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On est pas sérieux quand on est Boris Vian
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On est pas sérieux quand on est Boris Vian

Un article rédigé par Baudoin de Guillebon - RCF,  -  Modifié le 11 mars 2020
À l'occasion du centenaire de la naissance de Boris Vian, Baudouin de Guillebon nous dresse le portrait du "Transcendant Satrape".

 On est pas sérieux quand on est Boris Vian. C’est l’image qui nous est restée de lui, un bon gars jovial, un gratte-papier un brin anarchiste, un gouailleur parisien comme on en fait plus, inspiré par Jarry, annonçant dans la capitale l’absurdité de Beckett et de Ionesco. Nommé « Equarisseur de première classe » par le Collège de Pataphysique, puis « Transcendant Satrape » il semblait vouloir nous convaincre de son manque de sérieux.
  
Ce n’était certes pas un héros de guerre, du moins selon ses dires : « Je ne me suis pas battu, je n’ai pas été déporté, je n’ai pas collaboré, je suis resté quatre ans durant un imbécile sous-alimenté parmi tant d’autres. » Mais peut-on le croire ?
La guerre correspond à sa naissance au monde de la musique, il assiste à un concert de Duke Ellington qui le transforme : la vie sans jazz ne vaut pas la peine d’être vécue. Il se met alors à la trompinette, comme il dit, car même dans les passions, il faut mettre le sérieux de côté. Musicien, parolier, il introduit avec Michel Legrand, le rock n roll en France, puis devient directeur artistique chez Philipps.
 

Après ses frasques de jeunesse, en prenant de l’âge, il se range donc ?
 

Ni rang, ni rangées, ni défilés militaires : la discipline n’est pas pour Boris Vian. Ni pour Vernon Sullivan, ce nom de plume par lequel il introduit la série noire en France avec son roman « J’irai cracher sur vos tombes ». Prenant le roman noir au sérieux, il en fait une attaque de la ségrégation américaine, sur fond de meurtres et de sexes. Tout cela soi-disant traduit de l’anglais par ses soins, en réalité, il l’a écrit en 2 semaines pour le plaisir d’un ami éditeur.
 
Même là où se livre son génie, c’est le comique, le pataphysicien qui se révèle. Alors que son roman est adapté au cinéma, mal adapté. Boris Vian se rend à la première du film et fait une attaque, la fleur qui poussait dans son cœur depuis son enfance est enfin épanoui : il meurt sur le coup. Il a 39 ans.
 
A son enterrement, il y a les copains, les Prévert, les Brassens et comme la camarde ne veut pas rendre ce dernier voyage trop sérieux, une grève des croques-morts forcent tous les amis à se retrousser les manches : il faut creuser en chantant pour enterrer Vian.
 
Non, non, pas de sérieux, et pourtant il ne faut pas tomber dans la vulgarité, l’équilibre n’est pas aisé : « Les humoristes sont tristes, dit-il, parce que, dans leur rire, résonne toujours le grelot d’un prophète ». Et l’on écoute mieux les prophètes en riant.

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