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​Quand un patron prend ses responsabilités
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​Quand un patron prend ses responsabilités

RCF,  -  Modifié le 5 mars 2019
Il faut lire l’interview que Carlos Tavares, le patron de PSA, a donné récemment au Figaro.
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Nous avons ici un dirigeant qui s’exprime bien au-delà des intérêts du groupe qu’il dirige, sans filtre, ouvertement, prenant ses responsabilités à l’égard de ses salariés, de ses concitoyens et des générations à venir. C’est une interview hors-norme, qui prend le contrepied de bien des idées reçues.

Pour lui, la décision du parlement Européen, en octobre dernier, d’obliger les constructeurs automobiles européens à réduire de 40% les émissions de CO2 est une décision violente qui va entrainer des effets de bords catastrophiques que les responsables politiques n’ont ni anticipé, ni les moyens d’accompagner. Il dénonce une décision qui met en risque les 13 millions de salariés de l’industrie automobile et plus généralement l’ensemble de nos sociétés européennes. Trois arguments ont particulièrement retenu mon attention.

Carlos Tavares ne voit pas se dessiner de modèle fiscal alternatif à la fiscalité sur les carburants qui assure actuellement plus de 414 milliards de recette fiscale aux pays européens. Et quand on voit les troubles quasiment insurrectionnels qu’a entrainé l’augmentation de la taxe sur les carburants en fin d’année dernière, on n’ose imaginer en effet ce qui va se passer lorsqu’il faudra transférer ces 400 milliards de taxe sur l’énergie électrique qui déjà s’enchérit du fait de la sortie du nucléaire.

Carlos Tavares met ensuite le doigt sur une incohérence majeur entre la vitesse à laquelle les constructeurs automobiles sont censés faire évoluer leur offre et la vitesse à laquelle les infrastructures peuvent être déployées pour la soutenir. Il en vient à poser la question suivante : « comment les États, exsangues, au bout de leurs capacités d'endettement, de déficit et de pression fiscale, trouveront-ils l'argent pour financer les réseaux de chargement » ? Autrement dit, à qui profitera cette déstabilisation massive de nos modèles existants ? et qui en Europe assumera les conséquences couteuses de cette incohérence ? Visiblement Carlos Tavares prend date et entend mettre chacun devant ses responsabilités.

Enfin, il constate que la décision du Parlement européen – en imposant aux constructeurs automobiles d’abandonner le moteur thermique qu’ils maitrisaient parfaitement pour le moteur électrique - est tout simplement en train d'obliger le secteur automobile européen à exporter 40 % de la valeur des automobiles vers l'Asie qui s’en frotte les mains. Et Carlos Tavares de poser une question dérangeante : Est-ce pour cela que les citoyens européens ont voté ? Les élus qui ont pris des positions jusqu'au-boutistes avaient-ils ce mandat-là ?

Mais n’est-ce pas un peu facile pour le lobby de l’automobile de dénoncer la politique environnementale européenne ? Quand Carlos Tavares dit dans une interview que « ces questions sont traitées avec une légèreté et un amateurisme atterrants. » Que « cela mérite au minimum une approche professionnelle et scientifique » ou encore que « nous vivons un moment où personne n’écoute personne, où personne n’a confiance en personne. Les citoyens se méfient des politiques, les politiques se méfient des entreprises, les entreprises se méfient des politiques… Cette méfiance de tous, c’est le fondement de la décadence de l’Europe. Et, pendant ce temps-là, les autres régions avancent ». Et bien je pense qu’il faut l’écouter et l’écouter avec attention.

Car la question qu’il pose c’est la question du bien commun. Et j’aimerai que la campagne européenne qui s’annonce parle un peu plus de bien commun, en bonne intelligence avec nos capitaines d’industrie, sur des sujets concrets et opérationnels comme ceux abordés avec raison par Carlos Tavares que des réticences personnelles de Monsieur Bellamy à l’égard de l’avortement, de l’accueil fantasmagorique des migrants ou du prétendu réveil de la bête immonde en Hongrie.

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