À deux semaines du début de la Coupe du monde de football au Qatar, Féris Barkat dénonce une catastrophe écologique. Pour lui, alors qu'au Bangladesh les populations subissent directement les conséquences d’un réchauffement qu’elles n’ont pas causé, les pays riches peuvent se payer le luxe de ce genre d'événement.
Moi-même fan de foot, j’avoue que c’est un sujet compliqué. Le sport qui mobilise le plus d’êtres humains avec cette Coupe du monde aggrave le problème qui menace le plus d’êtres humains, c’est-à-dire le problème climatique. Et c’est fascinant, si vous avez le malheur d’évoquer les 6500 morts causés par la construction du stade, vous déclenchez immédiatement un argumentaire aussi triste que fallacieux : mais enfin fallait se réveiller avant, ça fait 10 ans. Ou encore pire : vous étiez où pendant la Coupe du monde en Russie ou au Brésil ? Il y a toujours eu des scandales, c’est trop tard maintenant.
Parce qu’ailleurs, au Brésil par exemple, les conditions étaient mauvaises, alors ça devrait nous dispenser de parler du drame de cette Coupe du monde ! Encore plus farfelu, ne pas avoir mis la lumière sur le sujet nous délégitimerait d’aborder le sujet. Vous voyez bien ici qu’il n’y a absolument aucun rapport. En quoi les drames ailleurs justifieraient les drames de cette Coupe du monde ? Si votre enfant tue son chien et vous explique que ce n’est pas grave, car son pote a buté son chat, ça m’étonnerait que cela suffise pour vous dispenser de lui faire la morale. Donc apprenons à regarder la singularité des tragédies sans se trouver d’excuses. Sans trouver toujours un moyen d’esquiver le sujet.
On parle de millions de tonnes, mais un équivalent pour avoir une idée ce serait 18 millions d’aller-retour en avion Paris-New-York. Sans parler des stades climatisés et des autres aberrations. J’aimerais mettre cet événement en perspective avec la situation au Bangladesh. Dans les documentaires, on voit clairement que les populations vivent directement les conséquences d’un réchauffement qu’ils n’ont pas causé. Chaque matin, pendant qu’il reconstruisent leur maison au-dessus du niveau de la mer qui monte inexorablement jusqu’à bientôt la faire disparaître, nous on n’est pas bien sûr de voir qu’il y a quelque chose qui cloche avec cette situation, le comble de l’injustice.
Aucun respect des accords de Paris, aucun respect du bon sens, aucun respect de rien. Alors je me dis qu’on a quand même le luxe de discuter, de fermer les yeux pour profiter d'événements sportifs, alors qu’aujourd’hui ce sont d’autres pays qui payent le prix de nos actes. Oui je sais, très vite vient le sujet du boycott. Personnellement je pense que c’est un choix personnel ou politique, mais l’exiger et mettre la responsabilité sur l’individu, c’est à la fois injuste et ça dispense nos sociétés, les décideurs, de toute remise en question.
Par contre, les joueurs pour le coup, vont directement participer à cet événement et comme on a pu le voir avec d’autres équipes, un petit mot pour manifester leur indignation ne ferait pas de mal. Voire mieux, soyons ambitieux ! Et si on formait les joueurs sur les conséquences de leurs actes ? Oui, participer à un événement aussi dévastateur pour le climat, ça signifie quoi ? Le foot a-t-il un avenir à +2 ou 3 degrés de réchauffement ?
Bref. Plein de questions qui sont finalement directement liées à leur vie, mais qui ne sont jamais abordées. Donc si Mbappé écoute RCF ce matin : je suis à ta disposition, formation expresse sur le climat ! Je repars à Strasbourg cette après-midi mais passe à Strasbourg, t’es le bienvenu, Kylian ! Oui, même à Strasbourg, parce que je suis pas sûr que les conditions climatiques restent accueillantes au Qatar pendant longtemps. Car une étude récente montre que le pays va devenir inhabitable...
Jeunes de la "génération climat", Alexandre Poidatz et Stacy Algrain livrent en alternance, chaque semaine, leur regard sur l'écologie et leurs clés pour changer le monde.
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