan déchaîné et ses inquiétants abysses, Hélène embarque en direction de l'Île Magnétique. Aventurières intrépides, forçats à la dérive, entités télépathes, croiseur britannique, sous-marin français… toutes et tous semblent inexorablement attirés par ces inaccessibles rivages où se dressent les vestiges d'une mystérieuse civilisation.
Nous vous l’avions évoqué lors de la sortie du premier volume et en introduction à cette chronique, l’esprit de Jules Verne plane sur cette série, et après un premier volume avec ces dinosaures nous rappelant Le voyage au centre de la terre, nous avons le droit cette fois-ci à Vingt Mille Lieues sous les mers. En effet, avec ce deuxième tome, nous avons droit à des poursuites en bateau et en sous-marin ! Le scénariste Alain Ayroles continue à nous tenir en haleine, dans une ambiance feuilleton des plus réussies et par là même continue de nous faire plaisir. Je rappelle que le scénariste est aussi le metteur en scène de cette BD, il assure le storyboard, le découpage de ce que lisent les lecteurs, et tout comme pour le tome 1, le travail est vraiment formidable. Pas une planche ne ressemble à une autre, constamment inventive dans la forme ou le fond tout en restant facilement lisible pour le lecteur. Avec Alain Ayroles, comme souvent les bons mots fusent, tout comme les aventures que vivent, en parallèle, nos deux héros, Hélène et Aurélien. De son côté, le dessinateur Etienne Jung continue, lui, de faire parler son talent avec ses personnages hauts en couleurs, ses engins incroyables et ses créatures fantastiques. Il délaisse cette fois-ci les couleurs à Thierry Leprevost pour un résultat impeccable, très peu de différences visibles avec les couleurs du tome 1 : nous sommes dans une continuité de grande qualité. Avec toujours de grands aplats colorés et vifs, et une approche lorgnant vers l'animation avec ses personnages sans contour encré comme l’on retrouve donc souvent dans les dessins animés. Nous attendons avec impatience, les retrouvailles de nos deux amoureux dans le 3ème et dernier volume !
Programmation musicale :
Brouillard, Thomas Fersen (Je suis au Paradis, 2011)
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