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Marine de Haas (Cimade): "C’est bien plus une crise de l’accueil qu’une crise des réfugiés"
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Marine de Haas (Cimade): "C’est bien plus une crise de l’accueil qu’une crise des réfugiés"

RCF,  -  Modifié le 28 juin 2018
Les chefs d’États et de gouvernements ont rendez-vous jeudi 28 juin à Bruxelles pour deux jours de Conseil européen. Ils vont notamment évoquer la question migratoire.
Rafael Flichman / La Cimade Rafael Flichman / La Cimade

A cette occasion, Stéphanie Gallet reçoit Marine de Haas, experte en questions européennes à la Cimade, auteure d’un rapport intitulé "Dedans, dehors : une Europe qui s’enferme". "On a choisi ce titre pour mettre en illustration le fait que l’Europe depuis près de 20 ans, met en place des politiques migratoires pour limiter l’arrivée de personnes exilées sur son territoire. Et depuis quelques années on voit aussi le rétablissement de contrôles à l’intérieur de l’Union européenne. On a essayé, par des missions de terrains, et des constats au plus près des réalités, de montrer cette double dynamique qui va de paire : une fermeture vers l’extérieur mais de plus en plus une fermeture vers l’intérieur" explique-t-elle notamment.
 

Des ONG engagées face à l'inaction des médias

Le navire allemand "Life Line" a finalement accosté à Malte. Quelques jours plus tôt, c’est l’Aquarius qui errait en mer avant d’être autorisé à s’arrêter en Espagne. "Il faut rappeler le droit maritime pour tout bateau, avec l’obligation de sauvetage lorsque des personnes sont menacées. Et puis il y a le droit international qui fait que quand des personnes sont sauvées d’un naufrage, les personnes qui les sauvent ont l’obligation de ne pas les refouler vers un pays qui ne serait pas sûr. On voit aujourd’hui des bateaux accusés de faire le jeu des passeurs, alors qu’ils répondent à des obligations du droit maritime et du droit international" ajoute Marine de Haas.

"La deuxième chose que l’on peut souligner, c’est de se demander pourquoi il y a des ONG qui patrouillent en mer pour faire des sauvetages. Elles se sont mobilisées en mer Méditerranée face à l’inaction des États et face à l’arrêt des opérations de sauvetage initiées par l’Italie, faute de financement et de solidarité européenne. Ces ONG sont en Méditerranée pour venir en aide aux personnes qui se noient et pour éviter l’augmentation du nombre de morts face à l’inaction des États" lance encore la responsable des questions européennes à la Cimade.
 

Une crise politique plus qu'une crise migratoire

Depuis plusieurs mois, on ne parle que de la crise migratoire. Pourtant cette crise est moins importante qu’en 2015. "A la Cimade, on regarde de manière très critique le terme de crise migratoire. Depuis 2015, et dans les permanences d’accueil des personnes réfugiées, mais aussi avec notre analyse au niveau européen et nos missions de terrain, on souligne que c’est bien plus une crise de l’accueil et des politiques migratoires qu’une crise des réfugiés comme cela a été avancé par les responsables européens. C’est une crise politique qui secoue l’Union européenne, mais ce n’est pas une crise de l’afflux des réfugiés. Aujourd’hui il y a moins d’arrivées en Europe. Ce n’est pas parce que les gens partent moins, c’est parce qu’ils sont bloqués de plus en plus loin" estime Marine de Haas.

On a beaucoup fustigé l’attitude du gouvernement français qui n’ouvre pas ses ports aux bateaux qui recueillent les migrants. "Il faut rappeler que le droit maritime demande aux bateaux qui ont sauvé des naufragés de les débarquer le plus rapidement possible dans le port le plus proche et le plus sûr. Dans la grande majorité des cas, ce sont des ports italiens. La deuxième chose, c’est le fait que le président français se permette de donner des leçons à l’Italie ou aux ONG sur leur travail et sur l’accueil, alors qu’en France la situation des personnes exilées est de plus en plus difficile. La France a beaucoup de choses à revoir dans sa copie avant de pouvoir critiquer les autres" fustige l’invitée de Stéphanie Gallet.
 

La Cimade plaide pour une solution européenne

La France a récemment proposé la création de centres fermés pour accueillir les migrants aux portes de l’Europe. "Ces centres fermés s’apparentent à des sortes de hotspots. A plus de deux ans et demi, on sait que les hotspots sont des échecs. Et ce que l’on observe sur le terrain, c’est que ces centres servent de point d’identification et de tri. Dans ces conditions, on rejette l’idée d’enfermement des personnes exilées. Et nous sommes bien placés pour savoir, de par notre présence dans les centres de rétention, que l’enfermement crée des situations psychologiques désastreuses. Ces solutions sont de fausses solutions. Nous plaidons pour une solution européenne" précise Marine de Haas.

Cette dernière conclut en expliquant que le Conseil européen qui débute jeudi 28 juin "devait permettre aux Etats de se mettre d’accord sur la réforme du règlement de Dublin, qui organise la répartition des demandeurs et des demandeuses d’asile dans l’Union européenne. Aujourd’hui c’est un système qui ne fonctionne pas, car il est extrêmement violent. Il exclue les personnes du droit commun. Et il est inefficace et extrêmement coûteux".

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