Quand on parle d’abbayes en Belgique, celle de Chimay est l’une des premières qui vient à l’esprit. À quelques kilomètres de l’abbaye de Scourmont se trouve celle de Notre Dame de la Paix où vivent les sœurs trappistines. Moins connues que leurs voisins, elles sont pourtant installées près du centre de Chimay depuis un peu plus d’un siècle. Pour nous parler de cette communauté, qui d’autre que la mère supérieure, sœur Catherine ?
C’est une dame d’un certain âge qui nous accueille dans une des petites salles à l’entrée de l’abbaye. Elle est vêtue de l’habit traditionnel des trappistes : une tunique blanche et un scapulaire noir. Son voile, noir également, laisse dépasser ses cheveux grisonnants. Son sourire est contagieux. Elle nous invite à l’appeler par son prénom, si nous le souhaitons.
Son rôle en tant que mère supérieure, elle le voit comme celui de transmettre la vie à ses moniales, “de les diriger et de les conduire vers le Seigneur.” La première piqûre de rappel qu’elle nous fait est que les monastères sont plus anciens que le christianisme. “Il y a toujours eu des gens qui ont été passionnés par une forme de vie qui coupe avec les habitudes du monde et qui se sont dirigées pour ne vivre que pour Dieu,” nous dit-elle avec le sourire. Elle fait référence aux premiers ermites qui vivaient seuls uniquement pour Dieu.
Aujourd’hui d’un âge avancé, elle se rappelle avec joie comment sa vocation lui est venue. C’est à l’âge de cinq ans que sa mère l’inscrit à l’école, chez les sœurs. C’est leur amour pour Dieu qui la touche particulièrement et lui fait dire que, plus tard, elle aussi entrera dans les ordres. Cette envie ne la quittera pas tout au long de son enfance et de son adolescence. Au contraire, c’est ce qui lui a permis de traverser les orages de la vie.
À 23 ans, elle termine ses études d’infirmière et entre enfin à l’abbaye de Soleilmont. Elle y restera pendant 25 ans avant d’être envoyée à Bordeaux afin de venir en aide à une autre communauté. Elle revient en Belgique au bout de huit ans pour y être de nouveau envoyée en mission, à Rome, à la maison Generali, cette fois. Après un dernier retour à Soleilmont, elle sera finalement envoyée à Chimay pour accompagner les sœurs vieillissantes vers la fin de la communauté.
Elle arrive en 2011 parce que Sœur Rose, qui était alors la mère supérieure, a atteint la limite d’âge et doit remettre le flambeau. Sœur Rose est aujourd’hui âgée de 93 ans et n’est plus très active. Mais en treize ans, les quatre autres religieuses, sous la responsabilité de Sœur Catherine, ont redonné vie à cette communauté.
Les missions de Sœur Catherine à Bordeaux et à Chimay ont le même but : accompagner les sœurs vers la fin de leur communauté. Cependant, cela ne s’est pas encore produit. "Je suis venue avec toute ma vitalité, tout mon potentiel, mon dynamisme pour relancer cette communauté qui était plutôt mourante", nous raconte-t-elle.
Mais une ancienne infirmière ne se résout pas facilement à donner la mort, pas même à une communauté. On est toujours porté par la vie. Il y a treize ans que je suis à Chimay, c'est toujours ça de pris. Et ce n'est pas encore demain qu'on va fermer. Peut-être après-demain, mais quand je serai morte et que je n'aurai plus mes yeux ouverts pour voir ce qu'on fait et pouvoir dire mon mot,
, ajoute-t-elle en riant.
Malgré les décès survenus dans la communauté depuis 2011, les sœurs sont toujours au nombre de cinq. Et pour causes, de nouvelles vocations se sont créées et de nouvelles sœurs ont rejoint leur rang. Pour susciter des vocations, Sœur Catherine ne voit qu’une chose : communiquer aux jeunes qui entrent sa passion pour Jésus. “On ne vit que pour lui”, nous dit-elle.
D’ailleurs pourquoi entrer dans les ordres si ce n’est par amour pour Jésus ? Selon la mère supérieure, “on n’entre pour rien. Et si par malheur, on entre pour quelque chose et qu'il n'y a pas un mouvement de conversion en cours de formation, c'est l'échec complet.” Elle nous propose alors une analogie : une maman serait bien incapable de dire pourquoi elle aime son enfant, elle aime un point c’est tout. “On aime gratuitement,” ajoute-t-elle alors que son amour pour le Christ fait briller son regard. “Plus rien n’a d’importance, seul compte Jésus.”
On aime gratuitement
Comme dans la plupart des abbayes encore en activité chez nous, l’abbaye de Notre-Dame de la Paix a en son sein une petite boutique. On y retrouve évidemment les produits d’autres abbayes comme la bière de Chimay, par exemple, mais les sœurs ont également leur propre production. D’ailleurs, si vous demandez son avis à la maîtresse des lieux, elle vous dira que leurs “biscuits sont bien meilleurs que la bière.”
Au-delà des biscuits, les sœurs ont également un atelier de couture où elles confectionnent des ornements liturgiques. Mais ce sont bien ces fameux délices sucrés, qu’elle nous offre avec une tasse de café avant de nous inviter à suivre l’office de sexte avec la communauté.
Nous quittons Mère Catherine après la prière, mais non sans être passés par leur boutique, nous approvisionner en biscuits aux amandes et autres de leurs “douceurs de bouche”.
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !