"Pour vous qui suis-je ?" C'est une question étonnante que pose Jésus à ses disciples dans l’Évangile de ce dimanche. Une question qu'il nous pose aussi à nous, aujourd'hui. Et contrairement aux disciples, on peut se sentir libres de lui dire : "Je ne sais pas qui tu es, dis-moi qui tu es..." Explications de Sœur Anne Lécu, religieuse dominicaine, et médecin en milieu carcéral.
Évangile du dimanche 15 septembre (Mc 8, 27-35)
Jésus s’en alla, ainsi que ses disciples, vers les villages situés aux environs de Césarée-de-Philippe. Chemin faisant, il interrogeait ses disciples : « Au dire des gens, qui suis-je ? » Ils lui répondirent : « Jean le Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres, un des prophètes. »
Et lui les interrogeait : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Pierre, prenant la parole, lui dit : « Tu es le Christ. » Alors, il leur défendit vivement de parler de lui à personne. Il commença à leur enseigner qu’il fallait que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, trois jours après, il ressuscite. Jésus disait cette parole ouvertement. Pierre, le prenant à part, se mit à lui faire de vifs reproches. Mais Jésus se retourna et, voyant ses disciples, il interpella vivement Pierre : « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. »
Appelant la foule avec ses disciples, il leur dit : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. Car celui qui veut sauver sa vie la perdra ; mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Évangile la sauvera.
Source : AELF
Les Évangiles ont été écrits longtemps après la mort de Jésus par des personnes qui croient que le Christ est ressuscité après avoir été crucifié. Par conséquent, il est essentiel de bien avoir en tête que ce sont "des récits théologiques, pas seulement historiques", rappelle Anne Lécu. Les auteurs relatent donc des faits en leur donnant un sens particulier.
Quand il est dit que Jésus marche avec les siens, on peut voir dans cette simple information le fait que le Christ est avec nous. Anne Lécu nous enjoint en effet à "habiter le texte" et à nous sentir au plus près du terrain, de ce qui est décrit. Ainsi, "nous pouvons imaginer que nous sommes avec lui sur ces chemins où il marche, discute et converse avec ses disciples".
Aujourd'hui encore on a le droit de dire à Jésus : "Je ne sais pas qui tu es"
"Pour vous qui suis-je ?" Cette question que pose Jésus est assez étonnante, finalement. On n’irait pas la poser de cette façon à nos amis ! Jésus veut-il savoir ce que l’on pense de lui ? Souhaite-t-il que les disciples se positionnent ?
Quand les disciples répondent : "Jean le Baptiste" ou "Élie" ils répondent avec des références qu'ils connaissent déjà, "avec des catégories du passé". Et justement, Jésus va essayer de les déplacer. "Il s’en fiche de ce qu’on pense de lui, considère Anne Lécu, il veut que nous soyons authentiques dans notre manière de le chercher."
Sans doute, Jésus aurait-il préféré que les disciples disent Je ne sais pas qui tu es... "Aujourd'hui encore on a le droit de dire à Jésus : Je ne sais pas qui tu es." Et finalement, lui répondre cela c'est tout de suite après lui demander : "Montre moi qui tu es." Cette question de Jésus "provoque une prière". Elle nous est aussi adressée : pour nous qui est cet homme ?
Peu de nos contemporains connaissent les Évangiles. Ils n'y sont pas hostiles mais ils n'ont plus d'occasion d'y avoir accès. C'est partant de ce constat que, avec l'éclairage d'un bibliste, Béatrice Soltner propose chaque semaine un texte d'Évangile pour qu'il soit entendu (ou réentendu), pour en savourer la nouveauté et faire l'expérience que - si incroyable que ce soit à l'heure de l'instantanéité - cette parole écrite il y a plus de 2.000 ans nous rejoint toujours au plus profond.
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