Il y a plus de 800 ans, à l'époque des Croisades, François d'Assise et le sultan d'Égypte sultan Al-Malik al-Kamil se rencontraient.
À la fin de chaque mois de septemebre, on commémore une rencontre dont on sait finalement peu de choses. En 1219, à Damiette (Égypte), François d'Assise (v. 1181-1226) rencontrait le sultan d'Égypte. De ce que se sont dit les protagonistes, nul verbatim, pas même un résumé de la teneur de leurs échanges, seulement un récit hagiographique donc délibérément élogieux de saint Bonaventure... qui n’a pas assisté à l’épisode puisqu’il était à peine né en 1219 ! Pourquoi donc commémorer cet événement ? Quelle importance lui donner ?
Le contexte de l’époque est celui des Croisades. "Ce temps qui va durer plus de deux siècles, où ce que l'on appelle la chrétienté et le monde musulman sont en conflit", rappelle Christian Delorme. Pour ce prêtre spécialiste du dialogue islamo-chrétien, initiateur en 1983 de la Marche pour l'égalité et contre le racisme (aussi appelée Marche des beurs), on n'est pas là dans le dialogue interreligieux : "François ne va pas dialoguer, il va à Damiette à avec l'idée de convertir le sultan, parce qu'à l'époque c'est la logique, bien sûr."
800 plus tard, pourquoi une telle postérité ? C'est l'attitude de François qui a touché le sultan, qui a décidé de le laisser repartir sans le torturer ou le condamner à mort - des pratiques que l'on a pu retrouver aussi bien du côté des chrétiens. Saint François d'Assise a eu "l'intuition de la non-violence évangélique" et c'est là, pour le Père Delorme, que se trouve "le grand message de François et de cette rencontre" : qu'il existe d'autres solutions que la guerre.
"Malgré ces conflits, on se rend compte que des hommes de foi bien inspirés sont capables d'établir un contact, si ce n'est un dialogue." Le sultan Al-Malik al-Kamil (v.1177-1238) dont le nom signifie "souverain parfait", était "reconnu pour sa capacité d'écoute", comme l'explique Jean Abd Al-Wadoud Gouraud.
Il précise que les coptes étaient alors déjà présents en Égypte et que "pour les musulmans de l'époque, la rencontre avec l'autre et avec les chrétiens était quelque chose d'acquis et déjà en œuvre" : ce pourquoi il décrit "une ambiance et une atmosphère" qui "a favorisé une "capacité d'écoute et de reconnaissance mutuelle". Et s'il formellement il n'y a pas eu de conversion, "il y a eu une conversion du cœur pour l'un comme pour l'autre."
Ce que peut nous inspirer cette rencontre aujourd'hui, c'est l'idée d'une conversion du cœur. "Ce juste milieu entre rester qui on est et aller vers l'autre : une ligne de crête entre identité et altérité", selon les mots de Gustave, membre du mouvement Coexister.
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