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Spinoza par Frédéric Lenoir : un philosophe "fasciné" par l'enseignement de Jésus
Présentée par Thierry Lyonnet UAC-34175
L'entretien de la semaine
dimanche 11 août 2019 à 6h30
Durée émission : 12 min

© Stéphane OUZOUNOFF/CIRIC / Wikimédia commons - Dieu traverse toute l'œuvre de Spinoza et pourtant on a dit de lui qu'il était athée
Était-il athée, mystique, hérétique? Pour Frédéric Lenoir la pensée de Spinoza peut rejoindre ceux qu'attire la sagesse des religions mais que désorientent les approches fondamentalistes.
Était-il athée, mystique ou hérétique ? Depuis le XVIIe siècle, la pensée de Spinoza fait débat. Pour Frédéric Lenoir c'est une "révélation". Après des essais sur Socrate, Jésus et Bouddha, ses maîtres spirituels et philosophiques, il publie "Le miracle Spinoza" (éd. Fayard). Car la rencontre qu'il a faite avec Baruch Spinoza (1632-1677) est une rencontre de la "maturité". "J'ai rencontré Spinoza assez tardivement mais ce fut une des rencontres les plus marquantes de mon existence." Lenoir montre comment la philosophie de Spinoza peut rejoindre ceux qu'attire la sagesse des religions mais que désorientent les approches fondamentalistes.
Spinoza était "fasciné" par l'enseignement de Jésus
L'homme selon Spinoza, trois siècles avant Freud
Spinoza, c'est celui qui écrit : "Nous ne désirons pas une chose parce qu'elle est bonne en soi, mais nous l'estimons bonne parce que nous la désirons." Ce que traduit Frédéric Lenoir par : "Ce n'est pas parce que Dieu est bon que nous l'aimons, c'est parce que nous désirons Dieu que nous estimons qu'il est bon." Il y a donc ceci de fondamental dans la pensée de Spinoza qu'il fait du désir "l'essence de l'homme". Trois siècles avant Freud, "Spinoza nous dit que nous sommes fondamentalement mûs par nos affects".
Spinoza mystique et athée
Très critique à l'égard des institutions religieuses, Spinoza considérait que la plupart des religieux sont en réalité motivés par la peur - la crainte qui pervertit le sentiment religieux en superstition. Banni de sa communauté juive pour hérésie, le philosophe a montré comment les lois religieuses, et elles sont nombreuses dans le judaïsme, peuvent infantiliser l'homme si elles sont vécues de manière fondamentaliste. Et peuvent nous détourner de la charité et de la justice.
Dieu traverse toute l'œuvre de Spinoza et pourtant on a dit de lui qu'il était athée. C'est qu'il a rejeté du monothéisme ce Dieu tel qu'il a été imaginé par les hommes. Dans la Bible en effet on décrit un Dieu colérique, rancunier, violent : des caractéristiques qui sont propres... aux humains ! Pour Spinoza, il existe trois façons d'appréhender Dieu, par l'imagination, la raison ou l'intuition. Lui a redéfinit Dieu d'un point de vue philosophique et défendu l'idée que c'est par l'intuition que l'on rencontre Dieu. "C'est un mystique qui rencontre Dieu par l'intuition mais qui le redéfinit philosophiquement", explique Frédéric Lenoir.
Spinoza fasciné par Jésus
Frédéric Lenoir consacre tout un chapitre de son livre au lien entre Spinoza et le Christ. Et rappelle que Spinoza était "fasciné" par l'enseignement de Jésus. Pour le philosophe, la religion devait conduire uniquement à pratiquer la justice et la charité, "ce qui est fondamentalement l'enseignement du Christ", précise Lenoir.
Ce qui a séduit Spinoza chez Jésus, c'est un autre rapport à la loi et au désir. "Le Christ nous a libérés de l'observance de la loi et il l'a gravée à jamais au fond des cœurs", écrit le philosophe du XVIIe siècle, qui a lu dans les évangiles une incitation à respecter la loi religieuse qui procède non plus des peurs mais du désir. Or, "dans les Évangiles, Jésus n'a pas une morale de condamnation, il a une morale de réorientation du désir", explique Frédéric Lenoir. Et "tout le chemin de l'éthique [en référence à "L'Éthique", le principal texte de Spinoza] c'est d'éclairer nos affects pour pouvoir orienter nos désirs de manière rationnelle vers des choses ou des personnes qui nous font grandir, qui sont bonnes pour nous".
entretien réalisé en janvier 2018
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