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Ce que m'inspire l'affaire Polanski
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Ce que m'inspire l'affaire Polanski

RCF,  -  Modifié le 18 novembre 2019
​Faut-il ou pas aller voir « J’accuse », le film sur l’affaire Dreyfus de Roman Polanski ?


Sur cette question, je vous renvoie à la rubrique « Cas de conscience » de La Croix l’Hebdo, en kiosque toute la semaine. Vous trouverez des éléments d’un discernement pour une décision qui relève du fort interne de chacun –il n’y a pas d’enquête en cours en France et Polanski n’est pas sous le coup d’une arrestation.

En revanche, il est poursuivi depuis 1977 par la justice américaine pour le viol d’une jeune fille de 13 ans, et considéré comme un agresseur sexuel et un fugitif par les États-Unis. Au total, je rappelle que Roman Polanski a été accusé d’abus sexuel par six femmes, dont tout récemment une ancienne photographe, Valentine Monnier, qui a affirmé au Parisien, que Polanski l’a violée en 1975, alors qu’elle avait 18  ans. Mais ces cas n’ont jamais donné lieu à poursuites.

Au-delà de la réponse à cette question, toute cette affaire révèle la demande, de plus en plus forte de la part de l’opinion publique, d’une cohérence entre la vie privée et la vie publique d’une personne. Pour l’art, on fait de manière classique la distinction entre l’œuvre et l’artiste. L’artiste peut être immoral, mais cela est-il nécessairement le cas pour l’œuvre ? De fait, dans le cas contraire, il faudrait expurger les « Lagarde et Michard » de notre jeunesse… Mais cette distinction entre l’œuvre et l’artiste tient de moins en moins. Peut-on faire un film sur l’affaire Dreyfus, ou la condamnation d’un innocent, et fuir la justice d’un pays qui vous a jugé criminel ?

Et, c’est vrai dans tous les domaines, en politique, en sport, et aussi en religion, on demande de plus en plus aux personnes qui s’exposent publiquement une cohérence entre ce qu’ils disent et ce qu’ils font. Pour les hommes politiques, cette demande de cohérence est telle qu’elle est désormais à l’origine de nombreuses démissions. Le fait qu’aujourd’hui tout se sache, et se répercute immédiatement sur les réseaux sociaux renforce cette évolution.

C’est bien là le problème : les médias se transforment en justice bis, et les réseaux sociaux en salle de prétoire, permettant à chacun, en quelque sorte, d’exercer une forme de justice parallèle. Cela me choque de voir que certains se croient permis d’interdire l’entrée au cinéma où se donne le film « J’accuse », de faire obstacle à des représentations, d’empêcher des personnes d’y aller. Que l’on décide, en conscience, de ne pas aller voir un film est une chose. Que l’on se substitue à la justice en empêchant les autres d’y aller, est autre chose.

Dans une démocratie, la justice permet de prendre le recul, de ne pas agir sous l’effet de l’émotion, de pouvoir examiner froidement les tenants et aboutissants d’une faute. Au regard de la justice française, Polanski est un homme qui n’a rien à se reprocher, la plupart des faits étant de toute façon prescrits. Nous devons comme citoyens le respecter, ce qui ne nous empêche nullement, comme personnes, de le blâmer.

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