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Nanni Moretti
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Nanni Moretti

Un article rédigé par Fabien Genest Natio - RCF,  -  Modifié le 17 juillet 2023
Retrouvons à présent La Symphonie du cinéma avec cette semaine une émission qui est consacrée au réalisateur italien Nanni Moretti. Fabien Genest a profité de la sortie de son documentaire Santiago Italia pour revenir sur la carrière du cinéaste et de son cinéma très autobiographique et politique, auréolé de nombreux prix durant sa carrière.
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Le dernier film de Nanni Moretti n’est pas une fiction mais un documentaire qui explore une période trouble de l’histoire contemporaine de l’Amérique du Sud. Dans Santiago Italia, sorti mercredi au cinéma, le réalisateur de Mia Madre revient sur le rôle qu’a tenu l'ambassade Italienne à Santiago du Chili lors des mois qui ont suivi le coup d'Etat d’Augusto Pinochet en septembre 1973 mettant ainsi fin au régime démocratique de Salvador Allende.

 
Pour les besoins du sujet, le cinéaste italien a recherché de longs mois des documents d'époque et les témoins des pages les plus sombres de l’histoire contemporaine chilienne. Au milieu de ce chaos, l’histoire de l’ambassade italienne qui a permis de sauver la vie à des centaine d’opposants.
Cette semaine dans La Symphonie du cinéma, je vous propose d’explorer en musique le cinéma éminemment politique du Romain Nanni Moretti, le réalisateur du Caïman, d’Habemus Papam ou de
Je suis un autarcique (Io sono un autarchico), son premier film qui sort en 1976… et dont la musique en forme d’intermède burlesque est signée Franco Piersanti. 

 
Le thème sautillant de Je suis un autarcique, un film où il est question d’un metteur en scène mégalomaniaque voulant réaliser un projet de théâtre expérimental aux côtés d'une troupe non moins inspirée...  Un premier long métrage réalisé en Super 8 et gonflé en 16 mm. Dans ce film, Nanni Moretti porte un regard ironique sur le gauchisme et enchaînera l’année suivante avec Ecce Bombo, puis en 1981 avec Sogni d’oro. Deux films de jeunesse où le talent narratif de Moretti s’affirme déjà qui lui valent d’être remarqué et sélectionné, pour le premier, pour le festival de Cannes et  pour le second, pour la Mostra de Venise, où Sogni d’oro obtient le Grand Prix du jury.

Michele, un prénom récurrent chez Nanni Moretti, réalisateur acteur qui joue, dans Sogni d’oro, un metteur en scène encore. Ce réalisateur effectue une tournée de débats dans les universités, les écoles, et les instituts religieux avec sa dernière œuvre : un film sur les jeunes. À chaque réunion, il est taxé d'intellectualisme et on lui demande s'il pense pouvoir intéresser l'Italie profonde avec un tel film...

 
La très belle musique d’ambiance aux accents jazzy de Bianca, de Franco Piersanti, fidèle compagnon de Nanni Moretti. L’histoire d’un professeur perturbé, amoureux de Laura Morante, grande comédienne en Italie, et actrice récurrente de la galaxie moretienne, qui deux ans après Sogni d’oro retrouvait Nanni Moretti dans ce mélo qui porte un regard sarcastique sur sa génération, qui aborde avec difficulté les années 80. Michele, son anti héros, n’aspire qu’aux histoires d’amour qui finissent bien, mais ne peut s’empêcher d’anticiper le pire. Alors, quand il tombe amoureux de sa collègue Bianca, il préfère rompre avant de souffrir…  

 
L’année 1986 marque un tournant dans la carrière de Nanni Moretti. A 33 ans et après déjà dix ans de carrière, un autre pays que l’Italie consacre son talent en décernant à son nouveau film,
La Messe est finie, dont nous avons entendu le thème de La Valse du chocolat,  l’Ours d’argent du Grand Prix du jury au festival de Berlin. Cette fois, la bande originale et confiée à Nicola Piovani, déjà un grand compositeur de musiques de films en Italie pour Bellochio, les frères Taviani ou le Ginger et Fred, de Federico Fellini.   

 
Après avoir enfilé la soutane d’un curé dans la comédie La Messe est finie, voilà Nanni Moretti dans la peau d’un militant communiste devenu amnésique dans  Palombella rossa, qui sort en 1989. Là encore, Nicola Piovani signe la très belle bande originale avec notamment le titre principal que nous venons d'entendre. Cinq ans vont s’écouler ensuite avant de revoir Nanni Moretti. Au printemps 1994, Journal intime (Caro diario) est en compétition au festival de Cannes. Dans ce film autobiographique, le Romain évoque son cancer et ses longs mois de doute et de combat contre la maladie. Un film Ovni où Rome semble avoir été désertée, propice à de longues virées en solitaire à Vespa sous le soleil de la Ville éternelle. 

 
Il Campo di pallone, extrait de Journal intime. Ce film charnière dans la filmographie de Nanni Moretti, émouvant, éminemment personnel, à la limite du documentaire parfois, annonce déjà Aprile, qui sortira en 1998. Aprile et sa prise de conscience politique, comme dans Palombella Rossa où le personnage principal, qui est encore réalisateur, ne s'appelle pas Michele Apicilla, nom récurrent dans ses premiers films, mais où il est bien question de la vie publique italienne et de l'arrivée de Silvio Berlusconi au pouvoir. En même temps, ce mois d'avril qui fait référence au mois de la tenue des élections anticipées de 1996 est aussi celui de la naissance véritable du fils de Nanni Moretti qui va bouleverser ses projets et finalement aboutir au tournage d'une comédie musicale au lieu du documentaire politique initial longtemps souhaité.

Durant plus de vingt, Silvio Berlusconi a occupé le devant de la scène et de la vie poltitique en Italie, divisant profondément les Italiens. Adulé par certains, détesté par d'autres, la figure du Cavaliere a profondément influencé l'œuvre de Nanni Moretti, qui huit ans après en avoir fait le fil rouge d'Aprile lui consacre en 2006 un film entier cette fois-ci avec Le Caïman et retrouve pour l'occasion, 23 ans après Bianca, Franco Piersanti, le compositeur de ses premiers films dont nous venons d'entendre le morceau Ascesa.
En 2001, cinq ans avant qu'il ne tourne Le Caïman, le festival de Cannes décerne la palme d'or à Nanni Moretti pour La Chambre du fils (La Stanza del figlio dans son titre original).

Toute la mélancolie dans cet extrait de La Lettre à Arianna de Nicola Piovani qui habite les parents d'Andrea, dans La Chambre du fils, très grand film sur la douleur et la perte d'un proche.
En 2011, Nanni Moretti s'intéresse cette fois à la figure du chef de l'église catholique et décide de raconter de l'intérieur les coulisses du pouvoir au Vatican. Michel Piccoli prête ses traits au cardinal Melville, élu en conclave nouveau pape. Nanni Moretti pose cette fois-ci la question du poids de la charge et des responsabilités en désacralisant la figure sensée être inoxydable du pape.

La bande annonce d'Habemus Papam. Le film sort un an et demi avant l'annonce de la renonciation, le 28 février 2013, de Benoit XVI. Certains y verront un signe prophétique.

La Minute Judy Garland
Cette semaine dans La Minute Judy Garland, j'ai eu envie de vous faire entendre une chanson au générique de la bande originale du récent et dernier film de Clint Eastwood dont le thème a pour cadre les passeurs de drogue entre le Mexique et les Etats-Unis. Le portrait d'un octogénaire joué par le toujours excellent C. Eastwood, dans le rôle d'une mule, c'est d'ailleurs le titre du film.
Sur l'excellente BO, on retrouve notamment le titre Don't let the old man in (Ne laissez pas tomber le vieil homme) interprété par Toby Keith.

Cette ballade sonore dans l’univers du cinéaste romain Nanni Moretti se clôt avec Jarvis Cocker et Baby’s coming back to me qui figure au générique de Mia Madre, dernière fiction, à ce jour, de Nanni Moretti, contrepoint à Aprile sorti en 1998. Alors que dans le second, la naissance du fils de Nanni Moretti servait de fil rouge à l'histoire, dans Mia Madre, c'est la fin de vie de la mère de Margherita et Giovanni, interprétés respectivement par Margherita Buy et Nanni Moretti, qui constitue la trame de ce film très émouvant, récompensé à juste titre par le prix du jury œcuménique,
en 2015, au festival de Cannes.

 
Prolonger cette émission :

En lien avec notre thème aujourd’hui, je ne saurais que trop vous conseiller de vous plonger dans l'œuvre de Nicola Piovani et Franco Piersanti, compositeurs majeurs en Italie, tout en lisant A Rome avec Nanni Moretti, un livre passionnant de Paolo Di Paolo et Giorgio Biferali, traduit de l’italien en français et édité chez Quai Voltaire en 2017, où les auteurs reconstituent le puzzle géographique des lieux de tournage du réalisateur dans la Ville éternelle.
 
Play list des morceaux diffusés :

Trailer de Santiago Italia, film de Nanni Moretti
Titoli, Io sono un autarchico, Franco Piersanti
Michele, Sogni d’oro, Franco Piersanti.
Bianca main theme, Franco Piersanti
Il valzer della cioccolata, La Messe est finie, Nicola Piovani
Palombella rossa, main theme, Nicola Piovani
Il campo di pallone, Caro diario, Nicola Piovani
Ascesa from Il Caïmano, Franco Piersanti
La lettera di Arianna, La Stanza del figlio, Nicola Piovani
Trailer Habemus Papam, film de Nanni Moretti
Todo cambia, Mercedes Sosa
Don't let the old man in, Toby Keith, from The Mule
Baby’s coming back to me, Jarvis Cocker, from Mia Madre
 
 
 
 
 

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