RDC : au Nord-Kivu, les conflits affament #JeudiPhoto

Les guerre sont la principale cause de la faim dans le monde

C'est une photo de groupe. Enfant, adultes, ils sont nombreux à se presser devant l'objectif. Peut- être sont-ils massés au bord d'une route, en attendant le passage d'un convoi ? Au premier regard, nous sommes en Afrique, il y a des femmes, des enfants et quelques hommes. Tous ont la peau noire, et sont vêtus de tissus multicolores. Mais malgré ces boubous qui pourraient donner un aspect festif à cette photo, une certaine gravité se dégage de ce cliché. Aucun sourire, même les enfants ne sourient pas, ceux qui sont juchés sur les genoux de leur mères comme ceux qui sont debout. Il y a aussi une femmes qui est debout devant et qui fait de drôles de gestes avec ses bras, comme si elle voulait désigner le problème. Tous ont l’air très préoccupés.

Pourquoi le climat semble-t-il aussi pesant ?

Nous sommes à Kibumba, à l’est de la RDC. Dans ce village, les femmes-paysannes rescapées de la localité voisine de Buéné, ont trouvé refuge, accueillies par les familles. Épuisées et désemparées, elles enlacent leurs enfants, qui regardent intrigués en direction de la caméra du photographe William Dupuy. Les femmes, quant à elles, évitent de croiser son regard.
La femme debout c’est Mme Feza, directrice de l’ONG locale UWAKI, et les femmes lui racontent l’enfer qu’elles ont vécu sur la route de l’exil. À quelques kilomètres de là, l’éruption soudaine du volcan Nyiragongo a dévasté leurs champs et leurs maisons. Elles ont alors fui vers le Rwanda voisin. Mais à la frontière, les militaires ont refusé de les laisser passer, certaines d’entre elles, sont même agressées sexuellement.

Et le photographe William Dupuy de raconter : "C’était un moment très difficile. Ces femmes racontaient comment elles ont été prises entre deux feux : d’un côté l’exil causé par l’éruption du volcan, de l’autre les militaires qui ont abusé d’elles sur le chemin de leur exil". Au cours de ses nombreux reportages dans la région, William Dupuy témoigne de ce sentiment de peur et d’insécurité omniprésent à l’est du pays. Les populations ne dansent plus, ne chantent plus, ne rient plus. Les femmes abusées, fragilisées et traumatisées, déambulent comme des “âmes perdues“, c'est son expression.

Depuis plusieurs décennies, la région du Nord-Kivu est gangrénée par les conflits armés. Les milices rebelles, comme le M23, font régner un climat de terreur. Les violences sexuelles, à l’encontre des femmes et des enfants, sont perpétrées comme de véritables armes de guerre. De nombreux enfants sont ensuite enrôlés dans les groupes armés. Les conflits sont l’une des principales causes de la faim en RDC où plus de 27 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire aiguë. UWAKI, l’association partenaire du CCFD est en première ligne pour aider les femmes-paysannes face à la pauvreté et la guerre.