Dans ce triste hiver de la poésie, il y aurait-il déjà paradoxalement des signes du printemps ? Le billet de Stéphanie Gallet dans l'émission Effervescence.
Est-ce qu’il y a une saison pour la poésie ?
je ne crois pas mais force est de constater que cet hiver est des plus funèbre pour les poètes.
L’hebdomadaire La Croix l’hebdo nous apprenait dans son numéro du 26 janvier la disparition du poète russe Lev Rubinstein, une des grandes voix de l’avant-garde poétique russe renversé par un chauffard le 8 janvier dernier. Et oui, en Russie, on peut aussi mourir dans un banal accident de la route.
Début décembre je vous en avais déjà parlé c’était le poète palestinien Refaat Alareer qui était tué dans un bombardement à Gaza.
Si quelque chose doit arriver, nous ne le verrons pas. Si seulement nous pouvions vivre jusqu’à notre propre mort … écrivait Lev Rubinstein cité par Stephane Bataillon dans La Croix l’hebdo.
La jolie manifestation du printemps des poètes a du plomb dans l’aile, sa directrice a démissionné, son parrain a été désavoué et nombre de ses participants embarqués dans une polémique dont seul le milieu littéraire français a le secret …
je suis sûrement bien naïve mais moi, je croyais que les poètes savaient habiter le monde autrement. Qu’ils avaient une langue à part, qu’ils étaient étrangers à la vulgarité.
Mais peut être que les poètes sont des hommes et des femmes comme les autres.
Que ce qui compte, c’est la poésie, ce sont les mots qui s'échappent …
Alors pour éteindre la polémique, pour en finir avec ce bruit continue qui nous empêche de discerner la clameur du monde cher au pape François, faisons entendre la poésie, plongeons nous dans les livres, les recueils, écoutons les enregistrements, faisons entendre ces mots qui riment ou ne riment plus depuis longtemps, mais dont la musicalité est un écho aux battements du coeur du monde.
Ce jeudi, les éditions Gallimard publient le dernier livre d’un grand poète, mort il y a un peu plus d’un an, Christian Bobin.
Si seulement nous pouvions vivre jusqu’à notre propre mort écrivait donc Lev Rubinstein. Cristian Bobin semble lui répondre avec un livre écrit les dernière semaine de sa vie.
Le Murmure, c’est son titre.
Sa maison d’édition nous dit que Le murmure est la trace d’une course entre l’amour et la mort. Et qu’à la fin c’est l’amour qui gagne, et de citer Bobin
« Les poètes meurent au combat même quand ils meurent dans un lit. Ils livrent bataille toute leur vie. »
Il y a les poètes éternels et puis ceux qui naissent, que l’on découvre au détour d’un tweet, d’un collage sur un mur, ou même d’un livre car oui les livres de poésie se vendent encore.
j’en veux pour preuve Permettre aux étoiles le nouveau recueil de Stéphane Bataillon publié aux éditions Bruno Doucey.
Oui Stéphane Bataillon, celui qui dans le journal La Croix collecte les pépites poétiques de notre temps. Journaliste, il sait aussi se faire poète. Ecoutez cette attestation qu’il glisse à la fin de son livre comme une promesse faite à sa grand-mère :
Je sais à cet instant que je fais ce que je veux faire de ma vie :
agencer les mots dans le blanc de la page , dans l’espace des voix comme les pierres dun jardin
afin qu’ils se chargent de cet indicible qui tremble en nous
que ces mots puissent si possible, transmettre un peu de chaleur et de réconfort quand tant d’autres nous blessent
comme une contre offensive
c’est ma participation au monde, mon eden, mon plaisir
et de terminer avec ce mystérieux mot égyptien
C’est mon Mazag.
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