Comment faire pour que tous les enfants réussisent à l'école? Jusqu'à présent, et c'est peu de le dire, notre système scolaire échoue dans sa mission démocratique et républicaine. Les enfants issus des milieux défavorisés sont ceux que l'on retrouve en majorité parmi ceux en situation d'échec scolaire. D'un autre côté l'élitisme fonctionne à plein. "L'école française est l'une des plus inégalitaires au monde", admet Monique Aquilina.
Il ne s'agit aucunement d'accabler les enseignants ou les équipes pédagogiques, mais bien de dire qu'il suffit parfois de peu pour que les enfants et les adolescents découvrent le goût d'apprendre. De faire entendre les voix de ceux qui croient encore à l'école comme vecteur d'épanouissement et d'ascension sociale. Monique Aquilina est l'auteure de "Tous les élèves peuvent réussir!" (éd. Bayard). Aujourd'hui proviseure de la Cité scolaire Pasteur de Neuilly-sur-Seine, elle dit être passée de la ZEP, "zone d'éducation prioritaire" à la ZEP "zone d'éducation privilégiée". Mais la réussite des élèves elle y croit, parce qu'on doit tous y croire - c'est-à-dire la vouloir. D'ailleurs, elle confie avoir voulu intituler son ouvrage "Tous les élèves doivent réussir".
S'ennuyer en classe, avoir des difficultés dans certaines matières... qui n'a pas connu cela? Échouer ou réussir, à quoi ça tient? Il y a d'abord le cercle vicieux de l'échec. "L'échec stigmatise, l'échec fait perdre confiance", explique Monique Aquilina. Tout l'enjeu pour le personnel enseignant est de d'aider l'élève à garder confiance, à se fixer des buts et à trouver comment les atteindre.
Mais il y a aussi une question d'accompagnement de l'enfant en dehors de l'école. "Quand on n'a pas les réponses à la maison, témoigne Marie-Aleth Grard, c'est plus dommageable." La vice-présidente d'ATD Quart Monde est l'auteure du rapport édité par le CESE, "Une école de la réussite pour tous" (mai 2015).
Si vous demandez aux enfants ce que ça signifie réussir, ils vous diraient que c'est devenir pompier, instituteur ou médecin. "Ils ont beaucoup de modèles dans leur tête", témoigne Lauriane Clément. Les élèves qu'elle a observés pendant un an étudient au sein d'UPE2A (pour Unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants), qu'on appelle aussi "classes d'accueil". Des classes pour enfants du primaire, du collège ou du lycée destinées aux enfants qui viennent d'arriver en France avec ou sans leurs parents, une transition avant une scolarité plus classique. Beaucoup de ces élèves sont des enfants migrants ou de parents migrants. Le terme "réussite" est pour eux lourd de sens. La journaliste vient de publier le récit de son observation, "Écrire Liberté - À l’école des enfants migrants" (éd. Lemieux).
À la Cité scolaire Pasteur de Neuilly-sur-Seine, là aussi, on a une idée très précise de la réussite. Les parents surtout, témoigne la proviseure, qui sont souvent très diplômés et souhaitent la même chose pour leur progéniteure. "Bien sûr il faut rêver, admet Monique Aquilina, mais on ne peut pas vivre dans le rêve, il y a une réalité, il faut expliquer, accompagner les élèves pour qu'ils aient confiance en eux."
Pour définir ce qu'est la réussite, Marie-Aleth Grard renvoie au fameux "socle commun de connaissances et de compétences". Assez décrié par le corps enseignant, il a toutefois le mérite de définir un projet commun, de base. Et il ne s'agit pas que de savoir lire, écrire et compter. "C'est vraiment permettre à tous les enfants de développer leur intelligence à égalité, du CP à la Troisième, de savoir penser ensemble, de croiser nos pensées, de pouvoir se nourrir de l'intelligence de l'autre..." Dans un système aussi inégalitaire que le nôtre, cette définition peut constituer un objectif ou un point de départ.
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