Collège, un lieu seulement depuis 1460 !

« Collège », mot magnifique, il rappelle nos jeunes années de collégiens, mais aussi diverses institutions, certes le Collège de France, mais aussi le collège des cardinaux, les collèges électoraux, et du coup, on devine que le mot a une origine précise qu’on a peut-être oublié. On va donc essayer de la rappeler.

Ce qui est assez drôle c’est que si on consulte un gros dictionnaire étymologique au mot collège on est presque toujours renvoyé au mot « loi » ce qu’on ne comprend pas de prime abord. De fait, issue du latin, lex, legis, loi religieuse puis loi en général, la famille de mots qui s’est édifiée autour de cette racine inclut bel et bien le latin col-legium, « corps de magistrats, de prêtres, régi par une loi ». C’est ainsi que dès 1308, dans l’Ystoire de li Normant, était attesté le collège en tant que « corps de personnes revêtues de la même dignité », obéissant donc aux mêmes règles. Et Furetière de se souvenir que, chez les Romains, existait le Collège des augures, tout comme pour les Chrétiens se distinguait le Collège des Cardinaux, « qu’on nomme autrement le Sacré Collège ». Quant aux Allemands, est-il précisé, ils bénéficiaient du « Collège des électeurs ». Enfin, il ne faudrait pas oublier, pour servir administrativement la monarchie absolue, le « Collège des Secrétaires du Roy ».

C’est en fait vers 1460 qu’entre en langue française le mot collège, en tant que lieu. Et dans le Dictionnaire françois (1680) de Pierre Richelet, le collège est défini comme un  « Lieu établi pour enseigner aux jeunes gens la Piété, le Grec & le Latin & le plus souvent même quelques sciences, comme la Philosophie. » Furetière précise que sur Paris, il y a 50 collèges, le Collège royal, le Collège des jésuites, Lieu d’enseignement, c’est ce qu’il faut retenir, avec  au XVIIe des expressions fortes, qu’on a oubliées.

Eh bien en citant  Furetière en 1690: « On dit d’un homme qui fait paroistre une ignorance grossière qu’il a bien perdu son temps au Collège ». Bon, mais attention à la pédanterie, parce qu’il ajoute qu’« On dit aussi qu’une chose sent le Collège quand elle est faite ou dite d’une manière pédantesque ». À dire, vrai, avouons qu’aujourd’hui on aurait du mal à assimiler le collège à un lieu de pédantisme. Et attention aux écrevisses ! cCest un mot que j’ai repéré en 1801 dans un dictionnaire de néologismes, l’écriveisse désignant alors les « écoliers paresseux ». Sans doute parce que l’écrevisse avance à reculons !