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« Dix-sept ans » d’Eric Fottorino
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« Dix-sept ans » d’Eric Fottorino

RCF,  -  Modifié le 13 septembre 2018
Chaque jeudi Christophe Henning propose un conseil de lecture.

« Maman », c’est paraît-il le premier mot que nous arrivons à dire dans les premiers mois de notre existence. Il ne l’a jamais vraiment appelé Maman : quand il s’adresse à elle, c’est avec son prénom, Lina. C’est elle, cette mère mal connue, qui est au cœur de ce roman familial. Eric Fottorino ne cesse de revenir à ses origines : ses deux pères ont occupé ses précédents livres, le père adoptif qui, à l’âge de 10 ans, lui a donné un nom. Et le père naturel qui n’était déjà plus là à sa naissance. Lina, la mère, n’avait alors que dix-sept ans, d’où le titre du livre.

Elle va s’occuper du fils, mais il reste une fêlure. Difficile de s’apprivoiser, quand on grandit tout seul, indifférents, quand on est jeté dans l’existence : « Je cherchais le regard de Lina. Je venais de saisir l’origine de l’ombre à l’intérieur de ses yeux. L’ombre d’une petite fille perdue ». Après plus d’un demi-siècle, le fils remonte le temps, reconstitue la vie secrète d’une mère inconnue. On n’imagine pas le temps qu’il faut pour adopter ses parents…
 
Toute la famille y passe et les pères absents dont Fottorino hantent encore cette histoire. Le narrateur a besoin de savoir, il explore, il cherche : « quand on regarde devant soi, peut-on voir hier ? », s’interroge-t-il. La Charente, Bordeaux, Nice : le romancier comble les passages à vide et invente un passé. Parce que la mère reste sans voix : « Depuis toutes ces années, ne rien se dire a été notre mode unique de conversation ». Bien sûr, c’est une histoire douloureuse, mais le narrateur avance avec naïveté et un brin d’humour. Il rassemble les pièces d’un puzzle qui sera toujours incomplet. Il n’arrive pas à aimer sa mère et ne cesse pourtant de penser à elle… « Je t’aime moi non plus » dirait Gainsbourg…
 
Le narrateur est en mal de mère, mais il a besoin de la retrouver pour vivre, même à plus de 50 ans. « J’ai fait le plein d’insécurité », dit-il à un moment. Vous savez, ça fait penser à la psycho-généalogie qui soigne les blessures de nos ancêtres qui nous font mal aujourd’hui, passant d’une génération à la suivante. Un jour, il faut faire la lumière : « On n’a pas arrêté de se tromper sur maman », dit-il encore. L’écrivain a rendu son passé à la môme de dix-sept ans, le fils a enfin fait naître la mère.
 
Ca s’intitule « Dix-sept ans », le livre d’Eric Fottorino, chez Gallimard.

 

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