Avec la prière et le jeûne, le partage est l’un des trois piliers du Carême. Mais qu'est-ce que le partage ? Faut-il distribuer des biens matériels à plus pauvre que soi ? Et si la finalité du partage était de se rencontrer en vérité ?
Durant le Carême, RCF vous accompagne avec un parcours spirituel sur le thème : "Choisir la vie". Un thème inspiré par ce verset de la Bible : "Je mets devant toi la vie ou la mort, la bénédiction ou la malédiction. Choisis donc la vie" (Dt 30, 19). Comment interpréter cette parole de Dieu ? "On pourrait prendre ça comme un injonction un ordre, observe Thierry Deslauriers. En fait c’est une prière que Dieu nous fait. La question, c’est de savoir comment on répond à cette prière et comment je choisis la vie à chaque instant, dans les plus petits gestes, dans les plus petits moments. En fait, c’est une parole qui devrait nous habiter à chaque instant." Directeur de l’association Aux captifs, la libération, dont la mission est d’accompagner les personnes qui vivent dans la rue, Thierry Deslauriers témoigne sur son expérience du partage à l’occasion du Carême.
Avec la prière et le jeûne, le partage est l’un des piliers du Carême. On parle aussi d’aumône ou de charité : de quoi s’agit-il ? Est-il question, durant le Carême, de distribuer des biens matériels à plus pauvre que soi ? Ou bien y a-t-il d’autres formes de partage ? L’apôtre Paul accorde une place de premier plan à la charité. Il déclare : "Ce qui demeure aujourd’hui, c’est la foi, l’espérance et la charité ; mais la plus grande des trois, c’est la charité." (1 Co 13, 13) Dans la conception chrétienne, la charité est une forme d’amour totalement gratuite et sans égoïsme.
C’est "dans la gratuité complète", décrit Thierry Deslauriers, sans proposer de soupe ou de café, que les membres de l’association Aux captifs, la libération vont à la rencontre des exclus, des sans-abris, des prostitués. "On va en fonction des conversations, on n’a pas de démarche prosélyte." Comme Thierry Deslauriers le dit dans son livre, "Charité à mains nues" (éd. Artège, 2023) : "On dit Dieu quand on est à main nues." Un Dieu qui, dans l’Évangile, s’est montré vulnérable. "Dieu, quand le Père envoie le Fils, il l’envoie complément vulnérable. Vulnérable dans le sein de Marie, vulnérable quand il est enfant… vulnérable sur la croix, dans l’hostie..."
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Auprès des personnes "en prostitution ou dans la rue, comment annoncer qu’il y a une source à l’amour s’ils n’ont pas vécu l’amour ?" Le maître-mot c’est "la fidélité". Rencontrer l’autre en vérité, cela demande du temps et de la patience. "L’idée c’est d’y aller fidèlement toutes les semaines, explique le directeur d’Aux captifs, la libération. Donc c’est le même binôme qui va tourner toutes les semaines à la même heure sur le même trajet... Cette fidélité, elle est importante et elle dit aussi la fidélité de l’amour de Dieu et la patience de l’amour de Dieu."
Comment incarner et donner à voir l’amour inconditionnel de Dieu ? Comment en être le signe auprès de personnes en situation de pauvreté ? Pour Thierry Deslauriers, il est essentiel de "ne pas les juger, de les regarder en tant que personnes… On a un regard inconditionnel vers elles, on les regarde de manière intégrale comme Dieu les regarde et c’est comme ça qu’on témoigne d’abord de notre foi."
La vie spirituelle est aussi essentielle que manger et avoir un toit, on en peut pas nier cette dimension, il faut vraiment y être attentif
Quand on veut aider l’autre, souvent on pense d’abord à des besoins essentiels comme la nourriture ou le logement. Pour Thierry Deslauriers, "la vie spirituelle est aussi essentielle que manger et avoir un toit, on en peut pas nier cette dimension, il faut vraiment y être attentif". C’est important selon lui "d’avoir une attention aussi à la vie spirituelle" des personnes en situation de pauvreté. Quand des hommes et des femmes fuient leur pays, "ce qu’ils gardent avec eux, c’est leur patrimoine culturel et spirituel" souligne Thierry Deslauriers. Pour beaucoup de migrants "c’est ça qui les fait tenir".
Les questions existentielles ne s’arrêtent pas quand on vit à la rue. "Contrairement à ce qu’on pense, ce n’est pas parce qu’on est dans la pauvreté et dans un très grand dénuement que notre esprit ne continue pas à se poser ces questions." L’association Aux captifs, la libération propose parfois de faire partie de groupes de partage de la parole de Dieu ou invitent à venir prier dans l’église du quartier. "Il y en a qui refusent mais le fait qu’on leur propose, ils se sentent honoré : tu reconnais que j’ai une capacité de vie spirituelle."
L’association Aux captifs, la libération doit son nom à ce passage de l’évangile de Luc qui décrit Jésus prêchant dans la synagogue de Nazareth. "On lui remit le livre du prophète Isaïe. Il ouvrit le livre et trouva le passage où il est écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération." (Lc 4, 17-19) "Cette annonce aux plus pauvres de la Bonne Nouvelle elle est première, c’est le signe messianique, commente Thierry Deslauriers. Dans la vision des Captifs, si on veut annoncer Jésus Christ au monde, on commence forcément par les plus pauvres."
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