Au sujet du bouddhisme on dit souvent que c'est une sagesse ou une philosophie, et non une religion. Nonne bouddhiste zen depuis près de 40 ans, la française Joshin Bachoux considère toutefois qu'il s'agit d'une religion, "où il n'y a pas de dieu". Explications.
Joshin Bachoux est nonne bouddhiste dans la tradition zen depuis 1986. Après avoir vécu plusieurs années au Japon, dans un monastère, elle a été envoyée en France par Maître Moriyama, pour enseigner le bouddhisme et fonder un centre de méditation en Ardèche, La Demeure sans limites. Un lieu qu’elle a transmis à sa disciple il y a quelques années. Aujourd’hui, Joshin Bachoux enseigne à Paris, Valence, Bruxelles et sur Youtube. Après Karima Berger sur l’islam et Julien Darmon sur le judaïsme, Thierry Lyonnet poursuit dans sa découverte des religions. Il consacre cette nouvelle rencontre de l'émission Visages au bouddhisme.
Comment une jeune parisienne de 30 ans, Luce Bachoux, s'est-elle passionnée par le bouddhisme au point de lui consacrer sa vie et de devenir nonne bouddhiste ? "Ce qui s’est passé, raconte-t-elle, c’est qu’un jour je suis rentrée dans une salle de méditation, j’ai eu la sensation d’avoir été attrapée... J’avais l’impression d’avoir trouvé je ne dirais pas une réponse mais un sens en tout cas aux questions que j’avais." Luce Bachoux est ensuite partie vivre au Japon.
"J’ai eu beaucoup de chance, j’ai trouvé un monastère qui correspondait vraiment à ce que je cherchais : un petit temple dans la montagne avec une vie assez rigoureuse, basée sur la méditation et le travail collectif. C’était merveilleux !" Après plusieurs années, elle a pu enseigner : elle porte le titre de "sensei", qui signifie "enseignant" au Japon. Revenue en France, à la demande de son maître, elle a créé en 1990 La Demeure sans limites, un temple bouddhiste zen situé en Ardèche, où l’on peut venir faire une retraite spirituelle. À condition de "suivre les horaires un petit peu rigoureux", précise-t-elle et de consacrer son temps à la méditation, au travail et à l’étude.
"Pour moi je le vis comme une religion même pour nous c’est étonnant d’entendre parler d’une religion où il n’y a pas de Dieu." En Occident, on connaît surtout les trois grands monothéismes, "où religion égale Dieu". Mais pour Joshin Bachoux, le bouddhisme est aussi une religion même si son "approche" est "complètement différente". Une religion, car "il aide à trouver le sens de notre vie" et à relier les individus les uns aux autres – en référence au mot latin religare, "relier", qui a donné "religion". Dans le bouddhisme, on parle des "trois trésors" : Bouddha, son enseignement (le dharma), et la sangha, c’est-à-dire la communauté des moines et des moniales, mais aussi les laïcs, hommes et femmes.
Bouddha est un personnage historique, il a vécu dans l’actuel Népal, cinq siècles avant notre ère. Il appartenait à une riche famille princière. On raconte que, vivant protégé dans un palais, il a voulu un jour s’en échapper discrètement, pour voir le monde. Il a alors croisé la route d’une personne souffrante, puis d’un vieillard, et enfin d’un cortège funéraire. Ce sont les trois fameuses rencontres. "Les trois rencontres avec la vie réelle", explique Joshin Bachoux. "À la fin, il croise une personne marchant très dignement dans la rue : un moine, un chercheur de vérité", que dans l’hindouisme on désigne par "sadhu", c’est-à-dire un renonçant.
Ces rencontres ont décidé Bouddha à changer de vie. Un jour, assis sous un arbre, il a vécu une illumination. "C’est indescriptible, prévient Joshin Bachoux, c’est quelque chose qui est hors de notre expérience." Ainsi, dans le bouddhisme il est très important d’expérimenter plus que de croire. La notion de chemin, aussi, est essentielle. Il s’agit de suivre un chemin selon les enseignements du Bouddha.
Bouddha n’a pas laissé d’écrits, il vivait à une époque où l’enseignement était oral. Ce n’est que deux ou trois siècles après que l’on a écrit ses enseignements. Bouddha, qui appartenait à l’hindouisme, "ne souhaitait pas créer une nouvelle religion", précise Joshin Bachoux. On pourrait dire que c’est un réformateur.
Quelle que soit la façon dont le bouddhisme est pratiqué, il a pour principe les "quatre nobles vérités". C’est le premier enseignement qu’il a donné à ses disciples. D’abord, Bouddha dit que "la vie et la souffrance sont liées, comme tissées ensemble", décrit Joshin Bachoux. Ensuite, il énonce que l’origine de la souffrance réside dans notre avidité, nous voulons "toujours plus et mieux". Selon Bouddha il faut, pour éviter la souffrance, supprimer de cette avidité. Et, quatrième "noble vérité", il existe une porte de sortie de cette avidité dans "le sentier à huit branches". "Il donne une façon de vivre juste, quelque chose qui va nous éviter cette insatisfaction et cette souffrance."
Malgré la dévotion dont font preuve les bouddhistes devant les statues de Bouddha, celui-ci n'est pas un dieu. Il est "avant tout un maître spirituel", pour Joshin Bachoux. "C’est quelqu’un qui a montré un chemin, confie la nonne, ce que je trouve joli dans mon expérience c’est que cette gratitude qui se tourne d’abord vers le Bouddha... petit à petit va s’ouvrir. Et nous allons prendre conscience de tout ce que nous recevons de tous et de tout, chaque instant. Et cette gratitude va grandir. C’est l’un des piliers d’une démarche spirituelle."
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