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Son histoire tord le cou aux déterminismes. Mariame Tighanimine la raconte dans son autobiographie, 'Différente comme tout le monde' (éd. Le Passeur). Née dans une famille d'ouvriers issus de l'immigration, elle a fait ses étudies en banlieue, en 'ZEP', mais a réussi le concours de Sciences Po, où elle enseigne aujourd'hui.
Décider à l'âge de 25 ans de ne plus porter le voile. Quand on le fait depuis qu'on a 11 ans, ce n'est pas rien. Mais Mariame Tighanimine a fait du chemin, 'ça ne me correspondait plus', dit-elle. Du même coup elle a coupé ses cheveux, très court - dans la rue on la prend pour Cristina Córdula. Le voile, les musulmanes qui le portent le font pour des raisons différentes, coquetterie, pudeur, pour se protéger, parce qu'elles pensent que c'est une obligation religieuse... 'J'en ai rencontré très peu qui le portaient parce qu'elles étaient forcées.' Mariame Tighanimine tord le cou aux idées reçues. Avec sa sœur elle a lancé en 2008 le webzine féminin 'Hijab and the City', pour donner la parole aux femmes musulmanes.
Quand elle a commencé à porter le voile, à l'âge de 11 ans, Mariame Tighanimine l'a fait parce qu'elle avait reçu 'une éducation religieuse'. Sa mère, ses sœurs et ses voisines le portaient. C'était un peu aussi, elle l'admet et n'en est 'pas fière', par provocation. 'J'ai foncé droit dans le piège dans lequel on a voulu me faire tomber.' Elle a fait les frais de ce qui est perçu comme un outil de provocation ou de distinction. 'J'ai tellement reçu d'agressions dans les transports en commun parce que je portais le voile.' L'intolérance de tous les côtés, des islamophobes comme des extrémistes religieux qui lui reprochaient son pantalon trop près du corps.
'Si j'avais écrit ce livre il y a quelques années, il aurait été plein de colère et d'aigreur.' Mariame Tighanimine cumule depuis l'enfance les discriminations liées à la question éthnique, aux origines maghrébines, à l'apparence musulmane, au fait d'être une femme, et surtout d'être 'une fille de prolo' comme elle le répète. 'Des différences qui sont des richesse mais surtout des tares', dit-elle en riant.
Son histoire resemble pourtant à celle de milliers d'autres. Ses parents, un couple berbère venu du Maroc dans les années 60 pour travailler à la mine puis chez Renault, installé dans une barre d'immeuble, ont élevé six enfants. Bien qu'illettrés, ils les ont tous poussés à étudier. Mariame Tighanimine envie 'la manière dont ils vivent avec beauoup de sérénité leur religion, leur foi'. Dans la discrétion et la pudeur, sans militantisme.
Pour qui a connu les discriminations - et tout ce qui va avec, la frustration, la colère, le manque de confiance en soi - et a appris à se battre, transmettre a du sens. Depuis 2016, Mariame Tighanimine enseigne le business à Sciences Po. Ce qu'elle apprend aux jeunes : 'On a tous une place dans cette société il faut la trouver, ici ou ailleurs.' Résolument optimiste, elle les encourage à entreprendre, ce qui reste l'un des meilleurs moyens de s'intégrer dans un pays comme le nôtre.
'Je n'ai pas vécu la guerre ni des choses dramatiques', dit-elle. Mais depuis qu'elle a publié son histoire, elle a reçu de nombreux témoignages de personnes qui subissent d'une façon ou d'une autre le fait d'être 'différent'.
Entretien réalisé en février 2018
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