Il semble que les pères et les mères d'aujourd'hui n'aient jamais été aussi soucieux de réussir leur métier de parent. Abreuvés de lectures sur l'éducation, ils veulent parvenir à faire de leur bambin un adulte bien dans sa tête et dans ses baskets. Mais la tâche éducative s'avère souvent fastidieuse et vivre aux côtés d'un enfant n'est pas de tout repos. On avait rêvé de l'enfant idéal et le réel peut nous décevoir, nous enrager, en nous culpabilisant de ne pas avoir réussi. Que se cache-t-il derrière la volonté de perfection des parents ? Comment aimer son enfant tel qu'il est ? Ces questions sont au centre de l'ouvrage d'Isabelle Filliozat, "Il n'y a pas de parent parfait" (éd. JC Lattès, 2008).
Notre génération a pris conscience de la responsabilité des parents dans l'éducation, observe la thérapeute. Si bien que l'on apporte aujourd'hui "une attention extrême" à ce que l'on fait ou dit à son enfant, avec cette peur de "le traumatiser". "Dès lors que l'on constate qu'il est trop timide ou qu'il ne réussit pas tout de suite, la culpabilité vient.
D'autre part, "nous sommes quand même dans une société qui valorise beaucoup le jugement, l'image". On en vient parfois à désirer être une bonne mère ou un bon père dans le regard des autres quitte à faire passer les besoins réels de son enfant au second plan. "Trop souvent on se retourne sur soi et on se regarde soi au lieu de regarder son enfant et ses besoins."
Dans son ouvrage, Isabelle Filliozat insiste sur la notion de réaction émotionnelle. Elle rappelle que "le lien parent-enfant est extrêmement complexe". Et que là où l'on s'attend, dès la naissance, à éprouver un élan d'amour spontané pour son enfant, quand celui-ci vient au monde on découvre que "ce n'est pas toujours si simple d'éprouver l'émotion d'amour".
Mais il y a là un sujet tabou : "qui ose dire : 'non, ce n'est pas si merveilleux que ça d'avoir un enfant, pour moi c'est un petit être inconnu, je ne sens rien'... ?" C'est même "traumatisant pour une mère, qui n'ose pas en parler". Isabelle Filliozat a recueilli ce témoignage d'une femme : "Cela fait 12 ans que je n'arrive pas à aimer ma fille." Selon la thérapeute, ce qui fait que l'on n'y arrive pas à ressentir cette "émotion d'amour" ce sont "des émotions bloquées, des choses que l'on n'arrive pas à verbaliser".
Émission d'archive diffusée en 2008
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