Une pensée hyper créative, une foi indestructible en l'homme, une écoute impérieuse du vivant, Maurice Bellet (1923-2018) est l’un des théologiens français qui a le plus renouvelé la spiritualité chrétienne au XXe siècle. Son œuvre, une soixantaine de livres, continue de nourrir ceux qui le lisent. Dans "Le Dieu pervers" (1979), il déconstruisait l’image d'un Dieu sadique ennemi de l'homme. Hommage à un prêtre inclassable avec Myriam Tonus, auteure de l'ouvrage "Ouvrir l'espace du christianisme" (éd. Albin Michel, 2019).
C'est à Maurice Bellet que l'on doit l'expression souvent reprise de "Dieu pervers" d'après le titre de l'un de ses ouvrages les plus connus (1979). Un texte célèbre où il déconstruit l’image d'un Dieu sadique qui devient l'ennemi de l'homme. Observateur du monde et des ses métamorphoses, le théologien a su aussi pointer les dangers encourus dans une société technicienne et marchande où l’homme est réduit à l’état d’objet.
La mère de Maurice Bellet "rêvait d'avoir un fils prêtre", raconte Myriam Tonus. "Elle a tout fait pour qu'il devienne un enfant pieux et scrupuleux !" Selon ses propres mots, Maurice Bellet deviendra "maladivement scrupuleux". Il s'est donc préparé à devenir prêtre mais durant sa formation il a "beaucoup souffert" : pour la théologienne, il y a de quoi en effet être "abasourdi, terrifié" quand on découvre "la tristesse, la vision noire de la foi" telle qu'elle était enseignée.
À 40 ans, Maurice Bellet, un grand anxieux, a vécu une profonde crise existentielle. À tel point que l'un de ses supérieurs lui ont donné l'ordre de suivre une psychanalyse. Ainsi qu'il le dira lui-même, cela allait changer toute sa vie et le cours de sa théologie. "L'expérience de la psychanalyse lui a ouvert un espace dont il ne savait même pas que ça pouvait exister." Le prêtre a découvert alors "une parole qu'il n'a jamais pu dire" et que jusque-là "il ne connaissait pas", celle de l'inconscient. Ce qui a également bouleversé le théologien c'est de trouver en face de lui un homme qui l'écoute, qui ne le juge pas, et dont la mission est de l'aider à accoucher de cette parole.
Tout en restant prêtre, Maurice Bellet s'est mis à recevoir et à écouter ceux qui venaient le trouver. "S'est imposée à lui cette expérience que, dans le fond, on parle toujours de la parole de Dieu, non pas des mots de Dieu, et que si c'est une parole, elle transforme, on l'écoute, on ne passe pas son temps à la lire, à la commenter, à glauser, etc."
Maurice Bellet avait coutume de dire que l'on on pose tout le temps des questions à Dieu, mais qu'il nous pose question ! Pour lui, la première disposition à avoir est de se mettre à l'écoute de Dieu. Il commençait d'ailleurs ses temps de prière par cette invocation de Samuel : "Parle, ton serviteur écoute". "La parole de Maurice Bellet n'est pas une parole sur les Évangiles, sur le Christ, sur le Père ou la Trinité, c'est une parole qui se laisse interroger."
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