Un festival d'écriture chrétienne unit théologie et poésie à Strasbourg

RCF Alsace : Francine Carrillo, vous êtes poétesse, vous vivez en Suisse et vous venez de publier un livre de poésie qui s'appelle Filigranes aux éditions Labor et Fides et vous intervenez à Strasbourg le 14 mars dans le cadre du festival Poètes qui porte sur le thème de la grâce.

Comment ce thème de la grâce vous inspire?

Francine Carillo :  Si je devais dire ce qui est pour moi la grâce, je dirais qu' il peut arriver que dans nos existences nous sommes traversés par une altérité absolue qui vient au fond déceler notre regard, qui vient le bousculer et nous ouvrir à quelque chose de totalement inattendu. Au fond, j'associerai la grâce pour moi à une sorte d'aile d'ange qui vient fissurer nos nuits et qui vient déposer sur notre fatigue d'être là, la fraîcheur d'un peut être.

RCF Alsace : Vous avez été pasteur pendant 30 ans à Genève. Vous êtes aussi théologienne. Comment êtes-vous arrivée à la poésie alors?

Francine Carillo : La poésie est en quelque sorte venue à mon secours, si je puis dire. Parce que j''ai toujours eu beaucoup de peine à endosser le langage liturgique de nos églises. J'ai toujours eu le désir de le retravailler, parce que c'est quelquefois une parole qui est un peu fatiguée je trouve. C'est à dire ce sont des mots qui ont de la peine à parler encore. Mon travail a été de donner à laver tous ces mots qui ont de la difficulté à être parlants pour nous aujourd'hui et puis de leur rendre une certaine fraîcheur. Et ce travail, j'ai pu le faire, je crois, à travers un travail poétique.

RCF Alsace : Dans votre recueil Filigranes, il y a la notion de palimpseste, c'est à dire l'ajout, l'addition de différents textes les uns sur les autres. Derrière, il y a aussi la notion de dialogue. Votre travail de poète, c'est de montrer que ces deux textes qui se superposent ou ces trois textes en fait, dialoguent entre eux. Est ce que c'est juste de parler ainsi de dialogue ?

Francine Carillo : Dans la poésie biblique le dialogue, la rencontre est au centre de la saga biblique. Ce que j'ai essayé de mettre en évidence, c'est que les textes bibliques, nous parlent d'un appel qui est fait à l'humain par la transcendance, par le divin et un appel auquel nous avons à répondre. Eh bien, cette idée de dialogue est au fond beaucoup plus que simplement se laisser porter par  la trame des jours. Mais c'est répondre, répondre à un appel, à une adresse qui nous est faite et répondre de nos vies.

RCF Alsace : Comment la théologie inspire votre poésie et inversement ?

Francine Carillo : Alors je crois que c'est totalement lié. Je ne peux pas faire l'économie de ce mystère, de ce  nom imprononçable qui est celui du divin dans le Premier Testament, ces quatre lettres imprononçables qui au fond constituent une sorte de trou dans le langage. Il faut nous appeler précisément à questionner, à interroger nos lectures quelquefois un peu trop paresseuses, et que ce divin là, qui transparaît  à travers l'écriture biblique, nous donne à parler et nous donne à composer, recomposer le monde aujourd'hui. Dieu sait si nous avons besoin de retisser notre humanité. Pour moi, cette recherche là est un indissociable. 

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