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L'Église et la libération des mœurs
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L'Église et la libération des mœurs

RCF,  -  Modifié le 7 janvier 2020
Gabriel Matzneff peut-il résumer à lui seul tout le bilan de Mai 68 ? Quelle relation l'Eglise entretient-elle avec la libération des moeurs ?


Et voilà Mai 68 voué aux gémonies ! Parce que l’on découvre, avec horreur, la complaisance dont nous avons fait preuve à l’encontre d’un homme qui profitait de son statut d’écrivain pour justifier ses pires perversions pédocriminels, il faudrait donc remettre en cause tout ce que l’on doit à cette époque…

Comme si Gabriel Matzneff résumait à lui seul tout le bilan de Mai 68.

Dans le monde catholique, certains se sont empressés de triompher sur l’air de « on vous l’avait bien dit ». Ils s’appuient notamment sur un texte publié récemment par pape émérite Benoît XVI, qui fait de Mai 68 et de la libération des mœurs le grand facteur explicatif de la crise de la pédophilie dans l’Église.

L’ancien pape allemand explique ainsi que « l’absence de Dieu », la perte du sens religieux, qui a envahi dans les années 1970 jusqu’aux séminaires, aurait rendu les prêtres démunis face aux tentations, en inculquant un esprit de « permissivité et de relativisme ».

Historiquement, c’est faux, car la pédophilie dans l’Église remonte à bien avant les années 68. De plus, il aurait fallu alors que l’Église de cette époque ait été un grand supporter de cette libération des mœurs, et on en était loin. Même si les catholiques ne sont pas restés en dehors de ce mouvement, les années 90 ont été une tentative de lutter contre tout ce qui dans la révolution des années 68 semblait accorder des libertés nouvelles en matière de sexualité : pilule, cohabitation avant le mariage, homosexualité. Et justement, il n’a pas été épargné, loin de là, par la crise des abus sexuels.

Pour autant, l’affaire Matzneff montre bien les dérives d’une société d’individualisme forcené, où chacun cherche son propre plaisir, sans plus se poser la question de l’autre, où les certitudes morales semblent à ce point délabrées et inaudibles. Et il est vrai que dans l’Église, il y a eu très rapidement une critique de ce mouvement.

Fut-elle à la hauteur ? Pas toujours. En se braquant immédiatement contre tout ce qui pouvait sembler un desserrement des tabous de la sexualité, l’Église a laissé nombre de catholiques de l’époque un peu démunis. Sans doute l’obsession de la sexualité morale, qui a pris alors l’institution ecclésiale, en mettant sur le même plan tout acte sexuel ne rentrant pas dans les normes traditionnelles (homosexualité, pédophilie, adultère, rapport en dehors du mariage, etc.) n’a pas aidé à y voir clair, et à discerner en fonction des situations, des âges, des règles d’autorité.

Dans le texte qu’il a publié en conclusion des synodes sur la famille, le pape François commence ce travail d’aggiornamento, en invitant à prendre en compte « la complexité des réalités et des situations humaines ». Il est urgent de continuer à faire ce travail, pour aider chacun à se repérer dans le grand mouvement de libéralisme sociétal à tous crins que nous connaissons aujourd’hui.
 

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