5 novembre 2021
Commentaire liturgique - 32ème Dimanche du Temps Ordinaire
Tout dans les textes de ce jour va nous provoquer à changer notre regard sur le pauvre. Il va s’agir de la rencontre de 2 pauvres : entre Elie et une veuve païenne à Sarepta, entre Jésus et une autre veuve d'Israël dans le temple.
Au Livre des Rois, l'épisode est une rencontre entre deux «pauvres» : Elie, prophète pourchassé, et une veuve éplorée. Dans cet épisode, il s’agit de l’échange entre un homme tenaillé par le doute et une femme tenaillée par la misère. La rencontre entre ces 2 pauvres suscite un avenir, l’un et l’autre se reçoivent. Il n’y a pas un riche qui vient en aide à un pauvre, mais deux pauvres qui se rencontrent.
Elie, qui fait l’expérience de la nuit de la foi, fait la rencontre d’une femme qui partage sa pauvreté mais ose néanmoins professer sa confiance en Dieu. A son contact, Elie va faire une confession de foi : «Le Seigneur te comblera, comme Il donnera la pluie à la terre».
Le chemin de foi n’est pas une certitude, mais un creuset perpétuel : l’épreuve rencontrée, la sienne propre et celle de l’autre, purifie le cœur, l’expérience de la nuit de la foi ouvre les yeux du cœur.
Dans l’évangile que nous allons entendre, Jésus juste avant vient de dénoncer les prescriptions des scribes qui imposent de pesants fardeaux. Les pratiques du temple sont oppressives. La pauvre veuve d'Israël qui, par conformité, se soumet aux prescriptions rituelles, risque le tout pour le tout : comme dit le texte : elle donne «tout ce qu’elle avait pour vivre». Pour être «sauvée» au sens religieux, elle est contrainte à «donner tout d’elle-même» au sens humain.
Jésus, devant ce geste, met en valeur la foi active d’une pauvre alors même qu’elle subit une loi injuste. Jésus se laisse rejoindre par la confiance de cette femme. Jésus, dans sa passion, va Lui aussi prendre sur Lui le pesant fardeau d’une loi injuste et donnera sa propre vie.
Je pense ici à la logique de la non-violence : la réponse à une loi injuste peut-elle conduire jusqu’au don de soi ? Il ne s’agit pas d’un devoir de martyr mais d’un appel à combattre le mal par l’offrande de sa propre vie.
Ce qui est touchant, c’est que Jésus reçoit sa propre vocation par la contemplation du geste d’offrande d’une pauvre.
Pour clôturer, osons affirmer que la plus belle offrande que nous puissions faire au Seigneur, c’est, comme la veuve païenne de Sarepta et la pauvre veuve d'Israël dans le temple, faire l’offrande de la louange. J’ose dire que la louange est tout ce qui nous avons pour vivre. En effet la louange est chemin de décentrement de nous-même, de nos soucis, de nos préoccupations, pour nous jeter dans la confiance.
Louer, ce n’est pas jeter à rien nos combats et nos responsabilités, mais c’est oser dire que, par delà tout ce qui fait notre engagement d’hommes et de femmes, il y a plus que tout à établir notre cœur dans le cœur de Dieu : non comme de doux rêveurs, mais comme des enfants qui osent s’abandonner, sachant que il n’y a pas plus grand amour que d’offrir à Dieu le sanctuaire de notre cœur pour qu’Il puisse y établir sa demeure.
Nos combats humains demeurent, car nous ne sommes pas des rêveurs. Mais ces combats seront féconds si nous gardons au cœur la mémoire des merveilles qu’Il fait pour nous.
Car, comme disait le Prophète Elie, garde confiance : «N’aie pas peur, Parole de Seigneur …Jarre de farine point ne s’épuisera, vase d’huile point ne se videra, jusqu’au jour où le Seigneur donnera la pluie pour arroser la terre».
Le don de Dieu n’est pas au bout de nos sacrifices, mais il se révèle à ceux qui font de leur cœur, grâce à la louange, un temple pour l’accueillir.
Invitée : Sr Marie de Lovinfosse, sœur de la Congrégation de Notre-Dame de Montréal, co-animatrice du Centre Diocésain pour la Formation Permanente, co-responsable de la Pastorale biblique, membre de la communauté du Béguinage contemporain de Cornillon composée de familles et de religieux.
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