Au cours de l'histoire de France les femmes ont joué un rôle important lors de moments de crise, mais après des phases d'émancipation, elles sont toujours "renvoyées dans leur foyer".
De la dénonciation du harcèlement sexuel au prises de positions contre le sexisme, la parole se libère en ce moment sur la place des femmes dans la société. Une libre parole largement portée par les réseaux sociaux. Pourtant nous avons en France un gouvernement paritaire (15 hommes, 15 femmes) et on n'a jamais vu autant de femmes à l'Assemblée nationale - 224 femmes sur 577 députés. Reste qu'elles ne sont 'pas tout à fait aux postes les plus importants', pour Céline Rouden. Pourquoi donc la vie politique française a-t-elle du mal encore aujourd'hui à accorder plus de place aux femmes?
'Entre 1946 et 1993 il ne s'était quasiment rien passé pour l'évolution de la place des femmes en politique.' Et le phénomène d'affirmation des femmes en politique est relativement récent. Comme le précise Céline Rouden, aujourd'hui en France, 84% des maires sont des hommes et 90% des conseils départementaux sont présidés par des hommes.
'Dans l'ensemble des espaces de la société, tous les lieux de pouvoir sont visés par cette présence masculine qui donne encore le 'la', y compris quand c'est l'histoire des femmes', complète Geneviève Fraisse. La philosophe déplore ainsi que l'émission 'Secrets d'histoire - Les femmes de la Révolution' (juillet 2017, France 2), ne donne la parole qu'à des historiens hommes pour dresser le portrait d'Olympe de Gouges (1748-1793), de Charlotte Corday (1768-1793), de Madame de Staël (1766-1817), de Madame Tallien (1773-1835), de Madame Roland (1754-1793) et de Théroigne de Méricourt (1762-1817).
Comment expliquer que 'les femmes jouent un rôle important dans les moments de crise, avec à chaque fois un phénomène d'émancipation, et qu'à chaque fois elles sont renvoyées dans leur foyer' ? Et pourquoi par exemple la Révolution a-t-elle exclu les femmes de la vie publique, alors qu'elle a émancipé politiquement les sujets en citoyens ? C'est la question à laquelle Geneviève Fraisse apporte une réponse dans 'Muse de la Raison' (éd. Gallimard). Elle explique comment la démocratie française est devenue jusqu'en 1945 'exclusive' - et non pas 'excluante'.
Geneviève Fraisse décrit un 'puzzle' construit autour des femmes - à la faveur des différentes conceptions de l'éducation, de la reproduction ou de la médecine - et qui a permis que soit 'fabriquée' sans être 'énoncée' la mise à l'écart des femmes. 'Les révolutionnaires ont compris qu'on n'allait pas s'arrêter à la différence des sexes, que le 'pour tous' allait être aussi le 'pour toutes'', explique la philosophe qui observe là 'une peur ontologique, existentielle, économique'.
C'est du côté des partis politique semble-t-il que les femmes rencontrent 'de très fortes résistances' comme l'explique Céline Rouden. Ainsi après la loi sur la parité de 2001, les partis ont-il préféré payer des milliers d'euros plutôt que de présenter autant de candidates que de candidats sur leurs listes. Michèle Cointet, auteure de 'Histoire des 16' (éd. Fayard) parle de 'ruses' par lesquelles les femmes sont exclues. Selon elle, 'en connaissant mieux les partis on connaîtra mieux la vie politique et ses phénomènes d'exclusions'.
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