Finistère
C’est un voyage dont Jade Destremau se souviendra longtemps. 68 jours sur un bateau pour relier l’Australie à la France, avec pour seule compagnie, son père le skipper Sébastien Destremau, participant par deux fois au Vendée Globe. Une odyssée sous forme de retrouvailles entre un père et sa fille, qu’ils racontent dans un livre : "Sur la route de Jade" (éd. XO).
Tout commence par une accumulation d’avaries qui obligent Sébastien Destremau à se retirer du Vendée Globe 2021 au large de la Nouvelle-Zélande. Cela tombe bien car ce n’est pas très loin de l'Australie où vivent deux de ses cinq enfants : Jade et son frère jumeau avec leur mère. Voilà trois ans qu’il ne les a pas vus en raison des Vendée Globe et du Covid-19, alors Sébastien en profite pour passer du temps avec eux. C’est alors que Jade lui suggère "une idée complètement dingue" : rentrer jusqu’en France avec son père, sur son voilier Imoca nommé "Merci". "C’était un vrai coup de tête", admet-elle en rigolant. Un sacré défi car Jade n’a navigué qu’une fois, à l’âge de 7 ans, et elle avait détesté ça…
Le 13 décembre 2021, père et fille embarquent pour une traversée de 68 jours de Perth en Australie à Toulon. Mais le voyage ne commence pas sous les meilleurs hospices. "Le moteur est tombé en rade parce que j’avais mal calculé la charge des batteries, raconte le skipper, il a fallu intervenir en urgence." Une source de stress pour sa fille, déjà attristée par le fait de quitter sa famille et ses amis. "J’ai eu très peur pendant la première nuit et les premiers jours. Puis après j’ai commencé à tomber malade. C’était vraiment le baptême du feu", admet-elle.
Dans ce voilier minimaliste, la promiscuité est grande. Un petit rideau sépare leurs deux couchettes et deux chaises aux pieds coupés font office de "petit salon de thé" où père et fille discutent, jouent aux cartes ou mangent de la nourriture lyophilisée. À bord il y a trois seaux : l’un pour les toilettes, l’autre pour se laver et le troisième pour faire la vaisselle. "Le manque de confort je m’y suis habituée plutôt vite, mais mes amis me manquaient, et être sur un bateau, c’est très ennuyeux", avoue-t-elle. Ce n'est pas pour autant que Jade a souhaité arrêter son périple une fois arrivée au Cap, en Afrique du Sud, pour une pause technique. "Je me suis dit : dans 30 ans quand je parlerai de ce voyage à mes enfants, j’aurai toujours ce regret d’abandonner en plein milieu !"
De leur voyage sur les eaux de l’océan Indien et de l’océan Atlantique, Jade et Sébastien Destremau reviennent avec un lien père-fille plus fort que jamais. "J’ai découvert mon père en tant que marin et j’ai gagné beaucoup plus de respect pour lui, confie Jade avec une pointe d’accent anglais, ça nous a beaucoup rapproché, c’était un moment privilégié, hors du quotidien." Son père lui aussi en gardera un souvenir mémorable : "J'ai eu cette chance inouïe de pouvoir partager autant de temps avec ma fille donc j’étais un petit peu triste [à la fin]. Cette traversée était bien plus riche et plus belle que mes deux Vendée globe", concède-t-il. À l’issue de ce voyage, le skipper a d’ailleurs décidé de mettre fin aux courses de navigation. Désormais il se consacrera à l’humanitaire.
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