Un nom mythique, des plages paradisiaques... À Tahiti et Bora-Bora la communauté catholique s'adapte au manque de prêtres et à l'isolement géographique. Reportage.
"Polynésie française" : existe-t-il nom plus associé au paradis sur terre ? À 18.000 km de la métropole, il faut 24 heures de vol depuis Paris pour rejoindre cet ensemble d'archipels de l'océan Pacifique. Sur les 118 îles, dont la plus grande est Tahiti, 76 sont habitées. Et comme en témoignent ceux qui y vivent, l'isolement se ressent.
REPORTAGE RÉALISÉ EN PARTENARIAT AVEC L'AIDE À L'ÉGLISE EN DÉTRESSE (AED) - RCF avec l'AED vous propose de découvrir la vie des chrétiens dans deux archipels de la Polynésie, celui de la Société et celui des Marquises, dans un reportage en cinq épisodes. Œuvre internationale dont la mission est d'aider les chrétiens menacés, l'AED finance plus de 5.000 projets par an à la demande des évêques de 150 pays.
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©Thierry Lyonnet / RCF - "Bora-Bora c'est un mythe, ça évoque la mer, le soleil, les vacances, le tourisme de luxe..."
"Nous sommes dans un endroit peut-être le plus mythique du monde." Le Père Dominique Vallon est curé de Bora-Bora, l'une des îles Sous-le-Vent. "Bora-Bora c'est un mythe, ça évoque la mer, le soleil, les vacances, le tourisme de luxe... Les Américains ne connaissent presque que Bora-Bora et pas Tahiti ni la réalité de la Polynésie française".
Prêtre "Fidei donum", envoyé par l'archidiocèse d'Avignon, le Père Vallon est aussi le curé de trois autres îles : Raiatea, Tahaa et Maupiti, "chacune très différente". À Bora-Bora, une île très marquée par le tourisme, il y a les yachts et les hôtels de luxe - "le commerce fonctionne bien" et nombreux sont ceux qui vivent du tourisme, mais "il y a aussi des gens qui vivent très simplement" de la pêche ou de l'agriculture.
©Thierry Lyonnet / RCF - À Bora-Bora, la mairie met un bus à la disposition des Églises
À Bora-Bora, il y a plus de protestants que de catholiques, car les Anglais ont occupé l'île avant les Français. Gaston Tong Sang, son maire, est impliqué dans le dialogue œcuménique, il a même organisé des veillées œcuméniques. C'est que le régime des cultes en Polynésie française n'est pas le même qu'en métropole et la séparation de l'Église et de l'État est moins nette. "Ici en Polynésie, je pense qu'on nous a donné cette possibilité de vivre avec les Églises, pour moi c'est important parce qu'on ne peut pas séparer le corps et l'âme, il faut alimenter les deux : le corps c'est mon métier et l'âme c'est le travail des pasteurs, des prêtres, des Églises et c'est important qu'on soit sur la même longueur d'onde."
©Thierry Lyonnet / RCF - Gaston Tong Sang, maire de Bora-Bora
La première réalité à laquelle on est confronté dans ces îles, c'est l'isolement. Qui se vit de manière concrète par un coût de la vie élevé. "Ce qui arrive ici est immédiatement taxé pour pouvoir financer le transport des denrées, ce qui fait que la vie est chère ici", explique Mgr Jean-Pierre Cottanceau, archevêque de Papeete. L'isolement, c'est aussi une réalité que vivent les familles : sur certaines îles, c'est dès 10 ou 11 ans que leur enfant doit partir étudier ailleurs.
Qui dit éloignement géographique dit aussi isolement culturel. Là où en métropole "les invasions", "les guerres" ou "les migrations" influencent et renouvellent les cultures, les pensées et les modes de vie, sur un archipel en plein océan Pacifique c'est bien plus la tradition que l'on perpétue. Par certains côtés cela représente une forme de "handicap", selon Mgr Jean-Pierre Cottanceau.
©Thierry Lyonnet / RCF - Les paroissiennes de Bora-Bora accueillent les visiteurs
L'archidiocièse de Papeete compte 24 prêtres pour un territoire de 4 millions de km². Tous vivent sur l'île de Tahiti, sauf deux, l'un aux Îles Sous-le-Vent, l'autre à Moorea. Toutes les autres îles n'ont pas de prêtre sur place. "Ce sont les prêtres de Tahiti, qui, en plus de leur paroisse sur l'île de Tahiti, ont la responsabilité d'un secteur, qu'ils visitent trois à cinq fois dans l'année." En général quand ils se rendent sur une île où il n'y a pas de prêtre, la première chose que demandent les fidèles c'est la confession, explique Mgr Cottanceau.
L'Église de Polynésie s'appuie sur l'aide des katekita, des laïcs formés pour être responsables de la communauté en l'absence de prêtre. Prière, accompagnement des mourants, baptêmes en cas d'urgence... le katekita peut aussi avoir pour mission de distribuer la communion. "Quand on est katekita, la charge est lourde", témoigne Rino Moétaua. Il a un métier, une famille, et occupe ses vacances et ses week-end au service de l'Église catholique. "Je pense que c'est un appel du Seigneur."
©Thierry Lyonnet / RCF - Rino Moétaua est katekita
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