Il y a un devoir de se laisser touché par ce qu'a dévoilé la Ciase, considèrent certains catholiques. RCF leur donne la parole dans le cadre de sa programmation "Rapport Sauvé : construire l’Église d’après". Si elles ont provoqué la sidération, l'accablement ou la colère, les révélations sur les abus sexuels dans l'Église ont permis de libérer les victimes et incité des fidèles à s'engager. Pour d'autres personnes, chez qui la parole se libère enfin, c'est le début d'une démarche...
Après la publication du rapport Sauvé, RCF lance une série d’émissions spéciales mensuelles sur le thème : "Rapport Sauvé : construire l’Église d’après". Avec pour objectif de nourrir la réflexion qui permettra de construire l’Église de demain. Après une première émission consacrée aux victimes et à leur rôle clé dans la libération de la parole et dans les transformations à venir, Anne Kerléo et Clotilde Dumay se penchent sur la réception du rapport Sauvé par les catholiques, la sidération provoquée et les initiatives prises par les fidèles ou les diocèses.
Depuis le 5 octobre, date de la publication du rapport de la Ciase, comment les catholiques ont-ils fait face aux informations révélées par la commission Sauvé ? Dans cette première partie d’émission, Anne Kerléo et Clotilde Dumay reçoivent Pierre-Yves Stucki, catholique laïc du diocèse de Versailles, membre du groupe qui a lancé le hashtag #AussiMonEglise, engagé aux Semaines sociales de France ; Marie-Jo Thiel, théologienne et philosophe, médecin, spécialiste des questions d’éthique, enseignante à la faculté de théologie catholique de l’université de Strasbourg, auteure de “L’Église catholique face aux abus sexuels sur mineurs" (éd. Bayard, 2019) ; Christine Pedotti, journaliste, essayiste, directrice de Témoignage chrétien et co-fondatrice de la Conférence catholique des baptisés francophones (CCBF) ; Jean-François Noël, prêtre du diocèse d’Aix-en-Provence, curé d’Istres et membre de la fraternité des moines apostoliques diocésains, psychanalyste.
Sidération : c’est "le mot qui définit au mieux" l’état dans lequel on se trouve après avoir reçu les chiffres sur les abus sexuels dans l'Église, selon Jean-François Noël. On n’est plus capable de penser, "on est défait de sa propre vitalité". Les pédocriminels "ont réussi à sidérer les victimes mais à continuer leur œuvre de destruction en sidérant les gens qui ignoraient le fonctionnement du pervers". Pour les victimes, et selon la théologienne Marie-Jo Thiel, le rapport Sauvé a permis aux victimes de "sortir de la sidération des pervers".
D'abord plongé dans l'accablement face au "degré de perversité" de certains auteurs d'abus, Pierre-Yves Stucki est passé par "tout un panel d'émotions". Simple laïc catholique engagé dans la vie de son diocèse, il a lu les témoignages des victimes. Il a été pris d'une "colère noire" à l'égard de l'Église quand il a pris conscience de la façon dont l'institution a dissimulé les faits. Le travail de la Ciase explique en tout cas pourquoi tant de gens ne veulent plus entendre parler de l'Église, une question qui taraude la journaliste Christine Pedotti depuis longtemps. Pour elle, on comprend mieux en quoi le peuple de Dieu forme un seul corps : de telles révélations, "ça choque, ça bouleverse le rapport avec l’Église, on n’a pas fini d’en parler..."
Des membres du collectif "De la parole aux Actes" à Lourdes, le 06/11/2021 ©Valentine CHAPUIS / AFP
Au sein de l’Église et dans le cœur des croyants, le rapport Sauvé et a provoqué des tiraillements, des affrontements, mais aussi des synergies, des envies de faire avancer l’Église. Pour en parler, Anne Kerléo et Clotilde Dumay reçoivent Pierre-Yves Stucki, laïc engagé au sein du diocèse de Versailles ; Catherine Boulanger de l’association Agir pour notre Église ; Bruno Millevoye, prêtre du diocèse de Lyon ; Jean-Claude Caillaux des fraternités Pierre d’Angle.
"Il y a un devoir de se laisser toucher par ça", considère Pierre-Yves Stucki. Selon lui, "la première chose c’est déjà de dire oui je suis concerné par ce sujet, de se rendre compte que nous sommes nombreux à partager cette conviction, cet engagement, et après il va falloir qu’on arrive à le mettre ne place progressivement et ça prendra du temps car l’Église n’est pas la structure qui bouge le plus vite". Catholique engagé au sein du diocèse de Versailles, il fait partie de ceux qui ont lancé le hashtag #AussiMonEglise. Une façon de "réagir pour dire qu’il y a une adhésion forte de la part de certains fidèles."
On sent bien que le rapport de la Ciase a libéré la parole. Ce jeudi 16 décembre, Jacqueline, auditrice de RCF à Brest, a lancé un appel à l'aide sur notre l'antenne. Son mari avait été victime d'abus sexuels dans l'Église et sa fille a été violée par le frère d'un prêtre pour se venger de l'action engagée en justice. Mais les paroisses sont-elles prêtes à accueillir toutes ces personnes victimes ?
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