C'est une exposition-phare de la rentrée, celle que le Centre Pompidou de Paris consacre au peintre Gérard Garouste. Pas seulement par le nombre des œuvres exposées - plus d’une centaine. Pas seulement parce qu’elle couvre l’ensemble de la carrière de cet homme aujourd’hui âgé de 76 ans. Cette exposition marque aussi une reconnaissance pour un artiste qui n’a jamais eu tout à fait droit à la considération qu’il mérite, contrairement à Pierre Soulages ou Daniel Buren.
Comment cela s’explique-t-il ? Pour une part, cela tient à un aspect douloureux de la vie de Gérard Garouste. Cet homme a traversé de très graves troubles mentaux et effectué de longs séjours dans des établissements psychiatriques. Ce qui, chaque fois, mettait son travail entre parenthèses et l’éloignait de la scène artistique.
Mais le plus important n’est pas là. Dès ses débuts, Garouste a fait des choix à contre-courant de l’époque. À l’heure où de nombreux créateurs se lançaient dans l’art conceptuel ou l’art vidéo, lui a opté pour la peinture. Et pas la peinture abstraite. Une peinture tout à fait figurative qui revendique sa filiation avec les grands maîtres du passé : Tintoret, Greco ou Vélasquez. Sur une scène artistique française assez dogmatique, ce choix jugé rétrograde lui a valu d’être tenu à distance.
Comment caractériser la peinture de Gérard Garouste ? Il peint dans de grands formats avec une gamme de couleurs très riche. Ce n’est en rien une peinture minimaliste ! Depuis ses débuts, Garouste se passionne pour les mythes et pour de grands textes comme la Divine comédie de Dante ou Don Quichotte de Cervantes. La dimension spirituelle de ces livres l’a conduit peu à peu à se plonger dans la Bible, à étudier l’hébreu, le Talmud et la kabbale.
Passion sincère mais qui a aussi quelque chose à voir avec des aspects sombres de sa vie : l’éducation catholique rigide qu’il a reçue, ses relations conflictuelles avec un père antisémite qui a participé aux spoliations pendant l’Occupation.
Chose rare, Gérard Garouste s’est finalement converti au judaïsme en 2014. Et a épousé religieusement sa femme Élisabeth, 44 ans après leur mariage civil. Il faut au passage saluer Élisabeth Garouste, remarquable créatrice de meubles, qui s’est toujours tenue aux côtés de son mari dans les pires moments.
Les tableaux de Garouste sont profondément imprégnés par la mystique juive. Les personnages bibliques sont nombreux : Esther ou l’âne de Balaam. La signification des images est parfois obscure pour ne pas dire absconse, surtout dans la période récente. Mais elles sont peintes avec un talent lumineux.
Gérard Garouste a aussi un engagement associatif qui mérite d’être évoqué. Il a découvert un jour dans quelle misère noire pouvaient vivre des familles à quelques kilomètres de sa maison-atelier de Marcilly-sur-Eure, près de Dreux. Ce qui l’a conduit à fonder l’association La Source dont le but est de favoriser l’épanouissement des enfants en situation de fragilité à travers l’accès à l’art et à la culture. La Source a installé un atelier d’éveil au Centre Pompidou à l’occasion de l’exposition. La visite réjouira les plus jeunes.
> Exposition "Gérard Garouste", au Centre Pompidou (Paris), du 7 septembre 2022 au 2 janvier 2023
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