
Aujourd'hui, Guillaume Goubert revient sur la figure de Geneviève Asse, qui a donné son nom à une couleur le bleu Asse.
Il y a le vert Véronèse, l’outrenoir de Pierre Soulages, le bleu Klein et le bleu Asse. L’artiste qui l’a inventé s’appelle Geneviève Asse, une des grandes figures de la peinture contemporaine française, décédée en 2021 à l’âge de 98 ans. En ce printemps, deux expositions lui sont consacrées. Une importante rétrospective au Musée Soulages de Rodez, que je n’ai pas eu la chance de visiter. Et puis une exposition à la Bibliothèque nationale de France qui est une petite merveille. Elle est consacrée aux carnets que réalisait Geneviève Asse, des œuvres d’art à part entière que l’artiste appelait ses « entractes », à côté des toiles de grand format qu’elle réalisait par ailleurs.
Au début de sa carrière picturale, Geneviève Asse a d’abord peint des natures mortes dans des tonalités sourdes. Elle a évolué à partir des années 1960 vers l’abstraction. C’est le bleu qui a conquis ses tableaux. Mais pas un bleu électrique et homogène comme celui d’Yves Klein. Le bleu de Geneviève Asse, traité en grands à-plats, est doux, plein de nuances, il a des accents de gris, il est comme modelé par la lumière. On a pu le qualifier de « bleu atlantique », en référence aux origines bretonnes de l’artiste qui a grandi dans le Morbihan. Mais il faut souligner aussi que Geneviève Asse ne travaillait pas en monochrome, comme Yves Klein ou Pierre Soulages. Ses tableaux sont souvent animés par un ligne de séparation centrale qui peut être blanche et, souvent, rouge carmin.
Les artistes utilisent généralement les carnets comme un outil de prise de note. Ils y font des croquis de ce qu’ils développeront peut-être ensuite en plus grand format. Geneviève Asse, elle aussi, se servait de ses carnets comme outils d’explorations rythmiques et chromatiques. Mais elle poussait le jeu plus loin. Elle travaillait ses carnets comme une sorte de recueil d’œuvres miniatures, soigneusement réalisées à la peinture à l’huile.
Cela se voit notamment dans les leporellos qui sont exposés à la BNF. Il s’agit de carnets faits d’une seule feuille qui se déplie comme un accordéon. Geneviève Asse en travaille les deux faces comme une sorte de promenade visuelle. Il faut signaler aussi, dans ces petits formats, son travail d’illustration pour des écrivains et poètes comme Yves Bonnefoy, Samuel Beckett ou sa compagne, Silvia Baron Supervielle. Ce qui est fascinant dans ces petits objets, c’est qu’ils provoquent la même émotion que de grands tableaux. On y retrouve la même dimension méditative, cette invitation à la contemplation, au calme, au silence.
Il n’est d’ailleurs pas surprenant que Geneviève Asse ait été sollicitée à deux reprises pour la réalisation de vitraux : dans la cathédrale de Saint-Dié-des-Vosges et dans la collégiale de Lamballe dans les Côtes-d’Armor où elle a travaillé en tandem avec le peintre Olivier Debré.
Ceux qui voudraient voir des œuvres de cette artiste peuvent aussi aller au Musée des Beaux-Arts de Vannes, sa ville natale. Elle lui a fait une importante donation. Où ces deux expositions, au Musée Soulages de Rodez jusqu’au 18 mai et à la BNF, sur le site François-Mitterrand jusqu’au 25 mai.
Chaque mardi à 8h45, Guillaume Goubert et Simon de Monicault présentent une exposition ou un événement qui raconte l'histoire de l'art.
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