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Le deuil en poésie

RCF,  - Modifié le 17 juillet 2023
Et si le langage poétique pouvait accompagner un deuil? En ce Jour des Défunts, les invités de Stéphanie Gallet sont deux poètes. Tous deux ont dû faire face à la mort d'un proche.
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Et si le langage poétique pouvait accompagner un deuil? En ce Jour des Défunts, les invités de Stéphanie Gallet sont deux poètes. Tous deux ont dû faire face à la mort d'un proche. Avec "Comme si dormir", Laurence Bouvet le jour de la mort de sa mère - un dimanche soir - et ceux qui ont suivi. Pour cette phsychologue de formation, les mots et le langage sont au cœur de sa façon d'être au monde. L'auteur de "Où nos ombres s’épousent", Stéphane Bataillon, a perdu sa femme à l'âge de 30 ans. "Je t’avais promis / une caresse chaque soir / désormais, ce sera un poème", écrit-il. Dans ses textes, il parle de ce lien subtil qui continue à exister entre eux.

Quels mots pour dire la peine? La séparation? Le vide? Pour conserver vivant le souvenir de ceux qui ne sont plus? La poésie et les poètes côtoient l’indicible, le mystère, les palpitations intérieures. Parce qu'ils parlent au cœur et à l'âme ils sont accessibles à tous et aident à rester en vie, à appréhender la mort avec justesse.
 

Ce que c'est que la mort, de Victor Hugo

Ne dites pas : mourir ; dites : naître. Croyez.
On voit ce que je vois et ce que vous voyez ;
On est l'homme mauvais que je suis, que vous êtes ;
On se rue aux plaisirs, aux tourbillons, aux fêtes ;
On tâche d'oublier le bas, la fin, l'écueil,
La sombre égalité du mal et du cercueil ;
Quoique le plus petit vaille le plus prospère ;
Car tous les hommes sont les fils du même père ;
Ils sont la même larme et sortent du même oeil.
On vit, usant ses jours à se remplir d'orgueil ;
On marche, on court, on rêve, on souffre, on penche, on tombe,
On monte. Quelle est donc cette aube ? C'est la tombe.
Où suis-je ? Dans la mort. Viens ! Un vent inconnu
Vous jette au seuil des cieux. On tremble ; on se voit nu,
Impur, hideux, noué des mille noeuds funèbres
De ses torts, de ses maux honteux, de ses ténèbres ;
Et soudain on entend quelqu'un dans l'infini
Qui chante, et par quelqu'un on sent qu'on est béni,
Sans voir la main d'où tombe à notre âme méchante
L'amour, et sans savoir quelle est la voix qui chante.
On arrive homme, deuil, glaçon, neige ; on se sent
Fondre et vivre ; et, d'extase et d'azur s'emplissant,
Tout notre être frémit de la défaite étrange
Du monstre qui devient dans la lumière un ange.

Les Contemplations, 1854

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