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Lubrizol: pour Corinne Lepage, "il faudrait commencer par appliquer la législation des sites Seveso"
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Lubrizol: pour Corinne Lepage, "il faudrait commencer par appliquer la législation des sites Seveso"

RCF,  -  Modifié le 23 octobre 2019
Dans deux jours, cela fera un mois que l’usine Lubrizol de Rouen s’est enflammée. Une usine de 420 salariés qui fabriquait des additifs pour les peintures, huiles et carburant.
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Un site classé Seveso, en plein cœur de la ville de Rouen, qui est partie en flamme. Cela fait bientôt un mois qu’un incendie majeur s’est déclaré dans cette usine spécialisée dans la production d’additifs destinés à enrichir les peintures, l’huile ou encore les carburants industriels. Un incendie aux conséquences encore floues. Un flou alimenté par les pouvoirs publics, et qui agace aujourd’hui certaines associations.
 

"On confond toxicité et toxicité critique"

A l’image de l’association Respire, dont Corinne Lepage est l’avocate. Ancienne ministre de l’Environnement, elle accompagne les habitants de Rouen dans leurs démarches juridiques, après cet incendie. Des habitants qui, selon Agnès Buzyn, ministre de la Santé, peuvent reprendre une vie normale. "Néanmoins, ceux qui étaient sous le nuage, un petit suivi médical peut être utile. Un mois après, on ne sait toujours pas vraiment ce que les malheureux Rouennais, et même plus loin, ont respiré. C’était tout de même un panache de 22 kilomètres de long sur 6 kilomètres de large" explique-t-elle.

Cela dit, l’ancienne ministre de l’Environnement, qui a l’habitude des catastrophes industrielles, écologiques et sanitaire, le rappelle : "on n’est pas face à un incident majeur. Et heureusement. Cela aurait été le cas s’il y avait eu un effet domino. On peut tout de même dire qu’il s’agit d’une catastrophe industrielle. Cette affaire révèle les graves errements dans lesquels nous sommes rentrés sur la législation des installations classées".

Failles de sécurité sur le site, souci du préfet de développer l’industrie, augmentation du stockage sans aucune étude de danger ni étude environnementale. "Ce qui me choque beaucoup, c’est qu’on a réduit la toxicité à la toxicité critique. Le préfet s’est exprimé en indiquant qu’il n’y avait pas de toxicité critique. La toxicité critique c’est quand vous sortez dans la rue et que vous mourrez. On n’en était pas là. Mais absence de toxicité critique ne signifie pas absence de toxicité tout court. À force de réduire les contraintes, la sécurité, les coûts, on est arrivé à confondre toxicité et toxicité critique" précise Corinne Lepage.
 

"L'Etat va devoir s'expliquer"

"Les Rouennais ont le sentiment d’avoir été abandonnés à eux-mêmes, et de n’être pas écoutés. C’est circulez y’a rien à voir. Je crois justement qu’il y a beaucoup de choses à voir" précise l’ancienne ministre de l’Environnement qui avec l’association Respire a déposé un référé constat le 30 septembre dernier devant le tribunal administratif. "Les informations de la préfecture sont partielles. Il faut des éléments de preuve contradictoires. J’ai donc demandé au tribunal administratif d’avoir un expert judiciaire indépendant d’être nommé de manière à pouvoir faire le point" explique Corinne Lepage.

Pour cette dernière, il est encore prématuré d’évaluer les préjudices subis par la population. De nombreuses personnes ont été impactées, tout comme leurs biens. Sur la question de l’indemnisation, cela prendra du temps. "Xynthia c’était neuf ans. Je suis en train d’imaginer des procédures qui vont permettre aux gens d’être indemnisés plus rapidement, mais ce sont plusieurs années à l’évidence" lance-t-elle.

Pour Corinne Lepage, Lubrizol n’est sans doute pas la seule entité à devoir rendre des comptes. "Il va devoir s’expliquer de plus en plus. J’entends l’Etat qui dit que Lubrizol va devoir rendre des comptes, c’est très bien. Mais la manière dont a été géré cet établissement par le service des installations classées, m’interpelle beaucoup. Il ne faut pas durcir la réglementation des sites Seveso, il faudrait commencer par l’appliquer réellement" conclut-elle.

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