En 2018, on commémore les 75 ans de la mort de Jean Moulin (1899-1943). Un homme qui représente à lui seul la Résistance, voire la notion de résistance. Au risque d'en faire une icône, voire un mythe. 'Il a fallu que je passe derrière la figure du héros', raconte Bénédicte Vergez-Chaignon, auteure de 'Jean Moulin - L'affranchi' (éd. Flammarion). Une biographie où elle aborde la vie du en retenant 25 dates clés de sa vie, de son enfance à sa mort, pour comprendre qui était cet homme. 'J'ai voulu trouver l'homme dans toutes ses dimensions, intime, publique, l'homme engagé, le sportif, l'artiste...'
Il est né à Béziers, le 20 juin 1899, d'un père professeur d'histoire, militant radical socialiste, militant de la Ligue des droits de l'homme, 'dreyfusard acharné' et franc-maçon. Un père qui représente en un sens la IIIe République telle qu'elle a pu être vécue dans certains milieux de la petite bourgeoisie de Province. Tout sa vie, Jean Moulin parlera de son héritage familial comme d'un 'atavisme républicain', auquel il restera fidèle.
Lui qui avait un don pour le dessin et qui dès 16 ans a publié dans des journaux nationaux, n'a pas poursuivi la carrière d'artiste qu'il envisageait, en partie pour des raisons politiques. 'Un homme qui n'est pas dépendant financièrement ne peut pas l'être pour affirmer ses convictions', explique l'historienne. On peut y voir le signe d'une conscience politique très tôt affirmée.
Mobilisé en avril 1918, Jean Moulin n'a cependant jamais combattu et n'est jamais monté au front. Il n'a surtout 'jamais triché' ni laissé entendre qu'il avait été un ancien combattant. Après la guerre, il est étudiant en droit et avec l'appui de son père conseiller général, il entre comme attaché au cabinet du préfet de l'Hérault. 'Et finalement il se prend au jeu, ça lui plaît, il réussit et va se montrer vraiment ambitieux dans sa carrière, au point de devenir - c'est assez connu - tour à tour le plus jeunes sous-préfet de France à 26 ans puis le plus jeune préfet de France à 38 ans.'
En 1939, lorsque la guerre éclate, Jean Moulin est préfet d'Eure-et-Loir. En tant que préfet, il n'est pas mobilisable mais 'il se démène pour obtenir d'être mobilisé dès le début de la guerre, il n'y parvient pas et reste donc à son poste de préfet'. C'est donc en poste, à Chartres, qu'il doit faire face, au printemps 1940, à l'exode massif des réfugiés et aux bombardements. 'Contre vents et marées il va essayer de secourir les réfugiés... Il prend sa voiture, il prend une brouette, il distribue du pain, il trouve des boulangers... On en est à ce niveau d'implication.' Ce qui le motive ? 'L'idée de faire son devoir, répond l'historienne, l'idée qu'il ne peut pas abandonner les gens qui n'ont plus que lui pour avoir une chance de survivre. Finalement ce n'est pas lui qui est allé au front mais c'est le front qui s'est approché de lui.'
Le 17 juin 1940, premier acte de résistance : Jean Moulin tente de mettre fin à ses jours pour ne pas céder aux Allemands. Tout juste entrés dans Chartres ils voulaient lui faire signer un protocole où était mentionné que des tirailleurs sénégalais auvaient violenté et tué des civils - une fausse information mais que Jean Moulin n'avait aucun moyen de vérifier. 'Craignant de céder', il préfère mettre fin à ses jours. On le sauve mais son geste sera rapidement et largement connu.
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