Une loi visant à faciliter le changement de nom de famille est en discussion au Parlement. Blanche Streb revient sur ce texte aux enjeux plus multiples qui suscite un désaccord entre sénateurs et députés.
Je voulais revenir ce matin sur une proposition de loi qui est en discussion en ce moment au Parlement. Cette loi qui vise à faciliter le changement de nom de famille. C’est un texte aux enjeux plus compliqués qu’il n’en a l’air au premier abord, un texte qui suscite un désaccord entre sénateurs et députés.
Vous y aviez consacré un dossier intéressant et émouvant dans la Matinale du 25 janvier, on peut le retrouver en podcast.
Que contient ce texte ? La mesure phare, c’est la possibilité pour toute personne majeure de changer de nom de famille, une fois dans sa vie, à tout moment, pour passer, par exemple, du nom de son père à celui de sa mère. Il était déjà possible d’engager une procédure pour demander à changer de nom, cette demande devait être légitime et justifiée. Mais la nouveauté, si ce texte est voté, est que cela sera ouvert à tous, sans raison, avec une simple déclaration déposée en mairie.
Ce texte envisage aussi de pouvoir modifier le nom de son enfant. Pour accoler le nom de la mère à celui du père jusqu’à six mois après la naissance. Et en cas de divorce, le parent dont le nom n’a pas été transmis à l’enfant pourrait aussi obtenir qu’il soit rajouté à l’enfant.
Il faut savoir que les demandes de changement de nom sont en constante hausse. C’est évidemment à mettre en lien avec le déclin de l’institution du mariage et la hausse des séparations.
Mais il y a aussi une autre réalité : le nom de famille est parfois douloureux à porter (ou supporter) lorsqu’il incarne un parent défaillant, abusif ou violent. Certaines victimes témoignent du besoin viscéral d’enterrer ce nom qui leur rappelle sans cesse ce qu’ils ont traversé de douloureux.
On comprend ce type de demande. Mais il aurait été possible de modifier la loi pour faciliter le changement de nom dans ces situations bien particulières.
Pourtant, le texte adopté par les députés va beaucoup plus loin puisqu’il aurait une portée générale. Il serait ouvert à tous. On est là, au fond, dans la continuité de nombreuses réformes qui exacerbent l’autodermination et pour certains, dans une forme de logique continue d’effacement du père.
Cette réforme entrainerait une profonde transformation de l’état civil. Le principe d’indisponibilité de l’état civil (le fait qu’il ne soit pas à la libre disposition de chacun) disparaitrait.
Les conséquences sont nombreuses et mal anticipées. On pense à la fragilisation de l’identification des personnes par la police. A la possibilité d’avoir dans une fratrie des frères et sœurs qui n’ont plus le même nom. A la rupture aussi dans la généalogie…
Et puis, au nom de quoi un changement juste une seule fois dans sa vie, et pas au grès des envies ou des disputes ?
Comme souvent, voici une loi qui propose de bien mauvaises réponses à de bonnes questions.
Blanche Streb est essayiste, chroniqueuse, conférencière, auteure de "Éclats de vie" (éd. Emmanuel, 2019) et "Bébés sur mesure - Le monde des meilleurs" (éd. Artège, 2018). Elle est aussi directrice de la Formation et de la recherche d’Alliance Vita. Chaque semaine, écoutez son édito dans La Matinale RCF.
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