Cette semaine, j'ai vu le film "Magnificat", de Virginie Sauveur. Une enquête pas banale sur un vieux prêtre dont on découvre à sa mort qu'il s'agissait en réalité d'une femme... Pour une fois où le cinéma s’intéresse à l'Église catholique autrement que sous forme de comédies outrées, ça vaut le coup de s’y intéresser !
Cette découverte, qui est le point de départ du film, va évidemment déstabiliser tout l’entourage du prêtre à commencer par son évêque, appelé en urgence. Il est incarné par François Berléand, très juste et très crédible dans ce rôle pas simple à tenir. Il lui donne une vraie épaisseur humaine et psychologique qu’on imagine assez proche de la réalité de ces pasteurs amenés à gérer des situations de crise, dramatiques parfois. Lui va vouloir plutôt étouffer l’affaire, quand la chancelière du diocèse, Charlotte, jouée par Karin Viard, veut comprendre ce qui s’est passé et comment ils ont pu collectivement en arriver là. Elle commence alors en parallèle sa propre enquête, avec un besoin viscéral de découvrir la vérité.
Les film aborde donc très directement la question de l'accès à la prêtrise pour les femmes. Il l’aborde sous la forme d’une enquête à suspense. On est tenu en haleine par l’intrigue du film, du début à la fin. Il cherche plus à ouvrir des pistes de réflexion qu’à apporter des réponses. Il fait d’ailleurs l’impasse sur l’aspect théologique du sujet. Mais il le confronte en revanche à la question de la vocation et plus largement à la place des femmes dans les instances de pouvoir de l’Église. Et c’est par moment assez pertinent voire cocasse !
Le film navigue donc entre questionnement sociétal, spirituel, et aussi drame familial. Virginie Sauveur a ajouté une seconde intrigue. Un secret que Charlotte garde autour de l’identité du père de son fils. Précisons qu'il s'agit d'une fiction adaptée d'un roman d'Anne-Isabelle Lacassagne, "Des femmes en noir".
C’est aussi le premier long-métrage de la réalisatrice. Il a quelques défauts de jeunesse : des facilités de scénario un peu trop rapide par moments pour être totalement crédible. Mais Virginie Sauveur croit au pouvoir des images et de la fiction pour toucher les esprits et pour changer les regards sur certaines réalités. Elle le fait de façon pudique, avec beaucoup
d’empathie pour ses personnages. À aucun moment, elle ne cherche à dénigrer ou à accuser l’Église. Mais plutôt à enclencher le débat à partir de cette histoire singulière. Et Karin Viard campe un beau personnage de femme croyante, attachée à sa religion et respectueuse de sa hiérarchie mais qui progressivement va se libérer de sa propre histoire.
Un mot sur l'autrice du livre initial. Anne-Isabelle Lacassagne a travaillé plusieurs années au sein d'un diocèse. Elle connaît donc bien l'Église catholique de l'intérieur. Ce qui donne à certains dialogues beaucoup de piquant, assez drôles par moments, avec des répliques bien vues, notamment sur le culte du secret. Quand l’évêque, par exemple, s’inquiète du choix de la société de pompes funèbres pour l’enterrement, il demande s’il est bien catholique et pratiquant et conclut, une fois rassuré : "Parfait, il saura se taire !"
Deux conseillers ecclésiastiques ont aussi accompagné le tournage dont un prêtre du diocèse de Paris et une laïque en mission. Ce qui rend le film parfois simpliste mais jamais caricatural. On y sent une intention sincère qui a l’avantage d’aborder un thème d’actualité. Pour une fois où le cinéma s’intéresse à l'Église catholique, autrement que sous forme de comédies outrées, ça vaut le coup de s’y intéresser.
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