"Les militaires ont une forme de pudeur, ils n'ont pas envie de se raconter", écrit le Général. Pour autant, il s'agit là de faire connaissance avec l'homme derrière le soldat. Qui est le Général Pierre de Villiers ? Quelles sont ses convictions, qu'est-ce qui l'anime ?
Le Général Pierre de Villiers est né en Vendée, en 1956. La Vendée, une terre chargée d'histoire, tient une place majeure dans sa vie et dans sa construction. "J'ai eu la chance de savoir d'où je viens. L'histoire vendéenne m'a façonnée, les guerres de Vendée m'ont amené à comprendre que ce qui compte, c'est la réconciliation, la bienveillance, le pardon".
Dans sa famille, le sens du service de la France se transmet depuis le plus jeune âge. Son père, maire puis conseiller général, faisait passer le service des autres avant sa propre famille. Ses deux grands-pères ont servi dans l'armée. "Servir, c'est se tourner vers les autres. C'est un signe d'espérance".
Pierre de Villiers a commis deux ouvrages en 14 mois. "Je les ai écrits avec mes tripes, ce sont des livres de conviction". Selon le Général, l'expression "Grande Muette" souvent attribuée à l'armée est impropre. "Nous vivons un paradoxe", dit-il. "On dit souvent que les militaires ne s'expriment pas assez, et quand ils le font enfin, on dit qu'ils doivent rester loyaux. Mais être loyal, c'est dire la vérité".
Les militaires, selon le Général, disposent de qualités qui peuvent aider la société à porter un regard nouveau sur ses travers. "Les militaires sont des spécialistes de la stratégie, ils voient loin, au-dessus de la tactique, quel est l'effet final recherché. Ils ont une vision au-dessus de la mêlée".
L'un des livres marquants pour le Général de Villiers, c'est "Le rôle social de l'officier", du Maréchal Lyautey. "C'était un visionnaire, un vrai chef, en avance sur son temps".
Pierre de Villiers revient sur son expérience en Afghanistan. Il a dû créer une unité entre les soldats venus de quinze pays différents, et rassembler la population afghane pour soutenir la coalition internationale. "Cela passe par le regard, l'écoute, il faut discuter, aller dans les réunions locales. Lyautey m'a appris la confiance se gagne par l'engagement".
En 2014, Pierre de Villiers devient chef d'Etat-Major des Armées. Le chef d'Etat-Major est responsable de la conduite des opérations, des relations internationales militaires, des réformes. Il conseille le gouvernement et instaure un dialogue avec le président. Pierre de Villiers a travaillé avec quatre chefs d'Etat. "C'est une culture de l'armée : on s'adapte au chef. Cela rend modeste. Nous sommes subordonnés au pouvoir politique qui est l'incarnation du peuple".
Pourquoi avoir démissionné en 2017, peu après l'élection d'Emmanuel Macron ? "La situation mondiale se tend. Je ne voyais pas comment garantir la cohérence entre les menaces, les missions et les moyens en supprimant 850 millions d'euros".
Il souligne avoir agi en chef, en démissionnant. "J'ai estimé ne plus être en état de remplir ma mission. Le vrai courage, c'était de démissionner pour qu'un successeur revienne, avec une relation vierge avec le président. C'était aussi un signal d'alarme public".
Son livre "Servir" a été écrit avec un esprit de sérieux, de responsabilité. "J'ai voulu transmettre ce que j'ai appris en 43 années aux jeunes générations".
Pierre de Villiers rappelle que lors des premières dédicaces, le public l'a remercié pour sa dignité, son absence de polémique. "Je crois que les gens en ont assez de cette comédie humaine. Je suis d'un naturel plutôt bienveillant. Je crois en la personne, la richesse des autres. Quand je vois quelqu'un, je me dis que je vais l'aimer, et en tirer le bien".
Le Général est un grand amateur de football. Il a commencé tout petit, et, en opération, n'a pas hésité à créer des équipes pour rassembler les hommes. "Le football m'a appris que je ne valais rien tout seul. C'est un peu comme l'armée : fraternité, cohésion, rigueur, tactique"... Pierre de Villiers est milieu de terrain, un poste entre la défense et l'attaque, un poste de leader. "J'ai toujours aimé créer l'unité. Je déteste la division, je déteste les conflits et je m'engage pour les résoudre rapidement".
Didier Deschamps a conduit l'équipe de France à la victoire mondiale en 2018. Pour Pierre de Villiers, il est un véritable chef : "Un chef sonde les coeurs, en tire le maximum et les met ensemble. Didier Deschamps n'a pas sélectionné les meilleurs joueurs, il a sélectionné la meilleure équipe".
"Notre armée est respectée par nos alliés, crainte par nos adversaires. Je crois en la vocation singulière de la France". La France est le premier pays européen engagé en opérations militaires, le second mondial. 30 000 soldats sont en posture opérationnelle. "La France a une capacité d'entraînement et de conviction, elle peut parler à tous les pays de façon sincère et crédible".
"Ma foi est consubstantielle de ce que je suis. J'essaie de mettre en oeuvre ce que j'ai appris dans la doctrine sociale de l'Eglise". Pour lui, un bon chef dispose de plusieurs qualités : "de l'intelligence, du coeur, une bonne santé et un équilibre transcendantal".
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