Le Vendredi saint, les catholiques commémorent la Passion et la mort de Jésus sur la croix. Alors que plusieurs croyants se retrouvent cette après-midi pour faire le chemin de croix, RCF s’interroge : qui est responsable de la mort de Jésus et pourquoi ?
Autant le dire d’entrée de jeu : difficile d’imputer la mort du Christ à une personne en particulier. Si la réponse est si peu évidente, c’est parce que plusieurs personnes et groupes de personnes semblent se partager la responsabilité de la mort du Christ, à des degrés divers. Voici lesquels.
Le premier nom qui vient à l’esprit lorsqu’on s’interroge sur le responsable de la mort de Jésus, c’est sans doute celui de Judas. Tantôt appelé Satan par Saint Luc, décrit comme voleur et diable par Saint Jean, ou qualifié de cupide par Saint-Matthieu, l’image de Judas est très sombre.
Pourtant, vingt siècles plus tard, son implication dans la fin de vie terrestre de Jésus fait encore débat : a-t-il trahi ou livré le Seigneur ? Et pourquoi ? C’est sûrement cette deuxième question qui suscite le plus d’interrogations car beaucoup ne comprennent pas que l’on puisse livrer un homme qui n’est que bonté.
Si on suit la chronologie des faits relatés par les Évangélistes, les autres responsables de la mort de Jésus seraient Caïphe, le grand prêtre du Sanhédrin juif (une sorte de tribunal) et Ponce Pilate, le procurateur de Judée. Le premier a déclaré Jésus coupable de blasphème, pour avoir affirmé qu’il est le Fils de Dieu, le Messie. Estimant qu’il méritait la mort, mais ne pouvant la déclarer par manque de pouvoir, Caïphe dû laisser cette décision au second, Ponce Pilate. C’est d’ailleurs lui qui prononce sa condamnation à mort.
On pourrait donc dire des deux qu’ils sont juridiquement responsables de la mort du Christ, si tant est que leur décision ait été prise en toute impartialité… Car selon certains Évangélistes, Ponce Pilate aurait pris cette décision sous la pression de la foule qui réclamait ardemment la mort de Jésus.
À l’époque, ce peuple qui a souhaité la mort de Jésus est juif. Ce qui a donné lieu à un amalgame longtemps ancré dans l’esprit des chrétiens, celui selon lequel les Juifs ont tué le Christ. D’une phrase de l’Évangile de Matthieu, ils ont tiré "des conséquences terribles. Cette idée que la faute des juifs était une faute déicide, qu’elle est inexpiable et qu’elle se transmet de générations en générations", expliquait en mars 2023, le père Jean-Pierre Houillon, dans le podcast "Jésus en son temps" sur RCF.
Concrètement, le terme déicide signifie "meurtrier de Dieu". Une accusation grave dans lequel l’antisémitisme prend sa source, selon le père Houillon. Il aura fallu attendre le Concile Vatican II, en 1962, pour que cette vision erronée soit définitivement balayée. Un texte précis met alors fin aux accusations de déicide : la déclaration Nostra Aetate 4. Il y est dit : "ce qui a été commis durant sa Passion ne peut être imputé ni indistinctement à tous les Juifs vivant alors, ni aux Juifs de notre temps".
Par ailleurs, ce texte écrit sous Jean XXIII rappelle que les apôtres et les premiers disciples eux-mêmes sont nés du peuple juif. La preuve, s’il fallait, que ce crime de déicide ne pouvait être imputé à l’entièreté du peuple juif.
D’aucuns disent que cette accusation du peuple juif avait une autre ambition : détourner le regard de la culpabilité des Romains dans la mort du Christ. En effet, accuser les juifs était une façon de disculper les Romains. Car certains d’entre eux ont une part de responsabilité dans la mort de Jésus : d’abord Ponce Pilate qui a été nommé par l’empereur Auguste lui-même, et les soldats romains qui ont exécuté la peine prononcé par le procurateur.
Ce sont les Légionnaires qui arrêtent Jésus, puis lorsque commence son chemin de Croix, certains vont avoir des gestes violents envers lui. Dans l’Évangile de Jean (19, 2-3), il est ainsi dit :"Pilate fait flageller Jésus […] Les soldats s’avancent vers lui en disant : ‘Salut ! Roi des Juifs’ Et ils lui donnent des coups". À l’humiliation de porter sa lourde croix devant la foule, s’ajoute donc la violence.
Enfin, ce sont ces mêmes soldats romains qui, à la fin, clouent Jésus sur la croix. L’un d’eux voulut d’ailleurs s’assurer de sa mort en transperçant le corps de Jésus. Après cela, ce légionnaire appelé Longin le centurion, se convertit et mourut en martyr.
Et si toutes ces questions étaient vaines, et si la mort de Jésus n’était finalement pas la faute de toute l’humanité ? C’est la théorie sur laquelle l’Église se base désormais. Elle la formule avant même le Concile Vatican II, puisque dès 1566, le Catéchisme du concile de Trente précise que les responsables de la mort du Christ sont les pêcheurs de toute l’humanité : "Nous devons donc regarder comme coupables de cette horrible faute, ceux qui continuent à retomber dans leurs péchés. Puisque ce sont nos crimes qui ont fait subir à Notre-Seigneur Jésus-Christ le supplice de la Croix, à coup sûr, ceux qui se plongent dans les désordres et dans le mal" (Hebr., 6, 6.).
La mort de Jésus serait donc une responsabilité collective. Mais, selon la tradition chrétienne, c’est justement pour sauver les Hommes du péché que Dieu s’est fait homme et est mort en croix.
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