On la fête le 5 septembre. Mère Teresa a été béatifiée il y a 20 ans, le 19 octobre 2003. Qui ne connaît pas les photos de cette toute petite femme vêtue d’un sari blanc bordé de bleu, tenant la main d’un mourant ou serrant un bébé chétif contre sa poitrine ? Elle était et elle demeure l’image absolue de la charité et de la compassion. Pourtant, des voix dissonantes ont souligné d’autres aspects moins admirables de son œuvre. Sans "déboulonner la statue", on peut souligner les paradoxes de Mère Teresa.
Mère Teresa a été béatifiée six ans après sa mort, le 19 octobre 2003 par le pape Jean Paul II puis canonisée le 4 septembre 2016 par le pape François, sous le nom de sainte Teresa de Calcutta. Pour beaucoup, elle incarne le don de soi et la compassion portés à son plus haut degré. Pourtant des voies dissonantes se font entendre à son sujet et celui de l'héritage qu'elle laisse.
Les Missionnaires de la Charité sont présentes partout dans le monde, dans tous les enfers du monde
Jusqu'à ses 40 ans, elle est restée au sein de la congrégation de Notre-Dame de Lorette, "une religieuse parmi d’autres". Un jour, alors qu'elle était dans un train vers Darjeeling, Sœur Mary Teresa a reçu "un appel dans l’appel". Elle s’est sentie appelée à "devenir Indienne parmi les Indiens, à tout laisser à nouveau pour aller s’inculturer : c’est là où elle est originale", estime Guillemette de La Borie, auteure de "Petite vie de Mère Teresa" (éd. Desclée de Brouwer, 2003).
Mère Teresa a fondé la congrégation des Missionnaires de la Charité en 1950. Congrégation qui compte aujourd’hui près de 4.500 religieuses et 700 foyers dans 136 pays. (Congrégation à ne pas confondre avec celle des Filles de la Charité, fondée à Paris par saint Vincent de Paul au XVIIe siècle.) Les religieuses au sari bleu et blanc ont un charisme : la compassion. Elles accueillent dans leurs maisons les laissés-pour-compte et les malades incurables pour leur redonner une dignité. Elles vivent elles-mêmes dans un dénuement extrême.
"Les Missionnaires de la Charité sont présentes partout dans le monde, dans tous les enfers du monde, confirme le journaliste Frédéric Mounier, avec les plus pauvres, avec les gens dont vraiment plus personne ne peut ni ne veut s’occuper." Mgr Benoît Rivière, qui a rencontré Mère Teresa en France, dans les années 80, décrit sa spiritualité très particulière. "Ce choix de s’effacer par amour de toute espèce de réussite mondaine, un choix radical il faut bien le dire, de vivre complètement au contact avec les personnes de la rue." L'évêque tient à souligner "la joie" qui "caractérise les Missionnaires de la Charité, la joie d’un total dénuement, pour être une simple présence… avec une règle extrêmement simple et très exigeante".
Dès l’annonce de sa béatification, et même avant, des voix se sont élevées, très critiques à l’égard de Mère Teresa et de son œuvre. Il y a eu le livre sans concession du journaliste britannique Christopher Hitchens, en 1995. Et plus tard, en mars 2013, un groupe de chercheurs québécois a dénoncé une "sainteté médiatique", dans un article de la revue Studies in Religion / Sciences Religieuses et mis en cause l’usage des dons reçus par la congrégation. Des dons importants alors que les sœurs vivaient dans un très grand dénuement, voire une rudesse extrême.
Un reproche en particulier était adressé aux Missionnaires de la Charité, "c’est qu’elles ne soignent pas", note Frédéric Mounier. "Elles accueillent les plus pauvres, elles les entourent de tendresse, de miséricorde, de compassion et ça c’est tout à fait remarquable ! Mais il manque une dimension thérapeutique, une dimension de soin." C’est d’ailleurs "un reproche qui leur est fait assez régulièrement, notamment par les autres acteurs de la vie de la solidarité que ce soit en Inde ou ailleurs".
En tant que journaliste, Frédéric Mounier regrette de son côté de n’avoir pas pu approcher les religieuses. "Il est très difficile pour nous autres journalistes de communiquer avec les sœurs de Mère Teresa. C’est vraiment dommage que ces communautés soient fermées à ce point-là et qu’elles ne soient pas plus ouvertes à l’extérieur. Que ce soit pour le soin véritable des plus pauvres, et non pas uniquement le soin de leur âme, ou que ce soit pour travailler en lien avec les structures de santé locales. Je pense que là, il y a des points à travailler..."
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