Il y a plusieurs exemples dans l’histoire d’assassinats d’évêques dans une église au cours d’une liturgie. Tout le monde se souvient du cas de saint Oscar Romero assassiné pendant qu’il célébrait l’eucharistie. Aujourd’hui, le 29 décembre, l’Église universelle célèbre un autre évêque, mort martyr dans sa propre cathédrale : saint Thomas Becket qui est vénéré tant par l’Église catholique que par l’Église anglicane.
Il y a une indétermination sur l’année de naissance de Thomas Becket. Ce serait soit 1118 soit 1120. Une chose est sûre : il est né à Londres le jour de la saint Thomas, de parents marchands originaires de Normandie. Thomas étudie à l’école-cathédrale de Cantorbéry puis à la prestigieuse université de Bologne. De retour en Angleterre, sa valeur ne passe pas inaperçue.
Thibaut du Bec, l’archevêque de Cantorbéry, le remarque et se met à l’apprécier vivement. Il le nomme archidiacre de Cantorbéry et prévôt de Beverley. Il le charge de missions de représentation importantes dans lesquelles il réussit excellement. Lorsque le poste de chancelier d’Angleterre devient vacant, Thibaut conseille au roi Henri II Plantagenêt de nommer Thomas Becket à ce poste. C’est chose faite le 11 janvier 1155.
Une grande amitié se noue entre le roi et Thomas Becket qui devient, par exemple, le précepteur du prince héritier, Henri le jeune qui vient s’installer chez son maître selon les coutumes du temps. Henri II compte sur Thomas et sur l’amitié qui les lie pour mettre l’Église sous son pouvoir et se débarrasser des privilèges dont jouissent les clercs. Thomas semble disposé à rendre ce service.
Lorsque le 18 avril 1161, l’archevêque Thibaut du Bec meurt, le roi propose voire impose au chapitre de la cathédrale Thomas Becket comme successeur. Thomas est élu en mai 1162 et consacré le 3 juin.
À partir de ce moment, s’opère un changement radical dans la vie et la personne de Thomas Becket. Il n’est plus le courtisan attiré par les plaisirs de la cour. Il devient un prélat entièrement dédié à Dieu, vivant dans l’ascèse, pratiquant les mortifications, s’occupant des pauvres. En même temps, il devient un fervent défenseur de l’indépendance et de la liberté de l’Église face au pouvoir royal. D’ami du roi qu’il était, Thomas devient son principal opposant.
À son arrivée comme archevêque de Cantorbéry, Thomas prend position pour le pape Alexandre III. Il entend aussi obtenir l’exemption complète de l’Église de toute juridiction civile pour n’obéir qu’au droit canon. Il veut aussi assurer la sécurité des propriétés de l’Église.
Une première réunion à Westminster, le 11 octobre 1163, où le roi fait pression pour que tous les citoyens, y compris les clercs, soient égaux devant la loi du royaume. Beaucoup d’évêques acceptent, mais Thomas refuse. Le roi est obligé d’adopter un compromis.
Une deuxième assemblée se tient à Clarendon le 30 janvier 1164. Thomas refuse de signer les propositions d’accords. La guerre devient ouverte entre lui et le roi.
Le roi essaie de réduire Thomas au silence en l’accusant de contestation de l’autorité royale en le faisant comparaître devant le grand conseil mais l’archevêque de Cantorbéry refuse de se soumettre à cette juridiction.
Thomas est obligé de partir en exil. Il va en France, rejoindre le pape Alexandre III qui le soutient au début. Pendant ce temps, Henri II fait adopter des mesures vexatoires contre Thomas et ses partisans en Angleterre. Il le fait poursuivre en France, et Thomas doit changer plusieurs fois de résidence pour échapper à ses poursuivants.
De son côté, Thomas demande au pape d’excommunier Henri II, mais Alexandre III hésite car il a besoin de la neutralité de l’Angleterre dans son conflit avec l’empereur Frédéric Ier. Néanmoins, la menace d’excommunication finit par porter ses fruits, et Henri II arrive à un accord avec Thomas Becket qui permet à ce dernier de revenir en Angleterre le 3 décembre 1170. Mais la situation reste tendue… Becket sait qu’en Angleterre, sa vie est en danger.
Certains disent que ce serait une phrase du monarque excédé qui ce serait écrié :
N'y aura-t-il personne pour me débarrasser de ce prêtre turbulent ?
Toujours est-il que 4 chevaliers anglo-normands bien identifiés décident de passer à l’acte. Il s’agit de Reginald Fitzurse, Hugues de Morville, Guillaume de Tracy et Richard le Breton. Le 29 décembre 1170, moins d’un mois après le retour de l’archevêque, les 4 hommes pénètrent armés dans la cathédrale. Ils trouvent l’archevêque en prière. Ils accusent Thomas qui sentant sa dernière heure venue demande que ses compagnons soient épargnés. Reginald Fitzurse le frappe alors à la tête avec son épée, et les 3 autres s’acharnent avec lui sur l’archevêque sous les yeux des prêtres et des diacres présents. C’est un meurtre en bonne et due forme.
Le roi est averti. Il est obligé de faire pénitence publique pour cet assassinat et de faire machine arrière avec ses décrets pour asservir l’Église.
Immédiatement après sa mort, le peuple vénère Thomas Becket comme saint et martyr. Il est canonisé comme tel moins de 3 ans après sa mort par le pape Alexandre III.
Pour la petite histoire, le roi Henri VIII a procédé à la « décanonisation » de Thomas Becket dont l’exemple le gênait. Il savait pourtant qu’on ne peut pas sortir quelqu’un qui est au ciel. Rassurez-vous : une fois qu’on arrive au ciel, c’est pour l’éternité… et c’est là que nous rencontrerons saint Thomas Becket lorsque nous y arriverons… en tout cas, c’est ce que j’espère pour chacun de vous.
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