Quand, en 1311, la Maestà de Duccio, le plus grand retable jamais réalisé alors, est installé dans la cathédrale de Sienne, c'est bien l'Évangile qui est donné à voir aux habitants de la ville. "Une véritable bande dessinée" qui rend plus proche de nous le mystère chrétien. Explications de Michel Feuillet, auteur de "L'Évangile en majesté - Jésus et Marie sous le regard du Duccio" (éd. Mame, 2019).
Commandée en 1308, la Maestà de Duccio a été livrée trois ans plus tard. Haute et large de cinq mètres, c’est une œuvre considérable, dotée d’un programme iconographique d’une immense richesse. La mission du peintre était de dire l’Évangile : il faut imaginer que le retable – aujourd’hui en partie dispersé – était à l’époque "une véritable bande dessinée", explique Michel Feuillet. Les fidèles pouvaient voir des scènes de l’Évangile, en haut, en bas, autour et derrière cette image centrale de la Vierge en majesté.
La Maestà doit son nom à la figure spectaculaire de la Vierge représentée en majesté, que le fidèle voyait dès qu’il entrait dans la cathédrale. Marie assise sur un trône, entourée d’anges, tenant sur ses genoux l’enfant Jésus : le thème de la Vierge en majesté est un thème extrêmement fréquent à l’époque de Duccio.
Le peintre reprend le thème de la Vierge en majesté selon un style qui doit beaucoup aux icônes. Mais il lui apporte aussi des "nuances" et de la "tendresse", selon Michel Feuillet. "Toute la cour céleste qui entoure la Vierge propose des couleurs, des attitudes, des regards très variés, et l’ensemble donne une impression musicale comme si des alléluias retentissaient tout autour de Marie et de l’Enfant."
Duccio a ajouté à la dimension surnaturelle une attitude qui rend Marie proche de nous : comme le remarque Michel Feuillet, "les vêtements sont plus souples, le graphisme propre à l’icône est oublié. On assiste à une évolution vers un art plus humain". Duccio "offre du mystère chrétien un visage plus proche".
Le culte marial, à partir du XIe siècle, l’emporte progressivement sur d’autres formes de cultes où le Christ en majesté, ou le Dieu de courroux, étaient dominants. "Marie permet d’avoir une approche de la divinité de Jésus par le biais de la maternité, explique Michel Feuillet, cette manière de s’approcher de Jésus est tout à fait typique de ce culte marial : on aime la mère parce qu’on aime l’enfant."
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