Comme d’habitude, c’est un pur bonheur ! De légèreté, de poésie, d’humour. Avec Bruno Podalydes, on est quasi assurés à chaque film de rire et de s’évader. Et là c’est vraiment un bon crû, après son "Bécassine" qui n’avait pas trouvé son public en 2018, même si moi il m’avait totalement charmée.
En situant ce nouveau film dans le monde de l'entreprise, Bruno Podalydes change complètement de registre. C’est la première fois qu’il ancre son histoire autant dans la modernité. Avec "[S]es 2 Alfred", il a eu envie de nous raconter les travers actuels de la nouvelle économie, où sous couvert d’être "cool et friendly", les jeunes pousses technophiles sont en réalité d’une violence humaine rare. Il a pris le parti de l’humour pour mieux la dénoncer. Et c’est servi par une mise en scène millimétrée qui déclenche très souvent le rire.
On y suit l’histoire d’Alexandre, un quinquagénaire père de famille, qui doit pour prouver à sa femme qu’il est capable de gérer seul son boulot et leurs deux enfants. Et qui se fait embaucher dans une start-up, The Box, dont la règle de base est… de ne pas avoir d’enfants !
Bruno Podalydes réalise là son neuvième long-métrage, Denis a co-écrit le scénario. Et puis parfois, comme ici, ils se donnent la réplique devant la caméra, avec un plaisir communicatif. Ils sont même allés jusqu’à jouer les frères Lumière dans le film "Chocolat" de Roschdy Zem, dans une belle mise en abyme de complicité familiale et professionnelle. Cette complicité existe depuis l’enfance où ils montaient chez eux leur petit spectacle de marionnettes devant leurs parents. Ils ont toujours gardé ce goût du jeu, qui donne à leurs films une gaieté et une sorte d’espièglerie. Et quand on voit Denis jouer dans les films de son frère Bruno, il a son petit air malicieux de celui qui est en train de faire une bonne blague.
Leurs films précédents disséquaient plutôt le couple, la famille, et la crise de la cinquantaine ! C’était le thème de "Comme un avion" sorti en 2015. Ici ça parle drones, "reacting process" et voiture autonome. Avec un sens du burlesque que le réalisateur emprunte clairement à Jacques Tati, mais dont il est vraiment devenu un maître. Il y a tout un travail sur le détournement des objets (les colis sont livrés par des petits parachutes), un travail sur les mots aussi, qui deviennent un langage absurde vidé de tout sens. Ce qui n’est pas sans rappeler la scène d’ouverture des "Vacances de Mr Hulot" où le haut-parleur de la gare hurlait des messages incompréhensibles aux voyageurs.
En plus des deux frères, vous retrouverez tous leurs fidèles acteurs : Sandrine Kiberlain en cadre sup’ dépassée, Michel Vuillermoz en banquier, excellent, Isabelle Candelier en femme d’affaire
C’est frais, c’est drôle, c’est intelligent ! N’hésitez pas !
Chronique réalisée en partenariat avec SIGNIS Cinéma.
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