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Face au transhumanisme, "il faut inventer un autre imaginaire" pour Jacques Testart
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Face au transhumanisme, "il faut inventer un autre imaginaire" pour Jacques Testart

RCF,  -  Modifié le 12 avril 2018
A l’occasion des Etats Généraux de la Bioéthique, Stéphanie Gallet reçoit le biologiste et directeur de recherche honoraire à l’Inserm, Jacques Testart.
© Rebekka Deubner © Rebekka Deubner

Jacques Testart est connu pour être le père du premier bébé éprouvette, en 1982. Il est également le premier à avoir alerté des dérives eugénistes possibles d’une telle pratique. Il publie récemment : "Au péril de l’humain : les promesses suicidaires des transhumanistes" (éd. du Seuil).
 

Le sens des technosciences

Avant Amandine, le premier bébé éprouvette, Jacques Testart travaillait à l’Inra, l’Institut de recherche agronomique. C’est de cette époque que remonte sa méfiance vis-à-vis des technologies, et du transhumanisme. "Je faisais des mères porteuses de vaches dans le but d’accélérer la sélection génétique des vaches de haute qualité laitière. J’ai commencé en 1964 et j’ai réussi à mettre au point des techniques de mères porteuses pour les vaches en 1972. Il y avait alors des excédents laitiers, ce travail était stupide. J’ai donc commencé à m’interroger sur le sens des technosciences" explique-t-il.

Jacques Testart reconnaît qu’on lui reproche souvent d’avoir ouvert la boîte de Pandore. "Je pourrais répondre facilement que si je ne l’avais pas fait, d’autres l’auraient fait. C’était dans l’air. Mais cela serait un peu facile. On ne peut pas me reprocher cela car très vite j’ai mis les holàs, j’ai dit à quoi devait servir la fécondation in vitro, c’est-à-dire un couple stérile à avoir un enfant qu’il n’arrive pas à faire, mais pas à choisir l’enfant par exemple" ajoute-t-il, expliquant que élargir la PMA à des couples de femmes ou à des femmes célibataires revient à accorder cela à "des gens qui ne sont pas stériles. C’est autre chose."
 

Etats Généraux de la Bioéthique: "pas l'ambition de donner la parole aux citoyens"

"Toutes les innovations ont toujours un côté séduisant. Il faut surveiller ces technologies. Il y aura des choix à faire. C’est la société qui doit les faire, c’est par des procédures appropriées, par des conventions de citoyens, en prenant des personnes tirées au sort dans la société" lance Jacques Testart, qui se montre très critique à l’inverse, vis-à-vis des Etats Généraux de la Bioéthique. "Il n’y a pas d’ambition de donner la parole aux citoyens, il y a seulement la volonté de donner une information mais la décision ne prendra pas en compte les avis des citoyens, noyés par les avis des académies, du comité d’éthique etc.." précise-t-il.
 

"Le rêve du dieu humain"

A propos du transhumanisme, Jacques Testart le définit comme "la volonté de dépasser l’homme pour augmenter ses capacités, pour en faire un individu performant, qui ne soit pas malade, et qui vive plus longtemps. Cela m’inquiète car ce mouvement est crédible dans sa promesse. Il reproduit les vieux rêves de tout le monde, toujours on a rêvé du surhomme, du dieu humain. On nous le promet aujourd’hui armé des progrès technologiques récents très importants, en génétique, en neurobiologie, en informatique".

Dans son livre, Jacques Testart en profite pour égratigner la puissance de l’argent et la responsabilité des grandes entreprises dans le développement du transhumanisme. "Ce n’est pas un hasard si tout cela est installé dans la Silicon Valley, en Californie. Les multinationales sont partie prenante de cette affaire. On peut faire la critique de cela. C’est ce que font les pessimistes actifs comme moi. Mais beaucoup sont inconscients" conclut-il.

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