Jésuite, théologien, géologue, paléontologue, Pierre Teilhard de Chardin (1881-1955) est mort il y a plus de 60 ans, et pourtant il reste une figure éminemment moderne. Sans doute parce qu'au fond c'était un aventurier - pas seulement parce qu'il a beaucoup voyagé - un aventurier dans l'âme, iconoclaste, anticonformiste, spirituel, théologique. C'est ce que montre Jacques Arnould, dans "Par des terres qui te sont inconnues" (éd. Cerf). Entre le jésuite du XXe siècle et l'historien, spécialiste des questions éthiques au Centre national d’études spatiales (CNES), la parenté spirituelle et philosophique est évidente.
Aventurier, Teilhard de Chardin l'était à plus d'un titre. Pas seulement pour tous les voyages qu'il a effectués - en Éthiopie, aux États-Unis, en Brimanie ou encore en Afrique du Sud. Et surtout en Chine, où il a passé plusieurs années : le théologien, qui était aussi géologue et paléontologue, a pu être associé à l'étude et l'identification de l'homme de Pékin. Des expéditions hors de France et surtout loin du Vatican, où il n'était pas en odeur de sainteté, loin s'en faut.
Un iconoclaste. Il n'y a qu'à voir la façon surprenante qu'il a eu de parler de la Grande Guerre. Lui qui a combattu dans les tranchées et a connu la souffrance extrême de la vie au front, cerné par la mort et la menace, ne s'est pas interdit d'éprouver de façon singulière une 'nostalgie du front' comme il le disait lui-même. Cette sensation de liberté, d'expérience profondément humaine qui le laissait inquiet de l'avenir. Qu'allait-il pouvoir vivre après cela ?
Pierre Teilhard de Chardin c'est aussi cet homme épris d'amitié pour Henry de Monfreid, un autre aventurier mais qui n'avait rien d'un enfant de chœur. Tour à tour trafiquant d'armes, d'esclaves, de haschich, qu'il surnommait 'le pirate de la mer Rouge'. 'C'est le propre des aventuriers de faire des rencontres avec d'autres aventuriers', commente Jacques Arnould.
Si Teilhard de Chardin était anticonformiste, ce n'était pas pour le plaisir mais par honnêteté intellectuelle. Ses travaux de scientifique l'obligaient à questionner l'interprétation littérale que l'on faisait de la Bible, et notamment de la Genèse. Mais interdit d'enseignement en théologie, il est resté fidèle à l'Église. 'Certains de ses collègues scientifiques lui ont reproché son attachement à l'Église.'
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Interdit d'enseignement par l'Église, le jésuite a fait preuve d'une 'très grande fidélité' à Rome - une fidélité 'profondément spirituelle'. 'Pour lui, explique Jacques Arnould, d'un point de vie théologique, l'avenir de l'humanité ne peut être que christo-centré, son appartenance à l'Église relève de sa fidélité au Christ même.' Et d'ailleurs Teilhard de Chardin disait vouloir mourir le jour de Pâques, jour de la résurrection du Christ. Il est mort le 10 avril 1955, dimanche de Pâques. Pierre Teilhard de Chardin est l'exemple de celui qui a voulu 'incarner jusqu'au bout une pensée théologique', avec la conviction d'un 'message à transmettre'. Par ses travaux, il nous aide encore aujourd'hui à penser l'homme au temps de la science.
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