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Quand Elvis se rêvait le King de Hollywood

Un article rédigé par Fabien Genest - RCF, le 21 juin 2022 - Modifié le 17 juillet 2023

Alors que  sort cette semaine au cinéma le biopic événement de Baz Luhrmann sur Elvis Presley, quel fut réellement son apport et son rapport au 7e art ? Car avec une trentaine de films, le King sur grand écran, ce n’est pas rien, lui qui se rêvait l’équivalent d’un Marlon Brando ou d’un James Dean n’aura en fin de compte laissé que peu de films marquants tout le contraire de bandes originales, souvent brillantes, englobant nombre de chansons devenues par la suite des standards.

©  Wiki Commons. Elvis avec Ursula Andress et Elsa Cárdenas dans "Fun in Acapulco, en 1963.© Wiki Commons. Elvis avec Ursula Andress et Elsa Cárdenas dans "Fun in Acapulco, en 1963.

AUSTIN BUTLER, UN ELVIS TRÈS CRÉDIBLE CHEZ BAZ LUHRMANN

Le film de Baz Luhrmann, sur les écrans depuis le 22 juin, était, autant le dire, très attendu. L’acteur américain de 21 ans Austin Butler incarne le Roi du rock dans une biographie qui s’attache à mettre en lumière l’importance et le poids qu’eut durant toute sa carrière le colonel Parker, qui fut son manager et l’homme par qui tout transitait. Un personnage, certes visionnaire, mais aussi cupide et mu par le profit auquel Tom Hanks prête ses traits dans une composition magistrale.

 

DIEU ET L’HISTOIRE D’UNE RENCONTRE BOULEVERSANTE

Elvis enregistre en 1971 une chanson intitulée "The Miracle of the Rosary" (le miracle du Rosaire), un titre inclus dans l’album "Elvis now" qui paraît l’année suivante. Elvis avait la foi depuis sa plus tendre enfance lorsque ses parents l’emmènent à un service dominical dans leur église pentecôtiste de Tupelo, Mississippi. Fasciné par le chœur, il leur échappe pour se rapprocher. Du haut de ses quatre ans, il ne peut s’empêcher de battre la mesure pour accompagner les choristes.  Plus tard, il enregistrera des chansons de gospel, plus de 60 durant toute sa carrière. La découverte de la foi, du chant et de Dieu, un triptyque qui a toute son importance et qui apparaît bien dans le film de Baz Luhrmann. « Il n’y a qu’un King, c’est Jésus-Christ», se plaisait-il à dire.

 

Croire en Dieu est plus important que d’aller à l’église.

 

1956, "LOVE ME TENDER", L’ANNÉE 0 D’ELVIS AU CINÉMA

L’histoire entre Elvis et le cinéma commence en fait 1956 avec "Le Cavalier du crépuscule", un western de Robert D. Webb sur fond de guerre de Sécession qui comporte quatre chansons. Une idée du colonel Parker qui rend fou de rage Elvis Presley. Aux Etats-Unis, la production rebaptise même le film "Love me tender", du nom du succès du moment du chanteur qui voit vraiment d’un très mauvais œil le fait de mélanger chanson et cinéma. Elvis ne tient qu’un rôle secondaire mais le film sera tout de même un succès.
« Aime moi tendrement, aime moi délicatement ; Ne me laisse jamais partir ; Tu as comblé ma vie et je t'aime tellement ». «Love me tender, love me sweet, never let me go. You have made my life complete and I love you so », chante Elvis Presley à Debra Paget. Les films vont s’enchaîner par la suite à vitesse grand V et reprennent la recette de la chanson tube. Il y aura "Loving you" avant "Le Rock du bagne", en 57, "Jailhouse rock" en anglais, réalisé par une pointure d’Hollywood Richard Thorpe, qui va déchaîner les passions…

LA DÉFLAGRATION "JAILHOUSE ROCK"

Dans une Amérique des années cinquante, en pleine révolution rock'n'roll, Le rock du bagne fait office de tremblement de terre. Malgré l’étiquette de film de mauvais garçons, il conquiert la jeunesse américaine. L’histoire d’un brave type envoyé en prison après la mort d’un homme suite à une bagarre qui a mal tourné va faire d’Elvis une icône et lui ouvrir définitivement les portes de la célébrité. Le film est truffé de futurs tubes en puissance à commencer, bien sûr, par "Jailhouse rock", chanson écrite par Jerry Leiber sur une musique de Mike Stoller mais contient aussi les standards "Treat me nice" et "Don’t leave me now".

"KING CREOLE", L’UN DE SES MEILLEURS FILMS

Seize ans après "Casablanca" et quatre ans avant de disparaître, Michael Curtiz se laisse convaincre par la Paramount de réaliser un film, dont le scénario se déroule à La Nouvelle-Orléans et évoque un chanteur. Un changement radical alors que le héros devait être un boxeur de Chicago et que l’acteur se nommer James Dean. "King creole", et sa chanson titre, toujours écrite et composée par Jerry Leiber et Mike Stoller, sera le dernier film d’Elvis avant qu'il ne parte à l'armée. Il est aussi considéré comme l’un de ses meilleurs. Une fois de plus, il interprète un garçon simple et modeste qui s'en sort grâce à la chanson. En mars 1958, Elvis est sous les drapeaux. Il porte le matricule 533 107 61 et se retrouve en Allemagne sur une base militaire américaine. Il ne sera démobilisé qu’en mars 1960. C’est là-bas qu’il rencontrera la fille d’un officier dont il s’entiche aussitôt. Elle s’appelle Priscilla Beaulieu, n’a que 14 ans et il l’épousera en 1967. Mais pendant son service, Elvis perd aussi Gladys, sa mère adorée. Un traumatisme dont il ne se remettra jamais.

 

Depuis mon enfance, je savais toujours que quelque chose allait m'arriver. Je ne savais pas exactement quoi.

 

"BLUE HAWAII", UNE BO D’EXCEPTION

A son retour à la vie civile, il ne rêve que de cinéma. Les années soixante seront celles d’Elvis, l’acteur. A sa sortie américaine en novembre 61, "Blue Hawaii" est la deuxième collaboration entre Elvis Presley et Norman Taurog. Par la suite, les deux hommes tourneront ensemble encore à sept reprises. La BO du film sera l’une des meilleures ventes dans la carrière du King qui chante entre autres le méga tube "Can’t help falling in love" dans une très belle scène nocturne où il est débute la chanson, collier de fleur autour du cou, au son des notes d’une boîte à musique. Parmi les autres chansons, on trouve notamment "Almost Always True", "Beach Boy Blues", "Blue Hawaii" ou encore "Rock-A-Hula Baby". "Can’t help falling in love" décrit idéalement ce film romantique dans lequel Elvis jongle entre le surf, la plage et les jolies filles, notamment Joan Blackman, au grand dam de son père qui compte sur lui pour l’entreprise familiale. La chanson est créditée aux noms de trois auteurs : George Weiss, Hugo Peretti et Luigi Creatore et s’inspire du Plaisir d’amour, un vieux poème musical français de la fin du XVIIIe siècle.

URSULA ANDRESS ET LE SOLEIL D’ACAPULCO

En matière de jolies filles, Elvis aura toujours été bien entourée. Et c’est encore le cas en 1963 dans "L’Idole d’Acapulco". Elsa Cardenas et Ursula Andress sont ses partenaires dans "Fun in Acapulco", dans son titre original. Le King, qui retrouve Richard Thorpe, six ans après "Le Rock du bagne", y chante notamment Mexico en duo avec Larry Domasin, le jeune garçon débrouillard du film. D’inspiration fortement hispanophone, la musique de cette comédie musicale est composée par Joseph J. Lilley alors que plusieurs chansons sont écrites par Sid Tepper et Roy C. Bennett dont le titre "Mexico". Après avoir joué un employé d’une agence de tourisme dans "Blue Hawaii", le voici en plongeur de haut vol dans "L’Idole d’Acapulco", faisant passer des frissons dans le dos de ses fans qui ne seront guère plus rassurés l’année suivante dans "Viva Las Vegas" où Elvis prête les traits à Lucky Jackson, coureur automobile, séduit par l’actrice et chanteuse suédoise Ann-Margret.

"VIVA LAS VEGAS", SON PLUS GROS SUCCÈS AU BOX OFFICE

Dans "Viva Las Vegas" ou "L’Amour en quatrième vitesse" dans son titre en français, Cesare Danova et Elvis Presley se disputent les faveurs d’Ann-Margret que les deux hommes, pilotes automobiles venus courir au Grand Prix de Las Vegas, convoitent.  Si l’on doit la chanson éponyme du film, le 15e au passage du King, à Doc Pomus et Mort Shuman, en revanche "The Lady loves me", chanté par Ann-Margret et Elvis au bord d’une piscine, a lui été écrit par Sid Tepper sur une musique de Roy C. Bennett. Une idylle sur grand écran qui sera aussi bien réelle. Mais les choses en resteront là et Elvis reviendra dans la capitale du jeu en 1967 pour épouser Priscilla.   Réalisé par George Sidney, "L'Amour en quatrième vitesse" reste son plus gros succès au box-office. En effet, le film rapportera plus de 9 millions de dollars à la MGM, soit près de dix fois le montant initial.

 

Le Seigneur peut donner, et le Seigneur peut enlever.. Je pourrais faire l'élevage des moutons l'année prochaine.

 

"LE GRAND FRISSON" : ELVIS EN BOURREAU DES COEURS

Elvis tourne en 1968 une dernière fois avec Norman Taurog, dans un film qui sortira à l’automne. Ce film, c’est "Live a little, Love a little" : ou "Le Grand Frisson" en français. Le voici photographe pour deux magazines : l'un très puritain et l'autre très érotique, avec en prime une adresse postale dans le même immeuble… Tournant les têtes de ses modèles, il jette son dévolu sur Michele Carey, à qui dans la chanson que je vous propose d’entendre, "Almost in love", il chante la sérénade.

"CHARRO !" DANS LA PEAU DE JESS WADE, LE COW-BOY EX-HORS LA LOI

Elvis aura tourné plusieurs westerns au cinéma. "Charro !" est l’un de ceux-là. Il y apparaît, chose rare, avec une barbe de trois jours. C’est aussi l’un des trois derniers films que tourne le chanteur la même année 1969. Charles Marquis Warren le dirige dans le rôle de Jess Wade, un ex-hors la loi repenti qui souhaite se racheter une conduite mais qui va être rattrapé par son passé. "Charro !" reste comme le seul film où il ne chante pas à l'écran à l’exception de la chanson du générique.

 

Quelques livres:

  • Perfect American Male: Elvis Presley et le cinéma, de Jan Jouvert (éditions Rouge profond, 2021). Un regard expert et une analyse sur le King au cinéma, ses films marquants, son legs, le tout agrémenté d’anecdotes.
     
  • Elvis Presley Another View, de Marc Dufaud (Camion blanc, 2020). Une biographie riche et fouillée qui tente de cerner l'artiste et l'homme en échappant aux idées reçues et lieux communs qui l'entourent, à partir d'un long travail d'analyse et d'une documentation inédite.
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