Depuis 2022, les habitants des villes de Lille et de Faches-Thumesnil ont découvert la pollution dans les sols de leurs quartiers due à l’activité de l’entreprise Exide. Face à l’immobilisme de l’État, certains élus ont décidé cet été de se mobiliser.
L’usine Exide, spécialisée dans la production et le recyclage de batterie est installée rue du Faubourg d’Arras à Lille depuis 1921. Elle est responsable de pollutions fossiles au plomb dues au processus chimique employé. Si la pollution des sols était connue depuis 2004, la Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement a mis en évidence des taux de pollution avoisinant le triple de la « norme » de trois cents milligrammes par kilogramme de terre sèche en 2022. Taux qui soulèvent de nombreuses inquiétudes et réactions de la part des habitants, d’associations comme Après ! et des acteurs municipaux. Cette affaire n’est pas sans faire écho aux autres activités polluantes de la région à l’instar de Refinal ou même de Metaleurope.
La Servitude d’Utilité Publique au cœur des mobilisations
À la suite de la sortie du statut Seveso « haut », l’État a imposé la réalisation d’un dossier d’institution de Servitude d’Utilité Publique (SUP) à l’entreprise Exide. Une enquête publique a été réalisée du 25 avril au 25 mai 2022 auprès des propriétaires potentiellement touchés par la SUP afin de cibler les interrogations et remarques quant à sa réalisation. Le Conseil municipal de la ville de Lille a pris en compte ces conclusions et a pris la décision de valider l’instauration d’une SUP effective au 2 février 2023. Cette mesure sert à mettre en évidence et encadrer le périmètre pour lequel la responsabilité d’Exide en matière de pollution est engagée.
Mais cette zone délimitée est discutée par les riverains, le conseil municipal de Fâches-Thumenil, les élus écologistes de la mairie de Lille et l'eurodéputée lilloise Marie Toussaint : d’une part elle ne tient pas compte des espaces publics et des écoles, et d’autre part elle incombe à ceux qui y sont, des obligations de moyens pour une éventuelle dépollution assortie d’une révision à la baisse de la valeur de leur habitat. Un recours a été lancé auprès du ministre de l'Environnement pour imposer une modification de la SUP. En l’absence de retour avant le 10 juillet, ils pourront intenter une action en justice contre le Tribunal Administratif.
Des actions fastidieuses pour des résultats peu concrets
Certains habitants ont accepté de faire tester leur taux de plomb afin d’avoir des chiffres plus concrets et récents sur les potentielles contaminations au plomb. L’ARS tarderait à transmettre des résultats précis et globaux ce qui entretient le doute quant à des potentiels nouveaux cas de saturnisme chez les populations à risque.
Cependant, étant donné que les écoles ne sont pas dans la SUP, même si les dépistages devenaient systématiques pour les habitants du périmètre, les résultats ne seraient pas objectifs. Par ailleurs, des tests ont été effectués dans différentes zones de la SUP (habitations et parcs) et sont remis en cause par les habitants de par les zones parfois incongrues de prélèvements. Des zones de troubles persistent donc dans les résultats transmis, aussi bien sur le taux de pollution que sur leur persistance.
Une dernière réserve est exprimée par les riverains quant aux peu d’incitations à la vigilance par rapport aux pollutions de la part des autorités compétentes. Le Parc Tudor qui est connu comme pollué depuis des années n’est par exemple pas porteur de pancarte pour éviter aux jeunes publics d'être trop au contact des sols. Bien que des dépollutions à l’amiable ont été proposées par Exide, un habitant souligne l’idée que pour dépolluer son jardin, une pelleteuse plus grande que sa maison aurait dû traverser son salon… une situation qui paraît ubuesque. Ce qui résulte finalement de ces échanges reste le manque d’informations et de prises de positions des élus locaux qui se traduit in fine par des positions qui ne bougent pas à l’échelle nationale et européenne.
Retrouvez ci-dessus le podcast de l'interview de l'eurodéputée Marie Toussaint "Exide, nouvelle affaire de pollution industrielle en métropole lilloise" rencontrée le 4 juillet dernier.
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !