Pourquoi sont-ils si fascinants ? Est-ce parce que de près ou de loin les gorilles nous ressemblent ? Depuis 20 ans, Shelly Masi les étudie. Elle est aujourd'hui l'une des plus célèbres primatologues. Maître de conférences pour le Muséum national d'histoire naturelle de Paris, elle nous confie d'où lui vient sa passion pour les grands singes.
"Je suis née avec cette passion pour les animaux." À l'âge de huit ans, en regardant un documentaire sur les gorilles de montagne, Shelly Masi s'est trouvée véritablement fascinée, captivée. Surtout quand l'un des individus a délicatement a passé son doigt sur un caméléon : de voir ce geste presque tendre, la petite fille est tombée "totalement amoureuse" des gorilles ! "Aujourd'hui je réalise que ce qui m'éloignait des primates, la similitude avec l'homme, c'est ce qui m'a rapprochée des primates à huit ans car je voyais le côté positif, la sensibilité que ces animaux ont."
Ainsi est né un désir, celui de consacrer sa vie aux gorilles. Restait de longues études à suivre, en biologie ou en anthropologie évolutive, entre Rome et Leipzig, en Allemagne. Il a fallu aussi aller sur place, là où ils vivent. La première fois qu'elle a été voir les gorilles en liberté en Centrafrique, Shelly Masi ne risque pas de l'oublier : l'un des animaux s'est montré agressif, il a tiré la jambe d'un Pygmée qu'il a griffée. "Normalement les gorilles quand ils attaquent, dans 98% des cas, ils ne touchent pas."
Shelly Masi avait 23 ans et cette rencontre ne l'a pas découragée, au contraire. "Je pense que l'ingrédient le plus essentiel pour faire ce métier-là c'est la passion." C'est ce qui qui permet de supporter la fatigue, des journées entières sous la pluie et dans le froid, les maladies tropicales - les médecins n'arrivent toujours pas à comprendre quelle sorte de maladie elle-même a attrapée. C'est aussi beaucoup de sacrifices personnels, "un sacrifice social très important" quand il faut partir loin et longtemps.
Pour étudier les gorilles, il faut revenir souvent les voir, les approcher d'assez près à chaque fois afin d'être repéré puis accepté par l'animal. Et cela prend du temps. Pour l'un d'eux, Macumba, il a fallu huit ans pour qu'il finisse par tolérer l'observateur humain. Un exercice de patience et de courage : ne surtout pas broncher quand l'individu se lève sur les pattes arrière, tape sur sa poitrine, crie et cherche à vous impressionner. Ne pas le regarder dans les yeux, ne pas bouger, rester calme. "C'est sûr qu'au fur et à mesure du temps, j'ai acquis du courage !"
Et puis ce sentiment d'être privilégiée quand un gorille vous a acceptée. Et, quand vos regards se croisent, ce sentiment curieux, troublant, de lui trouver quelque chose d'humain. "Je me demande toujours quelles sont les pensées d'un gorille, c'est la chose la plus attirante chez les grands singes, on voit nos origines dans le miroir de leurs yeux."
©Shelly Masi - "Je me demande toujours quelles sont les pensées d'un gorille"
Suivez l’actualité nationale et régionale chaque jour
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !