LE POINT DE VUE DE MARIE-HÉLÈNE LAFAGE - Le dimanche 9 juin prochain auront lieu les élections européennes. En France, on parle beaucoup des têtes d’affiches, un peu moins des programmes. Marie-Hélène Lafage, consultante et enseignante en politiques de transition écologique a choisi d’aborder la question de la place de l’écologie dans ces élections. Quel est le rôle de l’Union Européenne sur les questions écologiques et climatiques ?
L'Union Européenne est un acteur clé des politiques en faveur du climat, aux côtés des États membres. On l’a d’ailleurs vu avec le Pacte Vert en 2019, et puis en 2021, lorsque nous avons pris des engagements européens pour tenir les objectifs fixés par les Accords de Paris : la neutralité carbone à horizon 2050 et la baisse de 55% de nos émissions de gaz à effet de serre pour 2030 par rapport à 1990. Ces engagements se sont traduits par un ensemble de mesures européennes, comme par exemple l’interdiction de la vente des véhicules thermiques pour 2035. Mais c’est aussi à travers sa politique économique et agricole que l’Europe peut faire la transition : on pense bien sûr à la Politique Agricole Commune, mais il y a aussi les traités de libre-échange, nos choix budgétaires et nos investissements européens, notamment dans les transports. Le droit de l’environnement est aussi largement européen : c’est l’Europe qui a d’ailleurs souvent fait bouger la France sur la protection de la biodiversité et de la ressource en eau, sur la lutte contre la pollution et pour la qualité de l’air. Enfin, l’Union Européenne est une puissance diplomatique : elle négocie aux côtés des États et prend la parole lors des COP. À travers elle, notre parole a un impact sur la scène internationale.
Il est certain que le contexte est aujourd’hui bien différent de celui des élections précédentes, en 2019, au moment des marches climat. Après un début de mandature volontaire sur l’écologie et le vote du Pacte Vert en 2019, on a observé un recul de la politique européenne ces deux dernières années, en particulier sur l’agriculture. Avec la crise agricole et l’inflation, partout en Europe, les partis populistes ont fait de l’écologie un bouc émissaire, en dénonçant un excès de normes, mais sans pour autant proposer des solutions. Renversons plutôt la perspective que nous avons aujourd’hui sur l’écologie dans ces élections européennes : l’Europe c’est un potentiel énorme d’investissements, pas juste des engagements contraignants ; c’est des crédits d’accompagnement pour transformer l’économie, l’agriculture, les territoires, pas juste des normes. Et il n’y a qu’à voir les États-Unis qui de leur côté investissent massivement pour transformer leur économie. Pourquoi ne pas renforcer nos investissements, les mécanismes de solidarité, le fond de soutien à la transition juste et puis la démocratie européenne, plutôt que de jeter l’écologie avec l’eau du bain ?
On doit d’abord se positionner clairement contre les partis populistes qui tiennent des discours antiécologiques sans rien proposer, à une période déterminante pour le niveau de réchauffement à la fin du siècle. L’élection d’une part importante de députés d’extrême droite viendrait tout simplement remettre en cause les engagements climat pris ces dernières années. Mais dans ces élections européennes, il faudrait aussi commencer par… parler d’Europe ! Et ne pas en faire un match franco-français pour préparer les prochaines présidentielles. Car les sujets européens sont suffisamment sérieux pour qu’on s’y intéresse tous les 5 ans : comment voulons-nous peser sur l’économie mondiale ? ou face à Vladimir Poutine ? À travers cette élection, nous avons l’occasion d’envoyer un message clair sur l’écologie, comme cela a pu être le cas en 2019, avec pour conséquence un vrai virage européen sur le climat. Voulons-nous considérer les engagements européens que nous avons pris ces dernières années comme un pas essentiel pour construire l’avenir, ou reculer sous prétexte que le chemin parcouru est en partie insatisfaisant ?
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