Découvrons aujourd'hui le mouvement du collectionnisme au travers de la personnalité du chanoine Lambert de Liverlo (1621-1693), le plus important collectionneur de peintures et mécène à Liège au XVIIe siècle.
Treizième et dernier enfant du riche marchand Wathieu de Liverlo, Lambert effectua une carrière brillante : docteur en droit de l’Université de Reims, il intégra le chapitre cathédral de Saint-Lambert à l’âge de vingt-cinq ans. Il devint prévôt de la collégiale de Fosses-la-Ville en 1658 et puis archidiacre de Hesbaye en 1670. Il eut parallèlement une carrière politique de premier plan puisqu’il fut le chancelier du Conseil privé, une sorte de premier ministre de la principauté. Il fut plus d’une fois chargé de négociations avec le gouvernement de Louis XIV et il devint bientôt le chef de file du parti français à Liège. Ce qui fut à l’origine de ses déboires. À l’époque où la principauté était en guerre avec la France dans le cadre de la Ligue d’Augsbourg, il fut jeté en prison à Maestricht et y mourut quelques semaines plus tard.
Plusieurs témoignages indépendants confirment que Liverlo avait amassé la plus fameuse collection de peintures à Liège. On sait qu’il détenait notamment plusieurs Bacchanales de son ami Bertholet Flémal, qui réalisa aussi plusieurs portraits de lui. Hormis l’un ou l’autre portrait, une seule peinture d’histoire ayant appartenu à Lambert de Liverlo a été repérée. Il s’agit d’un Hercule et Omphale en tondo commandé à Englebert Fisen en 1686 et récemment identifié dans une collection privée.
Liverlo fit travailler divers peintres liégeois. Outre Flémal et Fisen, il employa Gérard de Lairesse, Jean-Gilles Del Cour ou encore Gérard Goswin. Il passa par ailleurs commande aux sculpteurs Lambert Duhontoir, Jean Del Cour et Gérard-Léonard Hérard, au graveur Michel Natalis et sans doute à l’orfèvre Pierre de Fraisne le Jeune.
Lambert de Liverlo fut plus qu’un curieux, il fut le protecteur de plusieurs artistes locaux, qu’il prit sous son aile, comme le peintre Ernest de Lairesse, l’architecte Gérard Douffet fils et surtout son grand ami Bertholet Flémal. Ce dernier vécut même plusieurs années dans la maison du chancelier au rivage d’Avroy et il le désigna comme exécuteur testamentaire.
Comme on l’a vu lors d’une autre séquence, le graveur présumé et marchand Jean Valdor le Jeune, qui avait rang d’ambassadeur du prince-évêque à Paris, intervint pour obtenir la commande à Flémal du plafond de la salle du trône de Louis XIV au palais des Tuileries. Cette commande de Louis XIV, en 1670, s’inscrivait dans la préparation diplomatique de la guerre de Hollande. Or, qui, outre Valdor, négociait alors avec la France pour le compte du prince-évêque Maximilien-Henri de Bavière ? Son premier ministre, Lambert de Liverlo ! Par leur proximité, leur amitié et leur rôle prépondérant dans leurs divers champs de compétences, Liverlo, Valdor et Flémal constituèrent à l’évidence une triade politico-artistique de premier plan dans le XVII e siècle liégeois.
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