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Notre-Dame et la forêt
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Notre-Dame et la forêt

RCF,  -  Modifié le 23 avril 2019
N'y a-t-il pas un lien entre la perte d'un monument du patrimoine français et la crise écologique que nous traversons ?
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La pluie de dons en faveur de Notre-Dame de Paris suscite de nombreuses questions dans les milieux associatifs.

L’un des slogans écologistes est "notre maison brûle et nous regardons ailleurs". Le parallélisme est assez frappant. La charpente de Notre-Dame était surnommée la forêt, l’incendie a provoqué une pollution à cause du plomb de la toiture, l’ensemble a failli nous tomber sur la tête… On peut pousser l’analogie assez loin. La différence, qui explique sans doute cette émotion et cet afflux d’argent, c’est qu’avec Notre-Dame il est plus facile de comprendre la part d’irrémédiable, de perdu à jamais, même si on reconstruit. Mais quand nous perdons une forêt primaire ou une espèce, c’est tout aussi irrémédiable. Et pourtant ce n’est pas perçu de la même manière.
 

Est-ce que cela veut dire que ce flux d’argent pour un seul bâtiment aurait quelque chose d’indécent ?

Je crois qu’entre le souci du patrimoine naturel et bâti il y a bien plus de proximité que d’opposition. En laissant de côté les coups médiatiques des gros sponsors, il y a eu une mobilisation, par-delà les clivages et les classes sociales, qui est source d’espérance. Elle montre que même en ces temps de luttes sociales dures les Français n’oublient pas qu’il existe du commun, qui mérite d’être sauvé, parfois au péril de sa vie, qui mérite de s’unir, d’y mettre des moyens même si ça ne rapporte rien. Notre-Dame rapporte en tourisme bien sûr mais ce n’est pas pour ça qu’on s’y consacre. On a parlé de beauté, d’héritage, d’âme, toutes choses qui vont bien au-delà du calcul intéressé. Je suis persuadé que le même élan peut être suscité pour la cathédrale vivante qu’est la biodiversité. D’autant plus que cette cathédrale, elle, elle nous fait vivre, très concrètement. Et comme les cathédrales au Moyen Age, elle se donne d’abord aux plus pauvres.
 

Alors comment expliquer cette différence de mobilisation ?

D’abord, il y a le fait que la biodiversité est mal connue ; donc elle disparaît de manière très brutale mais on ne le remarque pas. Ensuite, trop longtemps, elle a été l’ennemie ; l’éliminer, ce n’était pas un dégât mais un progrès. On comprend seulement aujourd’hui qu’on en a un besoin vital. Il y a surtout la croyance que comme l’herbe, la vie sauvage « ça repousse », ça se reconstitue, alors que ce n’est pas vrai, pas avec la pression qu’on lui met aujourd’hui. Enfin, beaucoup de gens ne savent pas comment agir de manière utile. L’importance des monuments historiques, depuis l’abbé Grégoire et Prosper Mérimée, c’est entré dans la culture, ça va de soi. L’importance du patrimoine naturel, pas encore. Il faut se dépêcher d’apprendre à la connaître et à l’aimer, cette cathédrale vivante, pour l’empêcher de nous tomber dessus.

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